Comment tourner la page du nucléaire, du pétrole et du charbon

par olivier cabanel
mardi 15 juin 2010

97% des français sont favorables aux énergies propres et renouvelables, mais la plupart pense qu’elles ne pourront jamais remplacer le nucléaire.
Et pourtant !
Les mentalités évoluent rapidement : en effet, en France, ils étaient 68% en 2005 à pouvoir citer spontanément une énergie renouvelable, et ils sont aujourd’hui 85%. lien
Bien évidement la sortie du nucléaire ne peut être que progressive, mais elle pourrait commencer dès demain, et réussir sans difficulté s’il y avait une volonté politique pour faire ce choix indispensable.
Les pessimistes affirment que l’on ne pourrait pas dépasser le taux de 20% d’énergies renouvelables en 2020. lien
Affirmation infondée, comme nous allons pouvoir le constater.
En 2009 la France a consommé 251 mtep (millions de tonnes équivalent pétrole) lien
 L’énergie nucléaire représente 92,56 mtep, puisque la production d’électricité française est de 121 mtep, et que 76,5% de cette production est d’origine nucléaire. lien
La première mesure applicable tout de suite consisterait à appliquer un coefficient d’isolation à tous les bâtiments du pays, secteur privé et public y compris.
En appliquant un coefficient d’isolation de 0,6, à tous les bâtiments, existants, ou à venir, on réduirait d’entrée la demande énergétique du pays d’1/5ème, soit 50 mtep.
Cette mesure primordiale ferait donc descendre nos besoins à 201 MTEP.
Mais on peut aller bien plus loin : Il existe aujourd’hui la possibilité de faire de l’habitat à énergie positive.
Cela revient à dire que les bâtiments, au lieu de consommer de l’énergie, peuvent aujourd’hui en produire. lien
Le potentiel biogaz serait d’après les affirmations officielles seulement de 3,5 mtep. lien
Mais en creusant un peu la question, nous allons voir que ce chiffre est éloigné de la réalité.
En effet, en Allemagne, il y avait déjà en 2007, 3500 unités produisant du biogaz, et en France moins d’une dizaine. lien
En Suède, en 2009, 120 stations services délivrent du biogaz. lien
Pour être utilisé, le biogaz doit être épuré et compressé, et ces installations sont rentabilisées au bout de 4 ans.
Une étude a été faite dans l’Ouest de la France, mettant en œuvre toutes ces possibilités et on peut la découvrir sur ce lien.
Le bio-méthane peut être produit en traitant les ordures ménagères, comme à Lille par exemple, ou les 108 000 tonnes de bio-déchets peuvent faire rouler une centaine de bus lesquels effectuent en moyenne 60 000 km/an. lien
Si l’on considère que les français ont produits 868 millions de tonnes de déchets en 2008, et que la part pouvant produire du méthane est de quasiment la moitié, si toutes les zones de stockages de déchets étaient équipées pour récupérer le méthane, on pourrait faire circuler 450 000 bus ou poids lourds (lien) ce qui correspond à 27 milliards de km parcourus par an, soit 20 mtep.
Cette production pourrait donc couvrir tous les besoins du pays, puisque le parc des poids lourds français est de 334 000 et celui des bus de 80 000. lien.
On peut aussi récupérer le méthane issu des stations d’épuration, celui issu des déchets verts (compostage), ou des étables, des lisiers de porcheries, des élevages de volailles.
Les STEP (stations d’épuration) ont un potentiel de 3,350 mtep. lien
Les déjections d’élevage représentaient 683 000 tonnes de méthane en 2007. lien
Les 500 000 chevaux qui galopent en France laissent dans leurs étables 4 millions de tonnes de fumier, ce qui représente 400 millions de m3 de biogaz. lien soit l’équivalent de 350 000 tep (tonne équivalent pétrole)
Pour 12m3 de lisiers introduits dans un digesteur, on produit 90m3 de méthane par jour. lien
Or chaque porc produit annuellement 1,2m3 de lisier et il y a en France 38 millions de porcs.
Ce sont donc 46 millions de m3 de lisier qui sont produits chaque année, avec les conséquences que l’on connait (algues vertes…) qui correspondent à plus de 400 millions de m3 de méthane, soit l’équivalent de 350 000 tep.
Il serait dommage de ne pas évoquer les solutions qui s’offrent aussi aux laiteries qui peuvent, comme en Bourgogne ou en Chartreuse, utiliser le petit lait pour fabriquer aussi du biogaz. lien
Cette dernière produit 160 m3 de biogaz par jour.
Si les 2143 laiteries de France se dotaient toute d’un tel système, la production de biogaz annuelle pourrait être de plus de 125 millions de m3 de biogaz, soit l’équivalent de plus de 100 000 tep.
Et ce n’est pas tout, il existe des solutions pour le moins originales, c’est le carburant produit à partir de la graisse animale.
Les norvégiens fabriquent déjà du biodiesel à partir des huiles de poisson, et des huiles de cuisson.
Lauri Venoy, un autre norvégien veut produire du carburant à partir de la liposuccion.
Il a déjà obtenu le droit de récupérer les 11 500 litre de graisse humaine produits par semaine par un hôpital de Miami, soit 550 000 litres de biodiesel pour un seul hôpital. lien
Lorsque l’on sait qu’il y a en France 4 millions d’obèses (et 16 millions d’adultes en surpoids), on imagine la quantité de biodiesel qui pourrait être produit. lien
En résumé, le potentiel biogaz est de 54 mtep/an
Autre avantage considérable du développement du biogaz : il y a non seulement production d’électricité, mais aussi de chaleur.
De plus, en brulant le méthane, on freine le réchauffement planétaire, puisque ce méthane est 23 fois plus impliqué que le CO2 dans ce réchauffement.
La biomasse, ce n’est pas que la récupération du méthane des produits en fermentation, 
L’utilisation du bois pour le chauffage pourrait représenter 20 mtep. lien et pourrait même atteindre 45 mtep.
Faisons maintenant un rapide tour d’horizon des autres énergies renouvelables :
Hydraulique, Solaire, Eolien, Géothermie sont les énergies renouvelables les plus classiques.
Le parc hydraulique français est négligé, et en 2008, jean louis Borloo avait présenté le grand plan de relance de la production énergétique française. lien . Il semble être retourné dans un tiroir.
Cela représente aujourd’hui un peu moins de 6 mtep, (65 TWh) mais un développement harmonieux, privilégiant les solutions qui respectent l’environnement, micro centrales, les centrales de haute chute, marémotrice, hydrolienne permettrait d’envisager un potentiel de 16 mtep. lien
Le potentiel éolien français est de 14 mtep. lien
L’énergie solaire photovoltaïque connait une nouvelle révolution.
Un chercheur méconnu pendant 20 ans, Michael Graetzel à mis au point une nouvelle technologie (oxyde de titane avec colorant) qui s’inspire de la photosynthèse des plantes pour produire de l’électricité. lien
Cette nouvelle technologie diminue par 10 les couts de fabrication pour un rendement de 11%. lien
Autre avantage de cette invention, les panneaux peuvent être souples et transparents et sont imprimés comme on fabrique des films photo.
Le photovoltaïque connait un nouveau développement, puisqu’on a commencé d’installer des panneaux photovoltaïques sur les murs anti-bruits des lignes TGV, et des autoroutes.
Le potentiel à installer est de 500 km de longueur, pour une production de 86500 Mwh/an, soit 20 000 tep lien
Qu’il soit thermique ou photovoltaïque l’énergie solaire est en retard en France : en 2005, les allemands avaient déjà installé 980 000 m2 de capteur thermiques contre à peine 165 000 m2 chez nous.
L’Allemagne économise chaque année 270 millions de litre de fioul grâce à ses choix énergétiques solaires. lien
Quand l’on songe que 91% des français plébiscitent le photovoltaïque contre seulement 17% pour le nucléaire, on peut s’étonner du considérable retard français. lien
Si on évoque la géothermie profonde, d’après le sénateur René Tregouet, « le potentiel offert par les sites favorables à la production d’énergie par géothermie profonde est de l’ordre de 110 000 mégawatts, soit la puissance actuelle du parc français de production d’électricité ». (121 mtep). lien
La démonstration est faite que les 251 mtep que nous consommons chaque année peuvent être produits dès demain sans utiliser ni nucléaire, ni pétrole, ni charbon.
Il est clair aujourd’hui qu’une politique volontaire et énergique tournée vers les énergies renouvelables et non polluantes permettrait très vite de tourner la page des énergies sales et dangereuses, et nous donnerait enfin l’indépendance énergétique.
Il faudrait pour cela un gouvernement qui le veuille, et force est de reconnaitre que ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Car comme disait mon vieil ami africain :
« Tant qu’on n’est pas sauvé, il ne faut pas se demander pourquoi on est tombé dans le puits ».
 

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