Mais qui sont les vrais barbares ?
par olivier cabanel
samedi 8 septembre 2018
Est-ce des « hordes de migrants » qui viennent prendre notre travail, voire nos femmes... ou des attardés extrémistes qui, avec une mauvaise foi patente, sèment la désinformation et la haine ?
Gabriel Bouchaud, dans une tribune pertinente parue dans « Le Point » à la mi-août, a proposé sa réflexion, et elle mérite le détour.
Il cite l’un des plus vitupérant extrémiste nationaliste, Philippe de Villiers, en l’occurrence, lequel prend, comme Le Pen, mais aussi comme Laurent Wauquiez, et bien d’autres, un malin plaisir à jeter de l’huile sur le feu.
En effet, le patron des LR quand il remet en cause « le droit du sol », souhaite clairement réduire drastiquement le nombre d’immigrés sur le sol français. lien
De Villiers, dans la foulée, déclarait dans les colonnes du Figaro : « ce que vit l’Occident aujourd’hui, c’est pire qu’une décadence. C’est à la fois une implosion et une invasion, avec le double remplacement progressif et indolore d’une population et d’une civilisation ». lien
Mais de quoi parle-t-il ?
De quelle invasion ?
On sait que des millions de syriens menacés par un dictateur fou, tentent de trouver un refuge ailleurs...que des millions d’africains, poussés à la misère par une colonisation qui ne dit pas son nom, tentent de trouver une solution de l’autre côté de la Méditerranée, au péril de leur vie...c’est entendu.
Mais quelle est l’importance de cette « invasion » dans notre pays de plus de 60 millions d’habitants ?
Les chiffres sont ce qu’ils sont, bien loin de justifier les chiffons rouges agités par une poignée d’extrémistes, car pour 100 000 demandes en 2017, la France n’en a validé que 40 000... soit 0,15% de la population française. lien
Bien sûr, certains n’hésiterons pas à affirmer que nous sommes « menacés » depuis plus longtemps, se référant par exemple aux autres migrations, celles dues aux guerres du 20ème siècle, avec son cortège de 50 millions de morts : Il fallait à l’époque reconstruire la France, et trouver de la main d’œuvre, ce qui a provoqué l’arrivée des Italiens, Espagnols, et bien d’autres, populations qui ont subi pourtant une ostracisation...(ils étaient alors appelés « espingos », « ritals ») ostracisation bien mal venue ...puis il y eu la guerre d’Algérie...son indépendance chèrement gagnée a provoqué l’arrivée des « pieds noirs », et aussi des « harkis », ceux-là qui s’étaient rangés dans le camp de l’occupant ont dû finalement trouver refuge dans leur pays de choix... la France. Et ils ont été remerciés, souvent enfermés, et traités de « bougnoules »...
Triste époque, donc...
Mais revenons à la réflexion de Bouchaud.
Il tourne plusieurs pages d’histoire et évoque nôtre « pouvoir de résilience »...
On sait que les légions romaines nous ont fait passer du rang de Gaulois au rang de Gallo-Romains...puis l’invasion franque, menée au début du 6ème siècle par le barbare Clovis, et poursuivie par ses fils, nous a fait transiter du stade de Gallo-Romains, à celui de Francs, puis de Français. lien
Or contre toute attente, c’est la culture latine qui s’est imposée au fil des siècles à ces barbares...devenus finalement, et pour beaucoup, catholiques.
Plus tard, au 8ème siècle, les Arabes, Sarrasins en l’occurrence, avaient envahi l’Afrique du Nord, puis l’Espagne, et enfin la France. lien
En effet, les Arabes, avec à leur tête, entre autres, le tristement célèbre Abd-er-Rahman avait comme projet de conquérir toute la Gaule et il était en passe de réussir : les Sarrasins avaient emporté Lyon, Macon, Chalon, Beaune, Autun, la Franche-Comté, le Dauphiné...de son côté Abd-er-Rahman dévastait l’Aragon, la Navarre, Bigorre, le Béarn, Bordeaux, Libourne et bien sûr Poitiers...Tours. C’est entre ces 2 villes, en 732, que se produisit la rencontre avec Charles Martel : le chef Sarrasin y trouva la mort, provoquant la retraite des assaillants vers le Sud.
Nous avions donc un fort pouvoir de résilience, dépassant ces défaites, en nous enrichissant en même de la culture de nos « envahisseurs », d’autant que cette culture arabe a perduré, puisque leur science était, à l’époque, bien plus pointue que la nôtre, sur le chapitre de la médecine, des maths, et de tant d’autres domaines : le vocabulaire, la musique, la cuisine...et nous nous sommes accaparés beaucoup de ces avancées. lien
Preuve en est, s’il en faut, la popularité persistante d’un certain couscous. lien
Mais revenons à la résilience.
Pour Gabriel Bouchaud, la théorie du « grand remplacement » est de l’ordre du fantasme, voire du fantasme historique.
Il cite en exemple l’impressionnant degré de résilience des Catalans, qui depuis 6 siècles d’unité espagnole conservent l’espoir aujourd’hui encore d’une indépendance...
Et les exemples de résilience cités par Bouchaud, l’un des contributeurs de la veille d’idée Phébé, sont nombreux.
Des Grecs qui ont survécu à 4 siècles de domination ottomane, aux Finlandais qui ont résisté à 5 siècles d’occupation suédoise, en passant par les Serbes, et surement d’autres, l’histoire prouve que, quelques soient les invasions, ou les migrations, même les plus déstabilisantes, rien n’a fait disparaitre notre culture latine.
Mais n’y a-t-il pas des sujets plus importants ?
Le changement climatique, que certains limitent à un réchauffement, peut aussi prendre une tout autre direction...le refroidissement.
En effet, la modification du fonctionnement du Gulf Stream est en cours, et elle pourrait provoquer un refroidissement important qui irait jusqu’à mettre Paris au même niveau de température que Montréal... – 40°...
2 études récentes, publiées dans le magazine « Nature » ne disent pas autre chose.
L’équipe de David Thornalley, du département de géographie de l’université de Londres a mis en évidence le fait que les courants océaniques de l’Atlantique n’ont jamais été aussi faibles depuis 1600 ans, et ont chuté de 15%, soit l’équivalent d’une diminution de débit correspondant à 15 fleuves de la taille de l’Amazone, l’eau douce libérée par le réchauffement de la banquise agissant sur les courants marins. lien
Et quid des Scandinaves, qui pourraient bien être obligés de s’exiler en Afrique pour survivre ?... lien
Ces mêmes africains qui, poussés aujourd’hui soit par l’avancée de la désertification, la pénurie alimentaire, ou les conflits que l’on sait, demandant l’asile aujourd’hui, pourraient être surpris par ce renversement de paradigme.
Dans l’autre sens, celui du réchauffement, il est probable que les modèles utilisés soient bien trop optimistes, et que la montée des eaux ne sera pas de l’ordre de quelques centimètres, mettant à mal les grandes métropoles situées au bord de l’eau...Londres, New-York, Tokyo, et provoquera d’autres surprenantes migrations.
Réchauffement et refroidissement de la planète feraient donc partie d’un même processus, l’un entraînant l’autre.
Finalement, c’est sur notre comportement que nous devrions nous appesantir, car alors que de nombreux scénarios évoquent pour 2050 une planète avec 10 milliards d’habitants, (lien), il parait bien optimiste d’envisager que nous ayons assez de ressources pour tout ce monde, même si l’agronome Jacques Caplat assure le contraire. Lien
Laissons le mot de la fin au chroniqueur de Phébé : « il serait donc opportun d’accueillir sans angélisme, ni hystérie, (...) des populations qui cherchent avant une tout une vie meilleure, en se souvenant que l’Europe de l’Ouest a déjà accueilli, depuis la fin de l’Empire Romain, de nombreuses tribus germaniques, des Huns, des Avars, des Vikings...aucune de ces arrivées, bien plus déstabilisantes que celles auxquelles nous assistons ces dernières années, n’a entraîné la disparition de notre société latine ».
Du coup nos atermoiements sur les migrants et le reste, ne pèsent pas lourd.
C’est donc notre comportement qui est en question, et la « politique des petits pas », voulue par Macron et son fidèle valet, De Rugy, nous mène à l’évidence « droit dans le mur », alors qu’en 2017, Macron affirmait vouloir relancer les accords de Paris (lien) et De Rugy disait soutenir « la marche pour le climat » du 8 septembre, tout ça reste du domaine de la parole. lien
Chirac avait déclaré, il y a longtemps : « notre maison brûle et nous regardons ailleurs » mais qu’avait-il fait réellement ? lien
Comme dit parfois mon vieil ami africain : « la brousse est plus forte que l’éléphant ».
Le dessin illustrant l’article est de ïoO
Merci aux internautes, et à Alain M. en particulier, pour leur aide efficace
Olivier Cabanel
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