Le retard à l’allumage du véhicule électrique
par Enjeux Electriques
mardi 5 août 2014
Véritable Arlésienne, la voiture électrique est annoncée depuis des années. Pourtant dans les faits, il est encore rare d’en croiser dans les rues, à l’exception des autolib’ et autres bluecars au centre des grandes villes françaises. Le projet de loi « relatif à la transition énergétique pour la croissance verte » présenté la semaine dernière par Ségolène Royal va-t-il enfin permettre son essor ?
Première chose qui frappe à la lecture du texte proposé en Conseil des ministres le 30 juillet, c’est que sur les huit chapitres du projet, l’un d’entre eux est entièrement consacré à « développer les transports propres ». Il s’agit même d’« une priorité au regard des exigences de la transition énergétique ». Pour y parvenir, le gouvernement compte s’appuyer sur deux axes.
Une politique keynésienne
Pour l’heure, la voiture électrique connaît un succès mitigé (pour le moins) auprès du grand public. Renault et Nissan, avec 10 000 Zoé pour l’un et 100 000 Leaf pour l’autre vendues dans le monde depuis leurs lancements, font grise mine. « On avait fixé 1,5 million d'unités vendues en cumulé pour Renault et Nissan d'ici à 2016. On a repoussé l'objectif à l'horizon 2020 » admet Carlos Ghosn, PDG des deux constructeurs.
Face à la demande inexistante des particuliers, le projet de Ségolène Royal prévoit que ce soit les pouvoirs publics qui soutiennent l’activité des fabricants de véhicules électriques. Il est ainsi prévu qu’à partir du 1er janvier 2016, l’Etat acquière « dans la proportion minimale de 50% » des véhicules propres (électriques ou hybrides), tandis que les collectivités locales et les entreprises publiques devront faire de même à hauteur de 20%. L’objectif est ambitieux, mais l’impact est à relativiser. Le parc automobile de l’Etat n’étant que de 150 000 véhicules, cela paraît peu pour « dynamiser l’activité et conforter les emplois ». De plus, le surcoût initial de ces voitures pourrait faire grincer des dents en période de disette budgétaire, surtout au niveau des collectivités locales.
L’œuf ou la poule ?
Le projet de loi a par contre le mérite de s’attaquer à un frein récurrent qui rebute plus d’un utilisateur potentiel : le faible nombre de bornes de recharge. D’autant qu’avec une autonomie de 200 km pour la plupart des modèles, un maillage dense du territoire national est nécessaire. Sans évoquer l’objectif déjà défini d’installer 4 millions de bornes de recharge d’ici 2020, le texte de Ségolène Royal vise, lui, 7 millions de bornes d’ici 2030.
Surtout, le texte s’accompagne de l’impératif de commencer à progressivement préparer le réseau électrique au développement des bornes de recharge. Ainsi, à partir de 2017, les nouveaux bâtiments (industriels, commerciaux, d’habitation, etc) devront prévoir les câblages pour l’installation des points de charge. De même pour les parkings qui seront rénovés. Manque cependant un dispositif clair pour encadrer cette multiplication des bornes, susceptible de déstabiliser tout le réseau électrique.
Avec ce projet de loi, le gouvernement espère, sans le dire explicitement, un effet d’entraînement : la demande privée prenant graduellement le relais de la commande publique. Demeure qu’à l’instar des autres chapitres de la loi, le principal point d’interrogation pour le véhicule électrique est celui du financement. Les investissements s’annoncent lourds et rien n’est dit sur l’origine des fonds nécessaires, hormis une révision de la CSPE, taxe destinée aux énergies renouvelables et déjà fort impopulaire.