Pourquoi les hautes rémunérations explosent ?

par Raphaël
lundi 17 août 2009

Pour nombre d’entre nous, il est aujourd’hui indiscutable que les rémunérations des grands patrons ont atteint des niveaux extravagants mettant en péril la démocratie, la cohésion sociale et la croissance sur le long terme des entreprises.

 
Stock-options, actions gratuites, retraites chapeaux ou parachutes dorés : on ne compte plus les dispositifs réservés à une infime partie des salariés de l’entreprise. Prenons l’exemple symptomatique des stock-options, 80% des entreprises du CAC40 disposent de plans de stock-options (étude Cegos), mais seul 1% des salariés en bénéficie à hauteur de 1,2 à 2 millions d’euros. De colossales fortunes s’établissent en quelques années au détriment du plus grand nombre. Sans commentaire.

Comment en est-on arrivé là ? Comment un tel modèle inégalitaire a-t-il pu s’installer insidieusement portant préjudice à la démocratie ? Comment lutter contre les dérives de quelque-uns ?

Le 20ème siècle est marqué par la transformation du mode de gouvernance des entreprises : les patrons propriétaires ont peu à peu confié la direction de leurs entreprises à des patrons salariés. Après les Trente Glorieuses où le compromis fordiste prévalait et où les gains de productivité étaient équitablement partagés à l’ensemble des salariés, on a assisté au retour des actionnaires et à la financiarisation de l’économie. Une question simple s’est posée : comment aligner les intérêts des dirigeants salariés sur ceux des actionnaires ? Tout simplement, en attribuant une part variable toujours plus croissante du salaire sous forme de bonus ou stock-options directement liée au cours de la bourse. Les effets pervers d’un tel système nous ont conduit à la crise actuelle : choix industriels sacrifiant le long terme au court terme, opérations de restructuration visant à accroître la rentabilité immédiate (délocalisations), opérations financières afin d’augmenter le cours boursier (rachats d’actions, hausse des dividendes), scandales financiers (Enron en 2001, WorldCom en 2003) mais aussi défaillances retentissantes en France (Vivendi ou France Telecom).

Les excès de cette crise financière et la faillite du management à l’américaine sont la démonstration patente que la gouvernance des entreprises doit désormais privilégier la valeur partenariale à la valeur actionnariale, la création de richesse entre les différentes ressources humaines et matérielles (savoir-faire, compétences, innovation) à la création de valeur pour le seul actionnaire, une croissance soutenable à une vision court-termiste. La gouvernance des entreprises ne peut avoir pour seul objectif la maximisation du cours de bourse au compte des actionnaires.

Pour inverser la tendance, une réforme profonde du mode de gouvernance des entreprises doit être engagée à l’échelle européenne afin de faire participer davantage les salariés aux prises de décision. On pourrait par exemple, imposer que la moitié des membres des conseils d’administration soient des salariés : c’est déjà le cas en Allemagne pour les entreprises de plus de 2000 salariés, cela explique d’ailleurs peut-être les succès de notre principal partenaire européen à l’exportation. De manière plus générale, c’est le principe même de codétermination des salariés qui forme, dans les pays nordiques et germaniques, un pilier fondamental du socle démocratique garantissant la cohésion sociale du pays.

Encore une fois, seule l’Europe peut contraindre tous les pays membres de converger vers le haut au moyen d’un projet commun et d’une vision politique centrée sur l’humanisme, évitant toutes sortes de dumping et de concurrence entre états : la crise actuelle doit être le point de départ d’une refonte du système capitaliste.


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