Où étions-nous il y a vingt ans ?

par Fabrice
jeudi 27 avril 2006

Tchernobyl, vingt ans après, nous y sommes, Hiroshima, soixante ans après, Three Miles Island...

Paradoxe de l’histoire, c’est en cette période anniversaire que les prises de position en faveur du nucléaire civil, installé au coeur même de nos pays, emplissent les colonnes de nos quotidiens.

Une question me vient à l’esprit : les experts qui nous avaient expliqué que le nuage radioactif était bien venu jusqu’aux frontières de l’Allemagne, et avait ensuite gentiment rebroussé chemin, sont-ils les mêmes qui aujourd’hui nous promettent un nucléaire « écologique », « dénué de risque » et « garant de notre indépendance énergétique » ? Si la réponse est oui, alors je m’inquiète... Pas vous ?

Où étions-nous il y a vingt ans ?

Il y a vingt ans, jour pour jour, nous vaquions à nos occupations quotidiennes, sans nous douter que l’air avait changé. Nombreux sont ceux qui, en toute inconscience, ont continué à pratiquer leurs activités de plein air, comme moi, et qui ont donc été exposés aux retombées d’une catastrophe lointaine. Certes, notre pays fut moins atteint que nos voisins, mais la confusion politique du moment et les contradictions flagrantes dans l’interprétation du phénomène par les ministres responsables montrent bien que ce qui touche au nucléaire était alors tabou. Alors que le tiers Est de la France était touché significativement par les retombées radioactives, les responsables de l’époque, scientifiques et politiques, ont caché l’ampleur du problème. Vingt ans après, les malades revendiquent une reconnaissance somme toute légitime de l’origine de leur calvaire.

Le bilan établi par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) en septembre : leurs experts ont établi à près de 4000 le nombre de morts dues aux cancers induits par les radiations, parmi les « liquidateurs » (pompiers, soldats et civils réquisitionnés pour « sécuriser » la zone) et les habitants des zones touchées : Ukraine, Belarus et Russie. Mais ces chiffres sont contestés.

Les organisations de défense de l’environnement ont présenté d’autres chiffres : Selon Greenpeace, le nombre de décès potentiels dus aux cancers serait plus proche de 93 000. Par ailleurs, selon une étude scientifique britannique, rendue récemment publique à Kiev, le nombre de décès liés à Tchernobyl devrait atteindre entre 30 000 et 60 000. L’impact sur la santé mentale et psychique des populations touchées est aussi pris très au sérieux, d’autant que 5 millions de personnes résident toujours dans les zones contaminées.

Par ailleurs, l’AIEA et l’OMS ne prennent pas en compte les autres victimes suspectées d’être malades actuellement, ni les malades à venir d’un nuage radioactif qui a au moins touché tout l’hémisphère Nord. Le rapport ne tient en effet pas compte des hausses de cancers de la thyroïde enregistrées par exemple en Bulgarie ou en Tchéquie, et peut-être en France, qui pourraient être attribuables à la catastrophe.

Ce problème revient sur le devant de la scène à l’heure où les lobbies du nucléaire plaident pour la poursuite du programme nucléaire civil, pour remplacer les importations de ce pétrole devenu si ardu à défendre à travers le monde. Au nom de l’indépendance énergétique (sic), de l’écologie (re-sic) ils veulent nous vendre des centrales plus sûres (re-re-sic). Pourtant, à ma connaissance, il n’y a pas de mine d’uranium en Europe du Nord, donc oublions l’indépendance, les déchets nucléaires sont toujours présents, donc oublions cette allusion idiote à l’écologie des source nucléaires de production énergétique, et enfin, aucune technologie n’est sûre, alors que les effets d’un accidents sont, en ce domaine, particulièrement graves, irréversibles et durables.

Laissons les experts débattre entre eux du nombre de ces malheureux qui sont morts ou qui vont mourir, et ne commettons plus les mêmes erreurs. La recherche doit s’orienter vers les sources renouvelables et l’éco-énergie, afin de préserver notre cadre de vie et notre santé.


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