Retraites : promesses, illusions, schéma de Ponzi

par kracheconomique.fr
jeudi 1er juillet 2010

A l’heure où l’économie mondiale s’enfonce inexorablement dans une crise profonde et durable, où la financiarisation du capitalisme fait apparaître des brèches toujours plus béantes, et où les gouvernements semblent de moins en moins aptes à faire face aux amas de dettes accumulés depuis 60 ans, la promesse d’une retraite future pourrait bien être anéantie par un retour à la réalité plus rapide et plus douloureux que prévu, car qui a compris que le système des retraites fonctionne en réalité selon un schéma de Ponzi (autrement appelé entreprise pyramidale) a déjà fait le deuil de son ex-future retraite.

Promesses

Le système des retraites tel que nous le connaissons aujourd’hui en France (système quasi identique dans l’ensemble des pays développés), voit le jour en octobre 1945 avec la création de la Sécurité Sociale, ordonnance n°45-2250. Il s’agit d’un système basé sur la solidarité intergénérationnelle où les actifs paient pour les retraités, avec en échange, la promesse de recevoir plus tard le même soutien de la part des générations suivantes, ou comme le dit l’ordonnance de 1942 : « les cotisations des actifs servent à payer immédiatement les retraites, tout en leur ouvrant des droits pour leur future retraite ». Contrairement aux idées reçues donc, les cotisations versées ne sont pas « mises en épargne » par la Sécurité Sociale ou par les caisses complémentaires, pour être reversées ensuite à la personne qui a cotisé, mais utilisées instantanément par ces organismes pour rémunérer les personnes qui sont déjà à la retraite. Il s’agit d’un droit, qui lui-même, peut être modifié par la loi à tout moment. Le droit à retraite est par conséquent une promesse qui peut ou ne pas s’appliquer. C’est le cas actuellement avec le droit au logement, qui ne s’applique que dans de très rares cas. Pourquoi en serait-il autrement avec le droit à retraite ? Comprendre que le droit à retraite est une promesse infondée, c’est comprendre que le Père Noël n’existe pas et que si demain papa et maman (Sécurité Sociale et caisses complémentaires) n’ont plus les moyens de « jouer » au Père Noël alors c’est la fête de Noël qui disparaît, et les cadeaux (pensions) avec.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le système par répartition (système choisi par le régime de Vichy en 1941) est préféré au système par capitalisation car considéré comme plus stable. L’âge de la retraite est alors prévu à 65 ans. Rapidement, les pensions s’avèrent insuffisantes et des caisses complémentaires, dont l’adhésion n’est d’abord pas obligatoire, voient le jour afin de compléter les pensions versées aux retraités. Au début des années 1970, les cotisations aux régimes complémentaires sont rendues obligatoires pour tous les salariés du secteur privé, le taux de liquidation de la pension à 65 ans passe de 40% à 50%, les femmes ayant élevés 2 enfants se voient bénéficier d’une majoration de leur durée d’assurance, et les régimes d’artisans et de commerçants sont alignés sur le régime général. En 1982, l’âge de départ à la retraite est avancé à 60 ans pour tous les assurés totalisant 37,5 années de cotisations. Dans les années 1970-80, les promesses se multiplient donc sans que personne ou presque (à l’exception de Pierre Laroque et de quelques autres) ne remette en question la faisabilité et la viabilité à long terme de ces promesses, malgré l’allongement régulier de la durée de vie (et donc l’augmentation importante de la facture sanitaire) et l’anticipation prévisible du départ massif des baby-boomers à la retraite au début du XXIème siècle. Ceci étant, on est en droit de se demander si la hausse de productivité, et donc de richesse, observée depuis 30 ans ne vient pas compenser la hausse des coûts liés au vieillissement de la population. Il s’agirait alors d’un problème de répartition des richesses et non plus d’un problème démographique. Quoi qu’il en soit, ceci ne change rien aux desseins des gouvernements des pays développés, qui cherchent par tous les moyens à réduire les dépenses liées aux retraites.

Illusions

De promesses en promesses, c’est l’illusion des peuples qui va crescendo, peuples qui continuent d’espérer, qui acceptent de voir s’effacer les promesses du passé pour ainsi maintenir un droit à retraite qui n’a de droit que le nom, car cette promesse de récompense pour un travail parfois ingrat et souvent pénible ne se perpétue que pour maintenir l’économie à flot, puisque un niveau d’épargne trop important et un niveau de consommation trop insuffisant entraîneraient des déséquilibres trop brusques qui ne permettraient pas au système économique actuel de maintenir ses propres illusions. Croire à la retraite, c’est croire que la vie d’après sera meilleure que la vie d’aujourd’hui, c’est également croire à la pérennité d’un système économique, qui comme toute chose sur Terre ne voit le jour que pour mieux disparaître. Le problème, c’est qu’à force de revenir sur les promesses du passé, on finit par revenir sur la promesse de départ, à savoir le droit à retraite pour tous. En réalité, nos économies sont tellement endettées qu’elles n’ont plus les moyens de financer nos illusions et que tôt ou tard il faudra bien que la vérité éclate au grand jour comme cela fut le cas lorsque les investisseurs du Bernard L. Madoff Investment Securities LLC voulurent retirer leurs fonds. Car contrairement à ce nom rassurant, le fonds d’investissement de Bernard Madoff n’était ni un fonds d’investissement (Investment), ni un fonds sécurisé (Securities). C’est la même chose avec la Sécurité Sociale et les caisses complémentaires : la Sécurité Sociale n’a de sécurité que le nom (il ne s’agit que d’une promesse et donc d’une illusion). Quant aux caisses complémentaires, elles sont en réalité vides. Il s’agit donc du plus grand schéma de Ponzi sur Terre, de la plus grande escroquerie de tous les temps.

Schéma de Ponzi

Charles Ponzi, qui donna son nom au schéma du même nom, était à la tête de la Securities Exchange Company, qui une fois n’est pas coutume n’avait de sécurisé que le nom (Securities). Il proposait aux investisseurs un taux de rendement de 50% sur 45 jours via l’achat de coupons de poste. L’argent des nouveaux entrants servait à rémunérer les sortants, si bien que temps que le nombre des nouveaux entrants était supérieur au nombre des sortants, le système était viable. En revanche, lorsque les investisseurs commencèrent à quitter le système de Ponzi, celui-ci s’effondra sur lui-même et Charles Ponzi fut arrêté. C’est exactement la même chose avec la Sécurité Sociale, les nouveaux entrants (actifs) paient actuellement pour les sortants (retraités). Mais on l’a vu, lorsque les sortants (baby-boomers) seront plus nombreux que les nouveaux entrants (baby-busters), alors c’est la promesse et l’illusion qui s’effondreront en même temps, mais il n’y aura alors plus de coupables puisque tout le monde est coupable dans cette histoire. C’est l’escroquerie parfaite. Quant aux retraites complémentaires, PERP, rachat des années d’études, et sur-cotisations, il s’agit ni plus ni moins que d’un dérivé de la première promesse qui ne garantit en rien que l’argent versé aujourd’hui réapparaîtra un jour, à moins que cet argent ne réapparaisse sous forme de monnaie totalement dévaluée, et donc sans aucune valeur.

La promesse d’hier n’est que l’illusion d’aujourd’hui, l’illusion d’aujourd’hui n’est que la frustration de demain, alors mieux vaut avoir conscience aujourd’hui des réalités de demain.

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