Home : La polémique

par Alexandre Genko-Starosselsky
mercredi 10 juin 2009

 Home : un nouveau film écologique sans intérêt ? Certainement, pas. La beauté des images aériennes nous coupe le souffle et permet d’oublier le creux des commentaires. Car si le constat de la catastrophe est bien posé, on reste perplexe devant les solutions proposées - à savoir : des panneaux solaires, du commerce équitable, des parcs naturels… rien de bien sérieux et sans commune mesure avec l’ampleur des dégâts présents et à venir. Les images du film nous le rappellent : aujourd’hui, des dizaines d’urbanisations géantes engloutissent les ressources drainées de tous les confins de la planète ; des urbanisations où le pétrole et la nature se transforment en gratte-ciels, en confort et en sociétés sans agriculteurs. Le problème est sous nos yeux : la consommation des ressources et le bien-être matériel - l’un ne va pas sans l’autre. D’où mon interrogation : un tel modèle de développement peut-il trouver en s’adaptant un point d’équilibre avec la nature ?

 
On nous dit que certaines sociétés agricoles qui ne connaissaient pas le pétrole ont mal terminé faute de modération, comme dans l’île de Pâques. Quel est le sort qui attend nos enfants ? Le plus funeste sans doute, faute de nous engager dans une nouvelle voie. Car force est de constater que le développement durable est cet apanage de bonne conscience des principaux pays pollueurs au monde. Ce n’est pas la sortie, c’est au contraire l’illusion de la sortie qui permet aux pollueurs de se présenter comme d’indispensables complices pour régler les problèmes qu’ils causent.

 
En définitive, si la question d’une adaptation de notre mode de vie aux équilibres de la terre n’est pas posée, c’est que la réponse est trop évidente : une telle adaptation est totalement impossible. Même en renforçant au possible les mesures écologiques, notre mode de vie provoquera nécessairement les grandes catastrophes climatiques qui nous sont prophétisées.

 
Pourquoi ? Tout simplement parce que notre gourmandise en énergie et en ressources est intarissable. Le développement est une boucle, un circuit, qui s’autoalimente et que les crises ou les mesures vertes ne peuvent que ralentir. En voici quelques exemples : le progrès technologique entraîne le boom démographique qui entraîne à son tour l’explosion de la demande, qui permet à son tour de financer le progrès. Et encore : avant que les milliards d’humains habitants les pays émergeants ne s’équipent en éoliennes, ils feront appel à des énergies moins onéreuses et plus polluantes. Alors que certains peinent à sortir du développement pollué, d’autres bien plus nombreux y entrent de plain-pied. Quant à l’organisation urbaine, elle ne peut être maintenue qu’à l’aide d’un puissant marché et d’un niveau élevé de marchandisation polluante, sauf à provoquer le chômage et la misère pour une partie importante de la population. Le seul espoir pour maintenir ce développement sans catastrophe écologique majeure réside dans une solution technologique miraculeuse : la découverte d’une nouvelle énergie quasi illimitée et non polluante. Cette énergie permettrait le recyclage généralisé et la relocalisation des productions qui sont en fait les seules issues possibles et durables pour n’importe quel système socioéconomique en équilibre avec la nature.

 
L’autre développement consiste à adopter dès à présent et avec la technologie existante, une économie intégralement recyclée et relocalisée. Une telle option est-elle possible ? Certainement, mais au prix d’un recul important de confort et au risque d’être incompris par le public. Qui prendra ce risque ? A notre époque où l’on continue de croire fermement dans le miracle technologique, il ne se trouvera pas grand monde pour quitter les cités et se résoudre à vivre en auto-subistance. Mais demain, lorsque la faillite du modèle développé et de ses remèdes écologiques paraîtra plus évidente, il faudra parier sur d’importantes mobilisations en direction des campagnes. Gageons également que ce nouvel exode urbain provoquera des conflits d’une importance inimaginable aujourd’hui et un bouleversement des références sociales. Après le communisme, tel est à mon sens la nouvelle vague de troubles internes qui commence seulement à se lever en Occident.


Lire l'article complet, et les commentaires