Rentrée reportée

par maltagliati
samedi 4 août 2012

Pour éviter le scénario catastrophe en plein été, les responsables de la zone euro ont accepté une solution « technique » impliquant la banque centrale de Grèce, autorisée à faire une avance au Trésor grec de 6 milliards d'euros à court terme en août. Cette solution, autorisée exceptionnellement, permettra à Athènes d'assurer ses échéances en déchargeant la Banque Centrale Européenne de toute responsabilité.

C’est par cette nouvelle entourloupe que nos édiles européens se sont assurés un mois d’août tranquille. Assuré ? Rien n’est moins sûr. Les tensions s’exacerbent. L’inquiétude gagnait les marchés il y a quelques semaines quand le taux de la dette d’État espagnole à 10 ans passait les 6%. Que dire aujourd’hui, alors que ce même taux continue à grimper, au-delà des 7,20% et que les taux italiens ont eux-mêmes franchi de manière durable la barre des 6,5% ? La situation est intenable. Plus personne ne veut risquer un cent sur la dette d’État. Il y a donc des masses d’argent errantes qui entraînent des fluctuations complètement absurdes sur les marchés : hausses et baisses brutales de la bourse, panique sur le cours des matières premières, placements à intérêts négatifs sur des débiteurs dits sûrs (Allemagne) alors que tout montre leur nécessaire implication dans le processus de désendettement en cours. Le différentiel entre un placement en euros sur de la dette d’État allemande est de 5% par rapport à la dette d’État espagnole, alors que ces deux dettes sont indéfectiblement liées…
 
Forte de son impact sur l’ensemble européen et de l’effet d’entraînement qu’elle joue à l’égard de l’Italie, l’Espagne négocie chèrement son plan de sauvetage. Il est évident qu’à l’égard de l’Irlande, du Portugal et de la Grèce, l’ensemble européen a pu dicter sa loi et imposer des conditions draconiennes. Il n’en va pas de même à l’égard de l’Espagne. Depuis que celle-ci a dévissé, ce sont bien les débiteurs qui font la loi. C’est la nouvelle donne européenne de l’été, face à laquelle, ainsi que l’entérinent nos dirigeants, il est urgent d’attendre. La Banque centrale Européenne n’a, cette semaine, donc RIEN décidé. On en reste pourtant, je l’ai souligné la semaine dernière, à cette situation paradoxale : les dangers sont tellement imminents que les marchés sont certains d’une intervention « bazooka » des autorités monétaires et politiques, et jouent donc la hausse plutôt que la baisse !
 
Le FESF n'a encore jamais été utilisé pour racheter de la dette sur les marchés. Il peut agir en théorie, pour faire baisser les taux, sur le marché primaire ou secondaire. C'est cette dernière hypothèse qui serait privilégiée, la première étant jugée trop alarmiste. Le FESF dispose de 210 milliards d'euros de fonds, et c’est bien assez pour assurer les besoins de refinancement de l'Espagne, estimés à 50 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année. Pour actionner le FESF, il suffit d’une décision de l'Eurogroupe, facile à obtenir rapidement, même en plein été, et deux conditions politiques, à ce jour, non remplies : une demande d'aide formelle de l'Espagne et un feu vert de la Commission budgétaire du Bundestag, le Parlement allemand. Madrid vient tout doucement à cette demande d’aide. C’est le monde à l’envers que les pays qui doivent venir à son secours font tout pour qu’elle appelle à l’aide ! Pour l'instant, l'Espagne refuse toute demande d'aide à l'Europe, puisque le recours aux fonds européens de secours est soumis à des conditions contraignantes pour les finances publiques, au moment où le pays subit une grave crise économique et s'enfonce dans la récession. Mais cette possibilité de refus d’une aide conditionnée est bien le signal de la position de force des débiteurs les plus endettés. Le message dominant est désormais : en garantissant le pire pour les plus faibles, tout le monde sera entraîné. Et c’est ce signal FORT qu’a ponctué l’intervention BIDON de Mario Draghi au moment de l’ouverture des Jeux Olympiques : quoi qu’il arrive, il faudra bien tout faire ! Cette semaine, super Mario a montré que, même en ne faisant rien, alors que les taux espagnols crèvent le plafond, la BCE n’arrive pas à affoler les marchés plus de 24h… Du délire !
 
Revenons donc à nos fondamentaux : passera l’été, mais passera pas l’hiver  ! Il n’est pas vraiment utile pour suivre l’évolution de la crise internationale de s’attarder dans ces labyrinthes financiers et ces mesures techniques. Le mouvement essentiel de l’heure présente est l’installation de la GRANDE RÉCESSION. C’est elle qui va donner un grand coup de pied dans cette pagaille politico-financière et provoquer le GRAND CHAMBARDEMENT.
 
Telle sera la vraie rentrée.
 
MALTAGLIATI
 
p.s. La guerre en Syrie prend une tournure de plus en plus internationale. Cela reste une optique bien connue de l’élite politico-financière que de masquer son fiasco par un conflit mondial. Ceci aussi peut bouleverser la donne.

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