L’éolien en question

par Dr No
mercredi 21 février 2007

La mise en avant des bienfaits écologiques à toutes les sauces est devenu une mode tellement simpliste et stupide qu’il faut s’interroger à chaque fois que cet argument est avancé, comme en ce moment pour le cas de l’énergie éolienne.

Ainsi si nos politiques en abusent pour flatter l’électorat ou s’acheter une bonne conscience, ce n’est pas une raison suffisante pour céder à la facilité et oublier d’analyser avec rigueur les choix énergétiques loin de la démagogie ambiante.

L’inconvénient, c’est qu’il faut en permanence lutter contre des idées reçues quand ce n’est pas contre des lobbies bien structurés. D’autant que leurs intentions ne sont pas aussi louables que celles des écologistes de premier plan dont ils s’attirent la sympathie pour défendre leurs intérêts.

C’est le cas aujourd’hui des éoliennes dont les promoteurs mettent en avant des "bienfaits écologiques" plus que discutables alors que les arguments économiques et écologiques sont en leur défaveur. Cela n’apparaît pas à première vue, en raison d’un habile jeu de subventions.

Néanmoins en cherchant un peu on arrive à entrevoir la supercherie ou ce vent mauvais qui souffle sur cette technologie qui surfe sur la vague écologique de réduction des gaz à effet de serre comme hier les antinucléaires avec la peur.

Dans l’Oise un projet d’implantation d’un parc d’éoliennes industrielles a donné l’occasion à des citoyens de se pencher sur ce moyen de production d’énergie dit « écologique » et de vérifier leurs supposés bienfaits. Leur constat corroboré par les conclusions des multiples rapports d’experts indépendants ou des diverses commissions nationales remet sérieusement en cause ce moyen de production d’énergie pas si écologique que ça.

Marc Lefranc qui travaille dans le secteur du développement durable s’est intéressé non pas aux "nuisances" générées par les éoliennes comme tout riverain qui s’opposerait bêtement à cette technologie sans se poser de questions mais plutôt aux aspects économiques et écologiques pour finalement découvrir que derrière ce qui est présenté comme un moyen propre de production d’énergie se cache un « vrai scandale financier et une imposture écologique ».

L’argument de réduction des gaz à effet de serre ne tient pas cinq minutes à un examen attentif. L’Allemagne qui, pour s’affranchir du nucléaire, est devenue le plus grand parc éolien mondial fait comme le Danemark partie des pays dont la production électrique rapportée à l’habitant génère le plus de CO2 dans le monde. Cela paraît paradoxal, car si l’on tient compte uniquement du vent pour produire l’électricité, cette énergie apparaît comme la plus propre et la plus saine. Le "combustible" est gratuit, non "polluant" et disponible à profusion de manière quasi providentielle .

En fait, la réalité est tout autre ! Une éolienne de 2,5 MW coûte 3 millions d’euros et ne produit en puissance moyenne réelle que tout juste 0,6 MW. Par ailleurs le vent et par conséquent la production électrique est infiniment plus aléatoire que dans le cas d’une centrale nucléaire ou hydraulique dépendant de surcroît du lieu d’implantation.

La rentabilité qui est liée au facteur de charge (rapport entre charge moyenne annuelle réelle et charge théorique de l’installation) est donc clairement en défaveur des éoliennes. C’est en langage plus clair la durée de fonctionnement et de production réelle de l’équipement dans une année. Pour le nucléaire : le facteur de charge est situé entre 78 et 80%, alors que dans le cas des éoliennes ce facteur chute à 20%.

C’est cette valeur qui permet d’évaluer le rendement d’une installation énergétique, qu’elle soit renouvelable ou pas, nucléaire ou fossile. Compte tenu des périodes creuses, la compensation des pertes de charge dans le cas des l’éoliennes nécessite un appoint permanent généralement fourni par des centrales alimentées par une énergie fossile (pétrole ou charbon). Les à-coups de mise en route de ces centrales thermique d’appoint sont à l’origine d’une surproduction de gaz à effet de serre dans une bien plus grande proportion qu’en cas d’une utilisation continue de ces centrales classiques. Le phénomène est bien connu.

Le rapport d’un comité de sages publié à l’issue du débat national sur les énergies en 2003 ne laisse planer aucun doute. MM. Castillon et Lesggy affirment que le complément d’énergie nécessaire pour compenser l’instabilité de la production éolienne fait perdre à l’éolien « sa double étiquette d’énergie "propre" et "renouvelable". Cette énergie n’est plus vraiment propre puisque co-émettrice de gaz à effet de serre ; elle n’est pas non plus renouvelable puisque co-consommatrice de combustibles fossiles, en l’occurrence de gaz. Mais c’est sans aucun doute le volet économique qui est le plus scandaleux.

Un travail aussi bien documenté que remarquablement argumenté de la CRE (Commission de régulation de l’énergie) sous la présidence de Philippe de Ladoucette, avait émis le 29 juin 2006 un avis très critique à l’égard de l’énergie éolienne considérant que « le tarif proposé qui s’ajoute à l’ensemble des dispositifs fiscaux en vigueur, représente un soutien disproportionné à la filière éolienne au regard du bénéfice attendu ».

Mais le gouvernement, pourtant commanditaire de l’étude, s’est royalement moqué de cet avis défavorable prenant le 10 juillet 2006, un arrêté qui n’en tient pas compte. Et comble du cynisme son arrêté a été publié au Journal officiel le 26 juillet 2006, alors que les recommandations de la CRE ne l’ont été que le 27 juillet 2006 et que ses conclusions étaient connues depuis le 29 juin !

Je ne pense pas qu’il faille systématiquement incriminer la mauvaise foi du gouvernement actuel pour tous les maux qui nous rongent. Dans le même registre et sous une autre couleur en 2001, le gouvernement Jospin n’avait pas fait mieux !

Le gouvernement de Lionel Jospin avait en mai 2001 aussi saisi la CRE pour un projet d’arrêté fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les centrales éoliennes. La CRE avait émis le 5 juin 2001 un avis défavorable en affirmant que « le tarif proposé entraîne des rentes indues aux promoteurs éoliens... et représente un moyen exagérément coûteux pour la collectivité ».

Mais le gouvernement Jospin avait lui aussi superbement ignoré cet avis et publié son arrêté le 22 juin 2001 avec le même cynisme qu’aujourd’hui. Faut-il croire que les lobbies de l’éolien se moquent de l’alternance ?

Par ailleurs, les mesures fiscales d’accompagnement sous diverses formes (subventions, prêts bonifiés, etc.) consenties par l’Ademe, les conseils généraux ou régionaux sont indirectement à la charge du contribuable. En effet, cet argent est généreusement distribué aux différents acteurs locaux (exploitants ou propriétaires terriens, municipalités, etc.) pour rendre attractive une technologie qui ne l’est pas. A titre d’exemple, la taxe professionnelle qui est normalement à la charge de l’exploitant de l’éolienne est plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée. Il en découle que l’exploitant ne paye réellement qu’un tiers de cette taxe alors que les deux tiers restants sont pris en charge par l’Etat (donc nous !). Arnaque !

Des membres de la Fondation Nicolas Hulot s’inquiètent aussi de ce que l’on dépense autant d’argent dans l’éolien en subventions alors que des économies d’énergie dans les secteurs qui génèrent le plus de gaz à effet de serre (transport et chauffage individuel) seraient infiniment plus rentables. La marge est énorme et le bénéfice, réel.

Pour de nombreuses associations de riverains qui s’opposent à l’éolien, le retentissement sur la santé est souvent mis en avant, ce qui les fait parfois classer de simples "not in my back yard" qu’on traduirait par "pas dans mon jardin". Mais si les résultats de l’étude menée par l’Académie nationale de médecine écartent les méfaits des infrasons colportés sur Internet, ils mettent néanmoins l’accent sur les effets néfastes et connus du bruit générés par des installations industrielles d’éoliennes. Ce rapport avait donné lieu à une réaction assez vive du lobby éolien.

Les recommandations pleines de bon sens de l’Académie de médecine en matière d’énergie à la suite des études d’impact des choix énergétiques sur la santé devraient faire réfléchir plus d’un.

A ne pas se poser les bonnes questions, on arrive à des aberrations comme pour le nucléaire où la peur avait jadis servi d’argument pour biaiser le débat et aboutir à coups de révélations chocs de dernière minute (véritable détonateur !) au démantèlement de Superphénix sans véritable débat ni discussion sur le fond sur les choix énergétiques prenant compte de toutes les données.


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