Et revoilą Tchernobyl !
par olivier cabanel
lundi 5 mai 2025
Les médias sont particulièrement silencieux sur la question, mais depuis le 14 février, la radioactivité s’échappe de nouveau du site dévasté…
En effet, le 14 février, vers 1h50 du matin, un drone de marque russe, transportant une bombe manifestement incendiaire, a percé, et le sarcophage, et la membrane protectrice, faisant un trou de 15 m², et laissant s’échapper la radioactivité, déjà difficilement contenue sur site, site qui était déjà relativement dégradé, et pour lequel, on ne trouve évidemment pas de candidats pour aller tenter de réparer les dégâts. Lien
S’il faut en croire Rouslang Hinochouk, l’adjoint chef de l’exploitation du nouveau confinement, « des éléments pourraient générer de nouvelles fuites de substance radioactives », ajoutant que : « la fonction de protection » du revêtement hermétique de l’arche était « compromise ». « la maîtrise de l’incendie a été extrêmement complexe, car nous ne savions pas où concentrer nos efforts, le feu s’est lentement propagé à travers la membrane » (70 % de celle-ci a été détruite).
D’après France Info : « à 2 mois de l’attaque, les dégâts apparaissent bien plus graves qu’annoncé et l’inquiétude grandit face à cette nouvelle vulnérabilité ». lien
Selon l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire), ce sarcophage, construit à la hâte, présentait déjà des risques d’effondrement, pouvant provoquer le redémarrage d’une réaction en chaîne du combustible fondu à cause de la présence éventuelle d’eau (d’autant que le cœur fondu restera radioactif pour des milliers d’années. (Lien), et déclenchant à nouveau une contamination dans l’environnement, qui, on le sait, n’a que faire des frontières… lien
Sous cette arche d’acier, achevée en 2019, reposent 200 tonnes de combustible nucléaire et des milliers de mètres cubes de déchets hautement radioactifs.
Greenpeace est allé enquêter, et a publié un rapport le 20 mars, révélant l’ampleur des dégâts, constatant que 50 % de la partie nord du toit était endommagée, ainsi qu’une partie du toit sud, perdant ainsi son rôle protecteur des équipements qu’elle abrite.
Cette vidéo montre l’agression.
Sans démentir formellement cette attaque, Dmitri Peskov, porte parole du Kremlin, assure : « l’armée russe ne visait pas les installations nucléaires », ajoutant : « je ne dispose pas d’informations précises, ce que je sais, c’est qu’il ne peut pas être question de frappe contre telle ou telle infrastructure nucléaire... ». lien
D’ailleurs quels seraient les intérêts des Ukrainiens à attaquer leur propre installation nucléaire ?…
En effet, on se souvient qu’au matin du 24 février 2022, les chars russes avaient traversé la frontière, pénétrant dans la zone d’exclusion de Tchernobyl, s’emparant de la centrale,(lien) et qu’à ce moment les autorités ukrainiennes avaient relevé un très forte augmentation de la radioactivité autour de la centrale, celle ci ayant été multipliée par 20, par rapport aux niveaux habituels. lien
Que s’était-il passé ?
On se souvient aussi qu’une arche de confinement avait été installée en 2016, soit 30 ans après la catastrophe, afin d’éviter que la dispersion des particules radioactives (césium 134 et 137 entre autres), et si le réseau de capteur n’a pas détecté encore d’augmentation de radioactivité dans l’environnement, il semble peu raisonnable d’être rassuré sur ce point. Lien
Cette nouvelle attaque, contestée par l’autocrate russe, oblige l’Ukraine à reporter le démantèlement du sarcophage, puisque l’arche est abîmée. Lien
Rappelons à toutes fins utiles que le réacteur dévasté contient encore la majeure partie des 190 tonnes de combustible resté dans le cœur du réacteur fondu...le césium 137 ayant une demi-vie d’un peu plus de 30 ans, dans un siècle il restera encore de la radioactivité…lien
On estime aujourd’hui que plus d’1,7 million de personnes ont été irradiées à des taux supérieurs à la norme admise. Lien
On pourrait penser que cette situation préoccupante calme les ardeurs des acharnés promoteurs du nucléaire mais il n’est apparemment rien, puisqu’en France le gouvernement entend implanter une demi-douzaine d’EPR, alors que celui de Flamanville connaît déjà des défaillances techniques importantes : la cuve, élément essentiel de la centrale, comporte, selon l’ASN (Autorité de Sureté Nucléaire), des anomalies (concentration excessive en carbone), laquelle a demandé que le couvercle de la cuve soit remplacé avant la fin 2024, car cette concentration affaiblit potentiellement sa résistance, et si le couvercle de la cuve est interchangeable, il est beaucoup plus compliqué de changer le fond de la cuve, car il est soudé. lien
De plus, des défauts de soudure sur les circuits secondaires principaux du réacteur ont été détectés. lien
Il faut savoir que cet EPR a coûté une petite fortune, plus de 30 milliards d’euros, et qu’à l’occasion de la « farce du débat public », mené actuellement, les responsables du débat n’ont pas réussi à annoncer un chiffre pour le coût des 2 EPR de Bugey, renonçant à reporter ce débat, malgré la demande des associations, en attendant que le chantier puisse être chiffré.
Si l’EPR de Flamanville n’est pas couronné de succès, enchaînant les retards, et les augmentations de coût, celui d’Hinkley Point connaît un véritable naufrage. lien
Alors que son prix à dépassé les 50 milliards, (il était estimé au départ 31 milliards) s’il faut en croire Charles de Courson, rapporteur général du budget, et Aurélie Trouvé, présidente des affaires économiques, qui ont tiré, en vain, le signal d’alarme, en déclarant le 28 avril dernier : « c’est un véritable gouffre financier », alors qu’EDF est désormais détenu à 100 % par l’État, lequel se trouve, on le sait, avec plus de 3000 milliards de dettes.
Car comme dit mon vieil ami africain : « quand le malheur doit t’arriver, même le coton peut te blesser ».
Le dessin illustrant l’article est de Kroll
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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