Chèque-transport : démagogie pré-électorale ?

par Natacha
jeudi 21 septembre 2006

 

Comment cette proposition s’intègre-t-elle dans une stratégie réfléchie et cohérente du gouvernement ?

C’est la question que je me suis posée quand j’ai appris la mesure réclamée par les syndicats en 2005, promise par Dominique de Villepin et annoncée en cette fin de mois d’août comme moyen d’atténuer l’effet de la hausse du prix du carburant sur le pouvoir d’achat des Français.

Alors j’ai relu la loi d’orientation de la politique énergétique, encore toute chaude de bonnes intentions puisque sortie en 2005. Ce texte annonce entre autres qu’il faudra désormais favoriser la recherche pour le développement de nouvelles énergies, démarche scientifique qu’il faudra coupler à des modifications de comportement pour insuffler chez les Français un transfert modal du « tout automobile » vers les modes de déplacements durables.

Et puis, j’ai relu la loi relative à la solidarité et renouvellement urbains (la fameuse SRU) qui date de 2000. Elle dit que les politiques de déplacements devront favoriser les modes de transport durables au détriment, s’il le faut, du trafic routier, au détriment de la souveraine voiture. Cette loi nous parle aussi de plan de mobilité, concept dont aucune presse ni aucun acteur de la scène politique publique ne s’est fait l’écho, en réponse à ce chèque-transport, et qui pourtant est plus que pertinente.

Vous dites ? Plan de mobilité ?

Le plan de mobilité est une démarche englobant la problématique des déplacements dans son ensemble. Pour commencer, tous les modes de transport sont valorisés, excepté bien sûr... la voiture individuelle. Le premier outil d’un tel plan est la sensibilisation des salariés aux enjeux économiques, certes, mais aussi et surtout sociaux et environnementaux ! Le changement de comportement est provoqué en considérant que les salariés ont une capacité de réflexion et qu’ils n’ont pas que des préoccupations mercantiles (bien que le discours des syndicats nous le fasse croire). Enfin, que découvre-t-on : l’exonération des charges patronales sur la participation aux frais d’abonnement aux transports en commun existe depuis 2000... Grâce à la SRU (voir plus haut !). Les plans de mobilité se font plus fréquemment appeler les PDE pour plan de déplacements entreprise.

L’objectif de la mesure était... ?

Avec tous ces éléments (et vous pourrez excuser ma réponse légèrement tardive par rapport aux évènements, la lecture en a été fastidieuse), je me permets de conclure que le gouvernement, avec cette mesure digne de faire la une des journaux, avait atteint son but : monopoliser l’attention des râleurs. Par la même occasion, il donne l’illusion aux Français que le point de vue prioritaire est celui de l’état de leur porte-monnaie, et ceci à court terme.

Un proche du dossier annonce que l’objectif du chèque-transport est de rendre « plus visible » la possibilité pour l’entreprise de subventionner l’abonnement aux transports en commun de ses salariés en bénéficiant d’exonération de charges. Pourtant, ce qui est mis devant les yeux des employeurs est une démarche obtuse, qui se cantonne à ne prendre en compte que l’aspect financier des problèmes de transport.

Que de réussites !

Le gouvernement réussit au moins deux autres challenges (dont il est coutumier, faut-il croire, pour exceller ainsi).

Il agit en contradiction avec la loi instituée par lui-même en incitant les Français à utiliser la voiture individuelle, tandis que les transports en commun ont besoin de fonds pour être optimisés et que le covoiturage et autres démarches nouvelles pourraient être appuyés.

Il dévalorise tous les plans de mobilité déjà mis en œuvre en France. Ils sont nombreux et pour la plupart efficaces, ce sont eux qui permettront un changement des mentalités ! Une majorité des administrations, au minimum dans les villes de plus de 100 000 habitants, déploient déjà leurs plans de mobilité et subventionnent l’abonnement aux transports collectifs de leurs agents, depuis plusieurs années déjà.

Comment une entreprise peut-elle se sentir confiante dans la mise en œuvre d’un plan de mobilité, y compris celle qui est déjà engagée sur la bonne voie, face à l’attitude du gouvernement ? Il ne manquerait pourtant qu’un coup de pouce pour inciter à cela ; les grands groupes, en tout cas, sont prêts à s’engager.

Plutôt que de déguiser une fausse mesure en "pas de géant", pourquoi ne pas valoriser les bonnes démarches déjà existantes ? Pourquoi ne pas s’appuyer sur les expériences concluantes observées en France et dans toute l’Europe et favoriser leur extension sur tout le territoire ? Ce serait typiquement français, me souffle-t-on...


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