Stop à la polémique actuelle sur les chiffres du chômage !
par cambacérès
vendredi 4 mai 2007
Menée de façon inutile et partisane, elle prétend "révéler" des réalités sur lesquelles le débat est clos depuis longtemps.
C’est Alain Peyreffite, alors président du comité rédactionnel du Figaro, qui le premier s’est soucié de rétablir publiquement la situation de l’emploi dans ses dimensions réelles, fin 1992 - début 1993.
Un article dans les pages roses du Figaro-économie a ouvert le débat au cours de l’hiver 92-93. Il posait également le problème des chômeurs d’outre-mer, délibérément ignorés des chiffres officiels chaque mois.
Ce débat n’est jamais retombé depuis : bien documenté techniquement, le baromètre de l’emploi du journal Marianne poursuit régulièrement cette oeuvre de clarté publique, pour ne prendre qu’un exemple.
Les quelques agités qui se piquent actuellement de vérité statistique n’avaient alors pas les mêmes scrupules !
Ils sont trop visiblement en service commandé pour le compte de ceux qui, il y a quinze ans, démentaient à cor et cri que les chiffres du chômage présentés par Martine Aubry étaient truqués !
Au-delà de la polémique, bien triste et bien stérile, pour ceux qu sont dans le souci d’une recherche d’emploi, tirons la morale de la fable :
On ne fait de bonne politique qu’avec une bonne technique.
Or, si toutes les politiques de l’emploi menées depuis des lustres échouent plus ou moins, c’est, justement, parce qu’au départ elles sont prisonnières du « mensonge » statistique qui en pipe les bases d’analyse initiales.
Or tout le problème de la statistique sur ce sujet est qu’elle repose sur un processus déclaratif du demandeur d’emploi, puis sur son appréciation par l’employé qui l’enregistre.
Pour faire court : dès qu’un agent du service public de l’emploi lui demande s’il accepte un CDD ou un travail temporaire en attendant un bel et bon CDI, le demandeur d’emploi actif a toutes les chances de répondre oui... et alors bien des chances de se voir porté d’office dans une catégorie n’apparaissant pas à la statistique officielle !
Les statistiques traduisent ainsi et reflètent seulement des comportements possibles ou éventuels de recherche d’emploi, et non la situation économique et professionnelle réelle du chômeur qui :
- permettrait un diagnostic utile ;
- permettrait d’organiser un parcours spécifique individualisé de recherche d’emploi et/ou de formation.
D’où, aussi, l’aberration complète du système des aides aux entreprises pour l’emploi, ciblées sur tel ou tel "public".
Collectivement définies par rapport aux populations ainsi "statistifiées", si l’on peut dire, on comprend pourquoi ces aides aveugles sont un bénéfice net pour les employeurs qui n’ont aucun raison de refuser l’effet d’aubaine aussi maladroitement offert !
Alors que, jusqu’à présent, on le fait en fonction de critères collectifs, sociologiques, finalement assez vagues sur la demande d’emploi.
Il faut attribuer les aides,
les attacher à la personne et les moduler selon son profil professionnel, en fonction des métiers recherchés, selon qu’ils présentent ou non des difficulté de recrutement qu’il serait pertinent d’aider.On s’apercevra alors de l’immense gisement d’économies dont on dispose là aussi pour résorber la dette !
Historiquement, au début des années 80, c’est la vision trop exclusivement collective et sociologique du chômage en vigueur rue de Grenelle qui a grevé la conception des politiques de l’emploi et celle des mesures destinées à combattre un chômage qui s’annonçait de masse.
Régulièrement reconduites, sous un vocable ou sous un autre, au hasard des alternances politiques, ces mesures ont à peine contenu le développement exponentiel de l’inactivité ou de la sous-activité liée aux gains de productivité techniques ou à la réduction du temps de travail.
De plus, grevées par le principe d’égalité de traitement des usagers, les politiques et les mesures conçues, distribuées et gérées sans la moindre nuance d’individualisation par l’administration, ne pouvaient guère mener qu’à un système pérennisant et enkystant peu à peu le problème qu’il était censé résoudre.
A travers des mesures globales, approximatives et rarement évaluées avec rapidité et rigueur d’un budget sur l’autre, le dispositif des aides à l’emploi a surtout souffert d’avoir trop longtemps et très délibérément ignoré l’aspect métier/qualification, soi-disant trop voué aux exigences de l’employeur !
Si l’on devait être caricatural, on pourrait aller jusqu’à relever que le dispositif global des aides à l’emploi aura, depuis quinze ans, apporté plus d’activité à ses concepteurs gérants successifs qu’à ses bénéficiaires supposés, sur le marché de l’emploi.
C’est ainsi que s’est peu à peu imposée l’idée que la lutte pour l’emploi gagnerait à être confiée à des acteurs ou à des partenaires plus motivés et plus proches du marché du travail.