Le commerce : l’angle mort des gaz à effet de serre

par Laurent Herblay
samedi 27 janvier 2018

Bien, ce n’est pas le seul, mais des papiers récents de Nicolas Meilhan, des éconoclastes, ont eu le grand mérite de pointer un des angles morts majeurs de la question des émissions des gaz à effet de serre. Les bonnes statistiques de la France ne sont qu’une vision parcellaire et superficielle de ce qui se passe car cela exclut les effets exportés par nos importations.

 

Exporter cette pollution que l’on ne veut pas voir
 
En fait, une partie des chiffres clés du climat publié par le ministère du développement durable il y a près de 2 ans sont passés un peu trop inaperçus, avant que Nicolas Meilhan les exhume sur son blog. Les chiffres sont assez stupéfiants. En effet, notre pays se présente souvent comme un modèle de vertu, avec une baisse de 20% des émissions de CO2 de 1995 à 2015. Mais cela est bien superficiel. D’abord, il faut la modérer par le fait que cette baisse ne repose que sur l’effondrement des émissions de CO2 par l’industrie manufacturière, en chute de 40% de 1990 à 2013. Et comme notre consommation n’a pas baissé, c’est parce que nous importons des produits que nous produisons avant.
 
 
 
En effet, une autre analyse, présente dans le rapport du ministère, affirme que notre consommation de CO2, en réalité, a progressé de 11% de 1995 à 2015, du fait de l’envolée des émissions associées aux importations, qui représentent aujourd’hui 55% de notre consommation, contre 33% en 1995  ! Bref, nous avons exporté une partie de nos émissions de CO2 en important une part grandissante des produits industriels que nous consommons. On note aussi que les chiffres des transports ne prennent pas en compte les transports internationaux, illusoirement, alors même que les émissions des poids lourds et véhicules utilitaires pèsent presque aussi lourd que le transport des particuliers.
 
 
Nicolas Meilhan pointe que la production électrique ne représente que 5% de notre bilan carbone, alors que tant d’initiatives se focalisent dessus. Que penser également de cette focalisation sur le transport routier particulier alors que le transport de marchandises représente probablement une part bien plus lourde de ce bilan, notamment avec l’explosion des chaines de production mondiales ? Le contraste entre le traitement fiscal du diesel pour les particuliers et le kérosène ou le fuel pour les transports de marchandises est aussi injuste qu’effarant. Bien sûr, il y a la course au moins-disant fiscal pour être « compétitif » mais cela revient aussi au moins-disant environnemental à l’échelle planétaire.
 
Dans la même veine, un essai de Guillaume Pitron, préfacé par Hubert Védrine, révèle « la face cachée de la transition énergétique et numérique », qui ne fait que « déplacer l’impact de l’activité humaine sur les écosystèmes ». En effet, cette transition repose sur l’extraction de métaux rares dont l’exploitation a « des impacts environnementaux plus importants que ceux de l’extraction pétrolière », avec des conséquences sanitaires parfois dramatiques, l’auteur évoquant des « villages du cancer  » en Chine… Autre arnaque dénoncée par Nicolas Meilhan, la présentation de la transition énergétique en Allemagne, qui se fait avec plus de ce charbon dont les fines particules ignorent les frontières.
 
 
Une plongée rapide dans ces chiffres montre malheureusement à quel point l’approche de nos dirigeants est superficielleIls se contentent d’imposer des changements majeurs aux acteurs captifs, les particuliers qui ont une voiture par exemple, sans agir sur le gros des émissions, qui vient de la globalisation. Une taxe carbone doit peser de la même manière sur toutes les activités.

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