Repenser différemment notre système productif

par Luc DANDO
jeudi 25 septembre 2014

Nous vivons une crise sociale, économique et environnementale majeure. Les origines de cette crise sont parfaitement identifiées par bon nombre de penseurs dont vous faites peut être partie : financiarisation de la nature et de ses ressources, création monétaire par le crédit au profit des banques privées devenues créancières des états, démesure du productivisme financiarisé, libéralisme de marché, etc. Notre monde est complexe car les interactions sont aujourd'hui planétaires et il est difficile de comprendre qui décide de quoi et dans quel périmètre d'influence. Je travaille pour l'industrie depuis 25 ans, dans le développement des outils de production et plus récemment sur des sujets de recherche en énergies renouvelables. Je suis moi-même chef d'entreprise et, de l'intérieur de ce monde, j’observe l'avènement des nouvelles technologies, des valeurs qu'elles servent. Je ressens de moins en moins d'affinité avec la politique industrielle actuelle. Elle est, de mon point de vue, beaucoup plus au service de la finance que du bien être humain, et le profit actionnarial prévaut sur la protection de nos écosystèmes naturels.

 J'ai pris conscience, comme Kofi ANNAN secrétaire général de l’ONU l'a fait en 1999, que notre système productif est le véritable moteur sociétal car c’est le créateur de richesses de notre économie. Nous devons nous interroger sur notre manière de produire et de consommer, son utilité et ses impacts. Il est possible de construire un système de production réellement au service de l'humain et de l'équité sociale, respectueux de la nature et des ressources qu'elle nous offre. Je suis convaincu qu’une telle transition peut amorcer une mutation sociétale et économique fondamentale. Le « développement durable » met en place des actions très pertinentes, mais cherche encore à concilier des objectifs sociaux et environnementaux avec la croissance économique des marchés libéraux, qui sont les plus grands responsables de l’amplification des inégalités sociales. Ces deux notions sont, de mon point de vue, antinomiques ; c’est pourquoi je ne suis pas partisan de la croissance telle qu’elle est mesurée aujourd’hui par le PIB. 

 Nous vivons dans une société du tout jetable. Nos produits sont fabriqués au bout du monde et le travail disparaît sur nos territoires. La démarche écologique commence à faire évoluer l’industrie vers des procédés économes en ressources et moins polluants. Mais ce « développement durable » reste limité par d'anciennes conceptions – technologiques, énergétiques et organisationnelles – liées aux impératifs de croissance et de rentabilité financière. Nous avons besoin d’un changement plus fondamental. Ce changement peut s’appliquer en premier lieu dans le secteur des productions des biens de consommation courante, nécessitant des petits moyens de production. Nous devons remettre au premier plan : l’humain, l’équité sociale et la protection de l’environnement. Ceci est possible en construisant un système productif visant le double objectif technologique et social :

Les structures de production multinationales et les réseaux de distribution associés, collectent l’argent des consommateurs pour en centraliser une part importante vers leurs actionnaires. Cette masse monétaire quitte alors l’économie réelle au profit de l’économie virtuelle des marchés financiers de la spéculation. Pour favoriser l’économie circulaire sur les territoires, il importe donc de ramener certaines structures de production à l’échelle humaine, et d’en organiser la gouvernance pour en conserver les profits dans l’économie réelle. Nos échanges vitaux sont asphyxiés par le manque d’argent en circulation dans l’économie réelle. Rappelons qu’aujourd’hui 98% de la masse monétaire mondiale est mobilisée dans l’économie virtuelle des marchés financiers (études Bernard Lietaer), il est donc parfaitement compréhensible que 2% ne peuvent plus suffire aux échanges vitaux du plus grand nombre.

Pour atteindre les deux objectifs précités, nous ne devons pas seulement repenser un outil de production ou un mode de comptabilité de manière isolée ; nous devons raisonner plus globalement, en intégrant les différentes composantes d’un système productif que sont :

Techniques, organisation de production, commerce de distribution, concurrence de marchés, études des besoins réels, impact environnemental, comptabilité, forme juridique d'entreprise, législation du travail et du commerce. Toutes ces composantes doivent rester en cohérence pour que le système global atteigne ses objectifs.

Je m'adresse à vous : consommateurs/trices, travailleurs/euses manuels, scientifiques, technicien(ne)s de bureaux d'études, politiques locaux, employés/ées, comptables, fonctionnaires, ingénieur(e)s, vous toutes et tous qui, par vos professions et vos motivations, pouvez participer à la mise en place d’éco-industries locales dans votre territoire. Vous utiliserez ainsi votre savoir faire pour servir des causes plus humanistes que la rémunération du capital des actionneurs des grands groupes industriels, qui pour la plupart n’ont pas de projets d’avenir pour vos enfants.

 

Idées défendues dans mon livre :

Vers une éco-industrie locale

Pour une réappropriation citoyenne de technologies durables

Aux Editions Yves Michel

Auteur : Luc DANDO

eco-industrie.locale@orange.fr

 

Références :

(Etudes Bernard Lietaer)

http://submoon.freeshell.org/en/inter/lietaer.html

http://ploutopia.over-blog.com/article-30349405.html

(Livre : « Vers une éco-industrie locale »)


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