Retour du chômage : le RSA pour tous !
par Denis Szalkowski
lundi 29 septembre 2008
La mise en œuvre du RSA dans les conditions proposées par la droite n’est pas sans poser de nombreuses questions. Le dispositif est-il un moyen efficace de combattre la misère ? Ne constitue-t-il pas un effet d’aubaine pour les entreprises ? N’institue-t-il pas un recours massif au travail à temps partiel ?
Revendiquée comme une mesure sociale de gauche, la réalité semble nous démontrer le contraire. Les Français seront-ils dupes une fois de plus ?
Il semble, encore une fois, que la perception que nous avons du RSA soit loin d’être unanime. Selon Pierre-Alain Muet, secrétaire national adjoint à l’économie durable au sein du Parti socialiste, le RSA ne serait qu’une vulgaire “rustine” qui n’effacera en rien le creusement des inégalités.
Pour Aurélie Filippetti, députée de Moselle, le RSA sera un encouragement au temps partiel. Or, sur les bassins d’emploi de Louviers et de Val-de-Reuil, la mise en œuvre du RSA s’est hélas soldée par l’explosion des contrats à temps partiel. Le RSA ne serait-il pas l’étape ultime du transfert de la charge de l’assurance-chômage vers la solidarité nationale, régionale et locale ? Le RMI n’avait-il pas été la toute première étape de la formidable politique de régression sociale appliquée à la France depuis 1984 ? Il y a un paradoxe, qui ne semble étonner personne à gauche, de voir la droite s’approprier une mesure revendiquée comme étant de gauche.
Un bilan consternant !
Le cas de Nicolas, Bac +4, est édifiant. Il est allocataire du RSA, embauché au conseil général - socialiste - des Bouches-du-Rhône à mi-temps. C’est mieux que rien, me direz-vous ! Mais le RSA ne semble pas répondre aux raisons structurelles qui nous permettent de comprendre ce véritable gâchis collectif.
Dans les 31 départements qui expérimentent le RSA, le Haut-Commissariat aux solidarités actives reconnaît que seul un quart de la population concernée bénéficie d’un retour à l’emploi. On peut évidemment s’en satisfaire. Pour les allocataires du RSA, le revenu médian est de 901 euros. 901 euros pour payer la redevance télé, les impôts locaux et un loyer sans aides !
Pour les finances publiques, le bilan n’est pas glorieux non plus dans la mesure où à l’aide de l’état pour financer les allocataires s’ajoutent les aides que touchent les entreprises. C’est la double peine fiscale.
Que dire enfin de la nouvelle taxe d’1,1 % qui touchera les épargnants en dehors de ceux sur lesquels s’applique le bouclier fiscal ? Au final, ce seront bien les classes moyennes qui supporteront la nouvelle taxe.
Effet de substitution
L’utilisation d’une rhétorique “martiale” sur la pauvreté et sur le chômage ne doit pas nous faire oublier le refus du gouvernement actuel de relever les minima sociaux et le Smic. Là où il faudrait de l’éducation, de la formation, du pouvoir d’achat, de la recherche, de l’innovation, comment pouvons-nous continuer à promouvoir une mesure qui ne fait que d’enkyster le travail à temps partiel dans la société française ?
Et puis, le RSA, la nouvelle amulette médiatico-politique, ne résout en rien les problématiques liées à l’extrême pauvreté en France. La mesure ne concerne en effet que les personnes qui disposent d’un emploi, soit 100 000 Rmistes sur un total d’1,14 million au 30 juin 2008. Pour les autres ? La mise en place du RSA ne risque-t-elle pas d’occulter la partie immergée de l’iceberg en braquant les projecteurs - et surtout - les moyens de l’Etat sur une mesure “porteuse” ? En mettant en avant les “méritants”, ne risque-t-on pas de dénoncer tous les autres ?
L’augmentation brutale du chômage - du jamais vu depuis 1993 - est certes la conséquence d’une situation internationale tendue, mais aussi de choix en termes de politique économique extrêmement contestables. Là où nous aurions dû mettre le paquet sur l’éducation, l’université, l’enseignement, l’innovation et la recherche pour répondre aux problèmes structurels de l’appareil productif, la droite a fait le choix du paquet fiscal. De l’argent reçu qui ne sert à rien en allant gonfler la sphère financière ! Comme le rappelait Lionel Jospin la semaine dernière sur France Inter, seules 2 % des transactions bancaires concernent l’économie réelle.
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