World of Tradecraft

par Aerobar Films
mercredi 3 décembre 2008

Mike Masters a mis sur son excellent blog la présentation qu’il vient de faire au MIT (Massachussets Institute of Technology). Il y dit en mots simples et en vingt planches très dépouillées ce qui nous a demandé beaucoup d’encre électronique : il y a eu hypertrophie puis explosion d’une superbe bulle sur le marché des matières premières (commodities) en 2008.

Masters explique que trois conditions se sont mises en place ces dernières années pour permettre aux matières premières, et au pétrole en particulier, de s’envoler vers des sommets tout relatifs.

 
La première, que nous subodorions, est que :
dans les années 1980, les acteurs du marché physique du pétrole décidèrent de fixer le prix des transactions spot comme celui des futures plus ou moins un certain différentiel. Les prix spot devinrent des dérivés des prix des futures - et non l’inverse.
Ce fait explique parfaitement pourquoi maintenant le prix du pétrole s’enfonce bien en-dessous de son coût marginal, anticipant largement la baisse de consommation effective - ce n’est pas parce que les usines automobiles s’arrêtent que les stations-service ferment leurs portes.
 
Cela signifie donc plus largement que, depuis 20 ans, le cours du pétrole ne représente plus le prix "réel" de cette matière première, tel qu’il serait fixé par l’offre et la demande mondiale. Masters le dit d’ailleurs plus loin :
Le prix des futures de pétrole est fonction de l’offre et de la demande en futures de pétrole. Cette demande vient de 3 sources : le besoin en couverture des consommateurs physiques de pétrole, les spéculateurs traditionnels et les "investisseurs" d’indice.

Ce sont ces "investisseurs" qui ont fait monter le baril à près de $150 cet été et cherchent maintenant à l’amener sans doute à des niveaux proches des $30, en vendant à découvert, avec la bénédiction des banques centrales et de l’AIE qui considèrent qu’un pétrole bon marché est forcément bon pour relancer l’économie.

Au-delà de cette explication simple mais robuste de ce qui a fait les cours du pétrole ces dernières années, on comprend désormais que l’économie réelle est complètement sous contrôle de la finance.

On s’est gaussé du système économique communiste, dans lequel les prix des biens et services étaient définis par une nomenklatura en charge de l’établissement de plans quinquennaux, faisant totalement abstraction des mécanismes simples de l’offre et de la demande.

Sans nostalgie aucune de ce système, on constate néanmoins aujourd’hui que le prix d’un des composants essentiels de l’économie réelle mondiale est entièrement déterminé par quelques milliers de jeunes adultes encravatés, qui jouent, devant leurs écrans de salle de marchés, à un espèce de jeu de rôle massivement multijoueur, dans un but unique d’enrichissement personnel immédiat. Welcome to the World of Tradecraft...

A quand le prix de l’eau ou de l’heure de SMIC fixé par ces nouveaux maîtres du monde qui s’ignorent ? Après tout, on leur a déjà bien confié le carbone...


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