Le bouclier défensif des climatosceptiques...
par monnier
mardi 9 mars 2010
Les médias relaient depuis Copenhague et le "climatgate", le discours des « climatosceptiques ». Quel est l’essentiel de ce discours ? Il défend avec force l’idée selon laquelle les activités humaines ne seraient pas responsable du réchauffement climatique . C’est me semble-t-il, l’essentiel de leur message. Or, cette réaction virulente des climatosceptiques vient précisément illustrer la thèse que j’ai pu développer dans le cadre d’un Doctorat en Sciences de l’éducation. En effet, mon travail a voulu montrer que la crise environnementale (et volontairement, je ne réduis pas cette crise au seul versant climatique) est d’abord une crise humaine, et plus précisément, une crise de l’identité humaine dans le vis-à-vis avec la nature. Autrement dit, les rapports de l’homme avec son environnement seraient au coeur de la crise écologique, ouvrant la nécessité pour les humains de re-questionner leur place dans le monde, et par voie de conséquence, leur « identité humaine ». Or, il n’est jamais facile d’approcher la question du « qui suis-je ? », que ce soit sur un plan individuel ou collectif. La psychanalyse a montré combien la construction du moi est précaire, et comment, lorsque le moi est « ébranlé », se lèvent des « boucliers défensifs », visant à le renforcer. J’ai voulu montrer dans ma thèse, qu’on peut regarder les représentations collectives de la nature et de l’homme, comme pouvant dépendre de mécanismes défensifs similaires aux mécanismes défensifs du moi individuel. Ceci au sens où ces représentations donnent une définition de l’homme et de la nature à laquelle une culture s’identifie.
De ce point de vue, la crise écologique est un véritable défi pour l’humanité de l’homme. Un défi qui dépasse les discours sur la « gestion des ressources naturelles », ou sur le « changement climatique ». Se pose donc une première série de questions : à quoi sert la réduction de la crise écologique, au seul problème du « réchauffement climatique » ? Et, lorsqu’on reste sur le réchauffement climatique, à quoi sert le discours de « non responsabilité humaine » ?
Dans la perspective énoncée plus haut, nous serions tenter de parler « d’évitement » voire même de « déni ». Il s’agirait avant toute chose, de ne pas « ébranler » les représentations que l’on tient pour définitives de ce que sont l’homme, la nature et leur relation. En réduisant la crise écologique au réchauffement climatique, et en développant l’idée que l’homme n’y est pour rien dans ce réchauffement, (ce qui est peut-être vrai d’ailleurs, mais on s’en fiche car le problème n’est pas là !) on évite la vraie confrontation qui consiste à accepter d’être les auteurs et les acteurs d’une transformation des images de soi et du monde.
D’où une nouvelle série de questions : Quelles ouvertures sont rendues possibles par le fait que l’homme, pour la première fois de son histoire se perçoive « responsable » des effets de son activité sur l’environnement ?1 Cette perception nouvelle d’une responsabilité élargie à tout ce qui vit sur cette petite planète n’est-elle pas la possibilité d’une éthique nouvelle (H. Jonas) ? La véritable nouveauté ne tient-elle pas précisément dans ce sentiment de responsabilité qui serait une chance pour l’humanité ? Mais bien sûr pour cela, il ne faut pas que ce sentiment de responsabilité se confonde avec une culpabilité mortifère. Car c’est elle, la culpabilité mortifère, qui brandit les boucliers défensifs que sont l’évitement et le déni.
Donc, la crise écologique pourrait être une chance à saisir dès lors qu’on accueille le sentiment d’une responsabilité nouvelle, élargie à tous les êtres vivants avec nous sur Terre.
1lC’est le fait de se percevoir responsable qui nous semble essentiel ici, et non pas de savoir si c’est une "réalité" ou non. Ceci étant dit, on peut difficilement nier l’impact humain dans la destruction de la bio diversité. Et même si dans un temps avant l’homme, il y a eu de gigantesques destructions d’espèces vivantes, cela ne permet pas de justifier l’agir humain qui détruit sans limites les autres espèces vivantes.