Un « Mix électrique » 100% renouvelable pour la France

par ObjectifObjectif
samedi 31 décembre 2011

Passer à une production électrique 100% renouvelable est possible dès maintenant : un exemple de solution est présenté. Cela élimine les risques industriels du nucléaire, qui menace le pays tout entier. C'est aussi la meilleure manière d'augmenter notre indépendance.

La consommation électrique en France en 2009

En 2009, la consommation électrique finale en France1 correspond à une puissance moyenne par habitant de 810Watt.

Il s'agit bien de toute la consommation électrique, y compris la consommation des entreprises et des commerces ainsi que les pertes et les gaspillages actuels.

La place du chauffage électrique et de l'eau chaude sanitaire

A lui seul, le chauffage électrique des bâtiments est estimé2 à une puissance moyenne par habitant de 208Watt.

Mais il représente aussi le principal risque de déséquilibre de notre réseau électrique, en créant des pics de puissance de l'ordre de 90GigaWatt, tellement grands que les centrales nucléaires sont incapables de les compenser, ce qui nous oblige à importer de l'électricité en hiver alors que la production annuelle est excédentaire. Les pointes de consommation d'hiver représentent 170% des pointes d'été, qui sont de l'ordre de 53GigaWatt : le chauffage électrique nous oblige à investir dans 70% de puissance de production de plus que nécessaire.

Le chauffage électrique de l'eau chaude sanitaire est estimé3 à une puissance moyenne par habitant de 72Watt.

Le chauffage électrique représente surtout un gaspillage d'énergie électrique, alors qu'un simple stockage d'eau chaude chauffée par le soleil garderait nos logements à une température confortable, comme le montre tous les jours en Suisse la société Jenni4. Avec 10m2 de panneaux solaires thermiques par personne, et l'appoint de la chaleur issue de la cogénération chaleur-électricité à base de granulés biomasse domestique, on supprime tout chauffage électrique ou à énergie fossile dans les bâtiments.

Le chauffage renouvelable par solaire thermique et co-génération biomasse baisserait la consommation finale électrique annuelle à moins de 530Watt de puissance moyenne par habitant. Le chauffage électrique des bâtiments et de l'eau chaude augmente la consommation électrique finale de 53% et l'investissement en puissance de production de 70%.

Foisonnement et partage : le pouvoir du nombre

810Watt par personne, c'est moins que la puissance d'un petit aspirateur, cela paraît ridicule. Car qui a conscience, en allumant un aspirateur, de l'effet sur la production électrique nationale ? Si tous les habitants allumaient en même temps un aspirateur et un fer à repasser, le réseau électrique s'effondrerait en France. Car une fois centralisée, une petite puissance locale, multipliée par le nombre, draine des puissances inimaginables.

Heureusement, l'effet de foisonnement est aussi valable à la production : une petite production locale multipliée par le nombre d'habitants équilibre la consommation du pays.
810Watt x 62 millions d'habitants= 50,22 milliards de Watt (résumé en 50,22 GigaWatt).

Un « mix » des différentes sources renouvelables est nécessaire, pour compenser les variations naturelles des puissances disponibles pour chaque source. Par exemple, l'hydraulique et l'éolien peuvent assurer la plus grande part de la production de nuit, quand le photovoltaïque est à l'arrêt.

C'est pourquoi, à l'échelle d'un pays, mettre en commun toutes les productions locales par un réseau de transport de l'électricité est essentiel, afin que les diverses sources puissent se compléter : le passage d'un nuage traversant le ciel français provoquera une baisse de production des installations photovoltaïques dans l'ombre du nuage, mais sera compensé par les autres installations, et aussi par l'éolien, car le nuage est poussé par du vent.

Grâce à un partage de la production à l'échelle d'un pays ou d'un continent, les variations de production globale sont assez lentes pour être prévisibles, laissant le temps de commander les sources d'énergie qui le permettent (hydraulique de barrage, biomasse) afin d'équilibrer les consommations.

Électricité : la banalisation de l'esclavage

Un aspirateur paraît ridicule dans notre usage de l'électricité : qui se préoccupe de la puissance électrique d'un aspirateur ou d'un fer à repasser ? Pourtant, la production actuelle de 810Watt de puissance électrique moyenne par habitant c'est l'équivalent de 6 coureurs cyclistes bien entraînés5 qui pédalent pour vous sur un vélo-générateur, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, sans aucun arrêt !

Avant de penser production, il faut évidemment éviter les gaspillages actuels, car l'énergie la moins chère est l'énergie économisée.

Quelle solution renouvelable ?

Les énergies renouvelables sont basées sur le soleil, que ce soit par son action directe (solaire thermique, photovoltaïque) ou indirecte (éolien, hydraulique, biomasse,...).

Un Mix électrique 100% renouvelable est possible, par exemple avec la répartition suivante par habitant :

Pour faciliter la compréhension des ordres de grandeur, seule la puissance installée par habitant est présentée. Mais la répartition réelle prendra en compte d'autre facteurs comme la facilité d'installation (favorisant les grands toits plats de bâtiments industriels pour le photovoltaïque,...) et l'exposition optimale (éoliennes de grande hauteur dans les zones les plus ventées,...).

Avec cette solution, la puissance moyenne de production par habitant serait de 664 Watt, contre 530 Watt actuellement hors tout chauffage électrique, tout en diminuant prix, pollution et émissions de gaz à effet de serre.

Une solution réaliste

Ces chiffres peuvent paraître abstraits. Pourtant, l'Allemagne a installé en 2010 une quantité industrielle de panneaux photovoltaïques correspondant à une puissance crête de 7,3GigaWatt6 : ce rythme permettrait de sortir du nucléaire en moins de 9 ans !

Au Royaume-Uni, actuel champion mondial de l'éolien offshore, 1,4 GigaWatt sont déjà en service tandis que 36 autres GigaWatts sont en projet7 : c'est 40% du besoin total de la France, montrant que l'on peut aussi installer toute la puissance nécessaire en moins de 10 ans.

D'autres ratios entre énergies renouvelables sont possibles : l'important est de comprendre qu'investir dans une solution de production 100% renouvelable, sans pollution ni émission de gaz à effet de serre, c'est possible et économique aujourd'hui !

Concernant les prix, le KiloWatt.heure électrique est vendu au public à plus de 0,13€ en France8.

Le KiloWatt.heure issu de l'éolien est actuellement acheté à environ 0,08€.

Fin 2011, le prix du marché international du matériel photovoltaïque s'est effondré, contribuant à 0,04€ par KiloWatt.heure, ce qui donnerait en ajoutant l'installation entre 0,08€ et 0,12€ par KiloWatt.heure9. Mais les vendeurs de matériel en France n'ont pas encore répercuté ces baisses.

Enfin, les granulés bois reviennent à 0,05€ par KiloWatt.heure thermique10, mais une chaudière bois domestique avec générateur électrique est encore chère du fait d'une fabrication rare. Par contre, la granulation domestique des déchets de biomasse permettra d'économiser sur le traitement de ce qui est aujourd'hui considéré comme des déchets.

Une indépendance à conquérir

L'indépendance énergétique est à notre portée, il faut seulement investir le prix de quelques télévisions pour y arriver en moins de 10 ans : c'est plus rentable pour chaque citoyen que tout placement financier pour la retraite, surtout avec une inflation monétaire de 800% depuis 198011.

C'est aussi la seule manière de diminuer largement les importations d'énergie fossile, carbonée ou radioactive, dont l'extraction pose de graves problèmes humanitaires et qui déséquilibrent le commerce extérieur. En effet, le déficit extérieur pour l'énergie en 2010 était de 47,7 milliards d'euro, soit 94% du déficit extérieur total12.

L'indépendance énergétique a un sens très concret : en cas de crise internationale il serait très utile d'avoir une production électrique locale pour faire tourner le pays.

Tandis que le nucléaire, c'est le point faible du pays : à quoi sert une défense militaire si l'on montre aux agresseurs potentiels les centrales atomiques à frapper en priorité pour paralyser le pays pour les prochains millions d'années ?

 

Références

1 Consommation électrique finale en France en 2009 : 440TéraWatt.heure pour 62 millions d'habitants http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Repere_energie_2009_BAT_01-12_cle05161b.pdf

2Détails de l'estimation en annexe

3Détails de l'estimation en annexe

4Stockage d'eau chaude inter-saison par la société suisse Jenni : : http://www.jenni.ch/fr/

5Un coureur cycliste bien entraîné développe environ 150W en situation d'endurance.

6Installation de 7,3GW de photovoltaïque en Allemagne en 2010 : http://www.photon-magazine.com/news_archiv/details.aspx?cat=News_PI&sub=europe&pub=4&parent=3232.

7Éoliennes offshore en Grande Bretagne : http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/service-distribution/dossier/0201766594638/0201766594530-les-emr-nouvel-eldorado-pour-la-filiere-navale-255671.php

8http://fr.wikipedia.org/wiki/Tarification_de_l%27%C3%A9lectricit%C3%A9#Tarifs_particuliers

9A raison de 1000h de production à 100% par an pendant 25ans pour une durée de vie de 30 ans, chaque euro investi contribue pour 0,04€/KiloWatt.heure produit. Les panneaux sont en moyenne à 1€/Watt crête, soit 3000€ pour 3KiloWatt. http://article.lechodusolaire.fr/?id=tvhqacab0612gdfn. L'installation revient entre 1€/Watt crête et 2€/Watt crête selon le type d’installation, soit entre 3000€ et 6000€ pour une installation standard en France de 3KiloWatt crête intégré sur un toit, pour environ 4jour.humain de main d’œuvre d’installation et 1jour.humain de travail administratif.

100,05€/kWh pour 220€ la tonne de granulés bois et 4,5KiloWatt.heure thermique par KiloGramme.

11Bancopoly http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/bancopoly-le-jeu-qui-fait-fureur-102959

12Déficit extérieur pour l'énergie en 2010 : http://lekiosque.finances.gouv.fr/Appchiffre/Etudes/Thematiques/Bilan_Graf2010.pdf page 5. Le montant des importations de minerai nucléaire n'est pas indiqué.

13Statistiques RTE : http://clients.rte-france.com/lang/fr/visiteurs/vie/courbes_methodologie.jsp

14Correspondance entre consommation finale et consommation intérieure : Originellement : http://www.statistiques.equipement.gouv.fr/IMG/pdf/methodo_electricite_prim_fin_20081909_cle28513f.pdf Sauvegardé en http://www.agoravox.fr/IMG/pdf/methodo_electricite_prim_fin_20081909_cle28513f.pdf

15Consommation d'eau potable en France : http://fr.wikipedia.org/wiki/Eau_potable_en_France

 

Annexe

 

Vocabulaire :

Pour se faire une opinion étayée sur la production électrique en France, un petit effort est nécessaire pour comprendre le vocabulaire, car il décrit les concepts utiles. L'important est d'avoir la vision globale, les chiffres sont fournis pour que vous puissiez vérifier les calculs quand vous le voulez.

Ne vous laisser pas arrêter par les chiffres : cherchez et posez des questions, c'est le but de cet article de vous inciter à poser des questions.

C'est aussi la raison pour laquelle dans cet article tous les chiffres nationaux sont ramenés à l'échelle d'un habitant : consultez votre facture d'électricité pour comparer avec votre consommation.

La place du chauffage électrique

Aucun chiffre précis n'a été trouvé pour estimer cet usage. Heureusement, RTE fourni tous les chiffres de consommation électrique avec des courbes très détaillées13. Estimons la consommation de chauffage électrique en comparant la consommation entre l'hiver et l'été.

Entre les semaines 19 et 40 (mai à septembre) on voit un plateau à 7500GigaWatt.heure/semaine de consommation intérieure, qui est la consommation moyenne de la France sans besoin de chauffage. En extrapolant ce chiffre pour les 52 semaines de l'année, la consommation intérieure sans chauffage serait de 7,5x52=390TéraWatt.heure, ce qui ramènerait à une consommation finale sans le chauffage électrique de 327TéraWatt.heure, en gardant la part de consommation finale par rapport à la consommation intérieure, soit 84%14.

En effet, la consommation intérieure, c'est la consommation finale plus les pertes et les auto-consommations de la filière nucléaire (fonctionnement des centrales et filière de traitement du combustible), qui atteignent 19% de la consommation des abonnés.

A lui seul, le chauffage électrique est estimé à 113TéraWatt.heure de consommation finale, soit une puissance moyenne par habitant de 208Watt.

La place de l'eau chaude sanitaire

Pour 1kg d'eau chaude sanitaire à 60°C obtenue à partir d'eau froide à 10°C, soit une différence de 50°, on utilise 58Wh=209kj d'énergie, soit encore 58kWh pour 1m3 chauffé de 10°C à 60°C.

En France15, une personne consomme annuellement 55 m³ d'eau potable dont 18 m³ d’eau chaude sanitaire, sans compter l'eau chaude industrielle. Ceci correspond à une consommation annuelle de 1044KiloWatt.heure, ou 64,73TéraWatt.heure de consommation finale en énergie thermique pour 62 millions d'habitants, et en ajoutant 20% de pertes estimée pour mauvaise isolation thermique, 78TéraWatt.heure.

En supposant que l'électricité est utilisée pour 50% du chauffage d'eau chaude sanitaire, cela représenterait 39TéraWatt.heure de consommation finale électrique.

Le chauffage renouvelable par solaire thermique et co-génération biomasse baisserait la consommation finale électrique annuelle à moins de 288TéraWatt.heure. Cela représente une puissance moyenne nationale de 33GigaWatt et une puissance moyenne par habitant de 530Watt.

Détail des calculs pour les productions renouvelables

Le tableau suivant présente plus de détails sur le calcul de la production des sources renouvelables envisagées.

Mix électrique renouvelable

Hydraulique

Eolien

Photovoltaïque

Biomasse

 

Puissance crête par habitant

0,38kWc

1,5kWc

1kWc

1kWc

 

Puissance crête France

23,5GWc

93GWc

62GWc

62GWc

 

Taux de charge

30%

22%

12%

10%

 

Équivalent en heures de production à puissance crête

2628h

1927h

1051h

876h

Total

Énergie électrique annuelle

62TWh

179TWh

65TWh

54TWh

361TWh

Part de chaque source renouvelable

17%

50%

18%

15%

 

La puissance crête pour la France, c'est la puissance crête par habitant multipliée par le nombre d'habitants, pris à 62 millions.

Comme on l'a vu dans le vocabulaire, le taux de charge est égal à l'équivalent en heures de production à puissance crête, divisé par le nombre d'heures dans l'année, fixé à 24h/jx365j=8760h.

L'énergie électrique annuelle est égale à la puissance crête France multipliée par l'équivalent en heures de production à puissance crête.

Le taux de charge de l'hydraulique a été calculé à partir des chiffres 2009 de la production française.

Le taux de charge de l'éolien est pris sur les statistiques de RTE.

Le taux de charge du photovoltaïque est issu de la moyenne de 1000h de production en France et des chiffres issus du site web www.bdpv.com.

Les puissances crêtes pour l'éolien et le photovoltaïque ont été arbitrairement choisies comme des quantités arrondies raisonnables par habitant. Le photovoltaïque est mis en premier tant qu'il répond aux besoins diurnes par situation anticyclonique (soleil sans vent), car il est devenu le mode de production le moins cher. On pourrait toutefois l'augmenter pour profiter des capacités de stockage de l'hydraulique de barrage. Au delà, l'éolien est privilégié du fait de son meilleur taux de charge, complémentaire avec le photovoltaïque pour la nuit.

Le taux de charge pour la cogénération électricité-chaleur à partir de granulés de biomasse est le complément pour arriver à 361TWh de production globale : il s'agit d'une utilisation faible des appareils. Ils sont pris avec une efficacité de combustion de 80%, alors que l'on arrive couramment à 92% actuellement, et une efficacité de génération électrique de 20%, pour une énergie massique de 5KWh/kg pour des granulés de bois habituels. Nombre de chaudières ou poêles sont vendus avec une commande à distance par internet : la généralisation de cette fonction permettra de réguler la production locale en fonction de l'équilibre global du réseau de distribution électrique.

La situation décrite est un point de départ montrant une solution pour laquelle la production annuelle est supérieure de 25% à la production actuelle, et les puissances installées permettent de répondre aux pics de puissance appelée. Il s'agit donc d'un bon point de départ pour une optimisation plus fine.

La présentation de cette solution permet de démontrer qu'il existe au moins une solution de production électrique 100% renouvelable pour la France.


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