L’escale…

par C’est Nabum
samedi 29 octobre 2022

Puis l'échelle décrut.

Faire escale, pour les amateurs d'étymologie tout comme pour ceux qui n'en veulent rien savoir, c'est emprunter une échelle pour descendre à terre. Il est bon de revenir au sens premier des termes qui justement impose une conception plus terre à terre que cet océan de truismes qui se nichent dans les croisières absurdes du gigantisme et de la gabegie.

Le modèle économique a fait la courte échelle à ce tourisme de masse qui s'arroge le privilège de polluer à tout va, d'afficher sa morgue et sa supériorité économique partout où il passe, de prendre de haut les peuples miséreux perchés sur des ponts qui enjambent le mépris et la condescendance.

Il serait justement bien de redescendre définitivement à terre, de ranger ces loisirs fictifs dans l'album des hérésies de cette période suicidaire qui nous a conduit à la catastrophe tant écologique qu'humaine. Car voyez-vous, au-delà des dégâts qu'induisent de tels voyages, il y a surtout à réfléchir à cette appétence dérisoire de nos semblables pour le toc, le futile, le luxe de pacotille, l'impudeur et le voyeurisme.

Il n'y a du reste pas que l'échelle de coupée pour signifier la honte et la morgue de ces peuples voyageurs. La passerelle des avions remplit elle aussi son rôle en dégueulant son quota de pervers à la poursuite de la misère humaine. La frénésie de voyage pour les bienheureux des pays riches curieusement se fracasse au refus des mêmes d'accueillir les exilés de la misère, des guerres et des dérèglements climatiques.

C'est à croire qu'il y a quelques peuples élus qui s'arrogent des privilèges qu'ils refusent aux autres. La libre circulation des personnes à la condition de disposer d'un compte en banque, d'un passeport et d'une carte bleue. Il n'est d'ailleurs nullement question lors des escales de faire la courte échelle aux autochtones, tout juste les mitrailler pour revenir avec des clichés qui confirment ceux qui sont véhiculés par notre sentiment de supériorité.

Plus l'occidental emprunte les barreaux des échelles et passerelles pour faire escale plus il gravit les échelons dans la monstruosité et l'ignominie de sa condition de prédateur. C'est assez curieux cette escalade de l'horreur, cette descente aux enfers d'une prétendue civilisation des loisirs qui se réfugient dans des bulles qu'il convient de placer à travers le monde, pour jouir pleinement de la comparaison sans être contaminé par la présence réelle des indigènes.

Revenons à la corde à nœud pour descendre de notre nuage. Au moins, ces nœuds nous resteront dans la gorge et beaucoup ne parviendront pas à mettre pied à terre. Qu'ils aillent alors au diable, sombrer corps et biens puis ils n'ont plus d'âme, sur ces navires de la honte et de la démesure. Il n'est personne à sauver sur ces maudits rafiots qui sont une insulte permanente au véritable esprit de la marine.

Quel pavillon afficher sur ces immeubles flottants qui dégoulinent de leur fatuité, sentent la mort et la décrépitude ? Sans faire injure à l'esprit de la piraterie, une tête de mort s'impose car ce sont là des vaisseaux fantômes qui conduisent à notre perte la planète tout entière. L'escale ultime avant le cataclysme, la dernière marche avant le déluge et l’apocalypse. Descendez, il n'y a plus d'espoir !

À contre-marche.


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