Plančte : bonne nouvelle sur le front de l’ozone

par Sylvain Rakotoarison
mardi 10 janvier 2023

« C'est une bonne nouvelle qui montre qu'on peut arriver à améliorer les choses ! » (Didier Hauglustaine, le 10 janvier 2023 sur franceinfo).

Saluons la bonne nouvelle ! Pour une fois, on peut parler avenir de la planète, protection des 8 milliards d'êtres humains (et de la faune et de la flore qui les entourent), mesures écologiques... en positif, et avec optimisme ! Il s'agit de la couche d'ozone.

Comme de nombreuses substances naturelles (en particulier l'oxygène, c'est-à-dire la molécule composée de deux atomes d'oxygène), l'ozone (qui est la molécule composée de trois atomes d'oxygène) a des effets à la fois dévastateurs et protecteurs et indispensables à la vie. En effet, lorsque l'ozone est dans l'atmosphère, ou plutôt, la troposphère (atmosphère en dessous d'une vingtaine de kilomètres d'altitude, là où se trouvent toutes les activités terrestres, y compris les vols aériens), l'ozone est un fort polluant qui a un impact sur le climat et sur la qualité de l'air. Mais en revanche, la couche d'ozone qui est dans la stratosphère (entre 20 et 50 kilomètres d'altitude) est bénéfique à la planète et surtout, à tout ce qui est vivant, puisqu'elle permet de filtrer les pires rayons ultraviolets du Soleil.

Au début des années 1980, on a commencé à s'inquiéter parce que justement, un trou s'était formé dans la couche d'ozone, au niveau de l'Antarctique, réduisant notre protection UV de manière très dangereuse (un hausse du nombre de cancers de la peau était notamment observée en Australie). L'une des raisons de la formation de ce trou, c'étaient les gaz CFC (chlorofluorocarbones), et plus généralement, les gaz comportant des halogènes (chlore, fluor, brome, etc.). En effet, le chlore est dissocié du reste du gaz polluant par les rayons UV pour aller se mettre avec un atome d'oxygène pris à l'ozone, formant un monoxyde de chlore et une molécule d'oxygène (détruisant l'ozone). Il s'agit aussi des gaz HFC (hydrofluorocarbones) utilisés à l'époque dans les aérosols, les réfrigérateurs et les climatiseurs, ainsi que d'autres gaz employés dans les extincteurs et les pesticides. Les CFC sont interdits depuis la fin des années 1980 dans la plupart de ces pays.

À partir de ces observations alarmistes, l'ONU a cherché à engager une coopération internationale afin de réduire drastiquement les émissions des gaz mis en cause dans la formation du trou de la couche d'ozone. Le Protocole de Montréal en 1987, qui a été ratifié par 198 pays, a ainsi permis de réduire énormément l'émission de ces gaz dans l'atmosphère.



Ce lundi 9 janvier 2023 a été publié le rapport rédigé par 230 scientifiques sur la situation de la couche d'ozone en 2022 pour le compte de l'ONU (on peut télécharger son résumé ici). Pour une fois dans ce genre de rapport produit par l'ONU souvent alarmiste sur la situation de la planète, ce rapport est optimiste et montre que les mesures internationales mises en place depuis quelques décennies ont prouvé leur efficacité sur la couche d'ozone.

Ces scientifiques ont notamment constaté : « L'élimination progressive de près de 99% des substances interdites qui détruisent l'ozone a permis de préserver la couche d'ozone et contribué de façon notable à sa reconstitution dans la haute stratosphère et à une diminution de l'exposition humaine aux rayons ultraviolets (UV) nocifs du soleil. ». La coopération internationale a donc été efficace.

Efficace au point d'effacer à terme ce trou d'ozone provoqué par l'homme : « Si les politiques actuelles restent en place, la couche d'ozone devrait retrouver les valeurs de 1980 (avant l'apparition du trou dans la couche d'ozone) d'ici à environ 2066 au-dessus de l'Antarctique, 2045 au-dessus de l'Arctique et 2040 dans le reste du monde. ». Si c'est si long, c'est parce que certaines molécules nocives ont une durée de vie très longue (de 50 à 100 ans) et leur concentration dans l'atmosphère diminue donc très lentement.

C'est une très bonne nouvelle qui a déjà son impact sur la santé : certains ont évalué que cela pourrait éviter jusqu'à 400 millions de cancers de la peau pour les seuls États-Unis d'ici à la fin du siècle.



Le climatologue Didier Hauglustaine, directeur de recherches au CNRS, s'est montré ainsi très enthousiaste, face à cette bonne nouvelle, au micro de franceinfo le 10 janvier 2023 : « Cela montre que le protocole signé en 1987 a fonctionné et que ces gaz qui détruisent l'ozone ont diminué dans l'atmosphère et que lentement, l'ozone est en train de guérir (…). Cela montre aussi que lorsqu'il y a une mobilisation des scientifiques et une sensibilisation des politiques et des industriels, on peut prendre des mesures utiles. ». L'ozone est un sujet très précis tandis que le bouleversement climatique est un problème global. Le chercheur est donc plus inquiet sur ce dernier sujet : « C'est beaucoup plus compliqué d'agir sur le réchauffement climatique car on parle d'un changement de toute la société. ».

En 2016, l'Accord de Kigali a prévu la suppression définitive des HFC qui, au-delà de détruire la couche d'ozone, sont également très nocifs pour le climat. Le rapport de l'ONU explique que si l'accord était respecté par tous les pays, la fin des émissions de HFC permettrait de réduire de 0,5°C le réchauffement climatique d'ici à la fin du siècle, ce qui n'est pas négligeable.

Mais le rapport pointe aussi le doigt sur une menace : pour réduire le réchauffement climatique, on pourrait néanmoins prendre des mesures contre l'ozone. C'est le paradoxe de la complexité de la nature. En effet, dans la recherche pour prévenir le réchauffement climatique, il y a des projets de géo-ingénierie qui placeraient du soufre dans la stratosphère, les particules de soufre ayant pour fonction de réfléchir les rayons solaires. Le risque, encore incertain, d'un tel procédé serait de détruire l'ozone en même temps et recréer un nouveau trou dans la couche d'ozone.

Il est donc impératif de faire savoir cette bonne nouvelle sur la couche d'ozone : par l'action humaine, un trou a été formé, mais par la prise de conscience de l'ensemble des pays, l'ozone se reforme et le trou s'efface également par l'action humaine. Cela signifie, d'une part, qu'une action en faveur de la planète n'est pas vaine, mais, d'autre part, qu'elle nécessite évidemment une coopération mondiale pour être efficace car c'est un problème planétaire.

Et puis, face aux nombreux sujets d'actualité plus déprimants les uns que les autres, un petit rayon d'optimisme n'est pas superflu, surtout en début d'année, pour rappeler assurément que l'humanité peut se sauver elle-même. Si elle le veut.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (09 janvier 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Résumé du Rapport "Scientific Assessment of Ozone Depletion : 2022" (à télécharger).
Planète : bonne nouvelle sur le front de l'ozone.
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