La vie, cette vieille, très vieille amie...
par Vincent Verschoore
jeudi 19 novembre 2015
En ces temps mortifères où des abrutis sèment la mort au nom d’une prophétie nihiliste, un regard posé sur l’immensité du temps de la vie met en relief la microscopique inconséquence des adorateurs de la branlette à balles réelles. Encore que.
La question du commencement de la vie sur Terre semble avoir pour réponse une constante marche arrière, avec un point de départ longtemps imposé par la religion situé à quelques milliers d’années de nous, et un point d’arrivée qui ne pourra jamais dépasser l’age de la Terre elle-même.
La science moderne a, depuis quelques temps, fixé l’apparition de la vie sur Terre à 3,8 milliards d’années, sur base de la découverte de graphite biogénique – du carbone issu d’un processus biologique – dans des sédiments de l’Ouest du Groenland. Soit 740 millions d’années après la naissance de la Terre, voici 4,54 milliards d’années.
Cette date déjà lointaine vient pourtant de reculer d’encore 300 millions d’années, plaçant l’origine de la vie terrestre à 4,1 milliards d’années, ou « seulement » 440 millions d’années après la formation de notre planète. Ce du moins selon une étude récemment publiée par une équipe de l’Université de Californie à Los Angeles, dans le journal des Proceedings of the National Academy of Sciences.
L’hypothèse biologique est favorisée du fait que la concentration de C12 est trop élevée par rapport à ce que nous pensons savoir des impacts de météorites de l’époque. En effet, l’époque du Grand Bombardement Tardif aurait débuté voici 4 milliards d’années, à l’origine de nombreux cratères de la Lune. Les cristaux en question sont encore plus anciens, ce qui implique que cette vie naissante aurait, de plus, survécu à ce fameux bombardement. Bombardement dont la réalité est elle-même remise en question, les seules preuves venant de l’interprétation des échantillons de sol lunaire rapportés par les missions Apollo, interprétation remise en cause par les images de la sonde LRO (1).
Toujours est-il que si la Terre de l’époque supportait une forme de vie, cela indiquerait que la vie se crée très rapidement – à l’échelle géologique – dans des conditions plutôt extrêmes. Et que si ce fut le cas ici, ce fut sans doute le cas un peu partout où existaient les conditions minimales requises. Ce qui ne dit rien sur le processus de création de la vie elle-même, vieux débat entre la création in-situ et la panspermie, déjà commenté sur ce blog (2).
Faisons un bond en avant pour arriver à 500 millions d’années avant notre ère. Dans cet intervalle apparaissent les cellules vivantes dotées d’un noyau (eucaryotes, voici 2,1 milliard d’années) et les premiers organismes de grande taille (autour du mètre) voici 550 millions d’années, juste avant l’explosion cambrienne qui explora un grand nombre de formes vivantes pour n’en retenir finalement que quelques unes (3).
Il y a donc un double questionnement, d’une part l’origine de la vie elle-même, création locale ou importée – ce qui ne fait que reporter le problème ailleurs ; d’autre part l’origine du principe de système nerveux et de cerveau, qui est la solution récurrente fournie par l’évolution au cours des ages. Question qui rejoint directement le débat sur la nature inhérente du progrès que j’ai précédemment présenté dans l’article « Faut-il réintégrer la notion de progrès dans l’évolution ? » (5).
Dans ce modèle de progrès intrinsèque, les contingences (grands changements imprévisibles) ne sont plus vues comme des remises à zéro d’où démarre un nouveau chapitre de l’évolution, mais au contraire comme des accélérateurs évolutifs : ce qui se passe alors se serait passé de toute manière, mais bien plus tard. Peut-être faut-il voir le djihadisme actuel, dans sa dimension nihiliste, comme une contingence civilisationnelle permettant in fine de donner un coup d’accélérateur à une conscience mondiale intrinsèquement progressiste, mais aujourd’hui prise au piège du matérialisme et de la corruption de ses structures politiques.
Notes :
(2) Le chiffre de la vie serait… ou encore 100 milliards de planètes, et nous et nous et nous ?
(3) De la contingence et de l’évolution
(5) http://rhubarbe.net/2012/04/15/faut-il-reintegrer-la-notion-de-progres-dans-levolution/