Sombre outre-mer

par Aerobar Films
mardi 30 septembre 2008

Martinique, Guadeloupe, Réunion : pour nombreux d’entre nous, ces départements d’outre-mer (DOM) sont des petits coins de paradis. Malheureusement, ils risquent fort de se transformer rapidement en enfer, non pas du fait d’une lente montée des eaux issue du réchauffement climatique, mais à cause d’une conjonction de la dépression économique mondiale qui s’engage et des cours élevés de l’énergie.

On prend souvent l’île de Pâques médiévale comme exemple d’une société qui aurait dépassé la capacité de charge (carrying capacity) de son environnement et se serait ainsi brutalement effondrée, les ressources naturelles disponibles ne pouvant plus assurer la subsistance d’une population trop nombreuse.

Comme de nombreuses autres îles des Caraïbes, la Martinique d’aujourd’hui est tout autant en situation de dépassement de capacité (overshoot), mais jusqu’à présent elle a été maintenue sous perfusion par la prospérité mondiale.

Ainsi, considérons la densité démographique : avec plus de 350 habitants par km², "l’île intense" - comme l’ont précisément nommée les spécialistes de la communication touristique - se classe parmi les zones urbaines d’Europe les plus peuplées, comme le montre cette carte :



Mais en Europe continentale, l’approvisionnement de ces zones en produits alimentaires est assuré en grande partie par les zones limitrophes, moins denses car destinées à la production agricole, et reliées aux premières par un vaste et maillé réseau de routes, de canaux et de voies ferroviaires. Pour les DOM, point de cet arrière-pays nourricier : la mer qui les entoure est insuffisamment poissonneuse pour assurer la subsistance des centaines de milliers d’insulaires, qui doivent en grande partie importer par bateau l’essentiel de leurs besoins fondamentaux, jusqu’à l’eau potable pour certaines de ces îles.

Economiquement parlant, ces territoires ont deux sources de revenus : l’Etat et le tourisme de masse.

Or, il suffit de lire les journaux pour comprendre que la plupart des Etats occidentaux, et la France au premier chef, vont devoir réduire drastiquement leurs dépenses pour éviter que leur monnaie, qu’ils injectent en ce moment par centaines de milliards dans le système financier, ne perde trop de sa valeur. Face à des décisions difficiles amenant des perspectives d’émeutes, les gouvernements préféreront couper les robinets qui alimentent la périphérie plutôt que ceux qui irriguent la métropole.

Les classes moyennes métropolitaines, révisant avec parcimonie leur budget vacances, cesseront d’autant plus facilement de prendre l’avion pour les îles que le voyage sera devenu hors de prix du fait d’un baril qui reste toujours autour des 100 dollars.

La situation sociale dans les DOM devenant rapidement intenable, l’exil des classes supérieures puis des classes moyennes locales devrait en être la suite logique. Des paquebots de luxe évacueront à la hâte les habitants les plus fortunés vers des terres plus accueillantes - lesquelles ? Les hôtels quatre étoiles se transformeront rapidement en squats géants, tandis que les grandes plantations de bananes et de canne à sucre retrouveront peut-être leurs pratiques musclées à base de chiens et de gardes armés pour protéger leurs cultures des affamés.

Tel est le sort probable auquel sont condamnées (doomed) ces grandes îles surpeuplées ; les îles plus élitistes, Saint-Barth’ par exemple, pourraient être épargnées, ses habitants ayant largement les moyens de s’offrir des milices armées pour protéger leur patrimoine de modernes pirates des Caraïbes.

Vous avez aimé New York 1997 ? Vous allez adorer Fort-de-France 2011 et Pointe-à-Pitre 2013...


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