Proposer une fiscalité environnementale innovante

par Rcoutouly
samedi 15 septembre 2012

Dans le contexte de la préparation de la conférence environnementale qui aura lieu les 14 et 15 septembre, le débat portera inévitablement sur la fiscalité environnementale.

 

La démarche des contributions incitatives

L'évolution de la fiscalité environnementale est une nécessité. On y a répondu, jusqu'à présent, par des solutions insatisfaisantes (1). Il nous faut maintenant inventer une fiscalité nouvelle qui contribuera efficacement aux nécessaires transitions écologiques du XXIéme siècle. 

Les contributions incitatives sont des taxations ciblées précisément sur des usages et des produits polluants,  non renouvelables et/ou fortement émetteurs de carbone . L'argent de ces contributions est intégralement utilisé pour investir dans les transitions écologiques.

Combinant taxation et investissement économique, les contributions incitatives permettent à la fois de répondre à l'urgence écologique et à la nécessaire relance d'une économie durable. Ce système fiscal permet de répondre aux besoins importants de financement que nécessitent les transitions écologiques.

Etroitement ciblées, ces contributions vont être souples dans leur mise en oeuvre. Elles pourront toucher toutes les pollutions ou les atteintes à l'environnement. Elles permettront des négociations transparentes avec les consommateurs et les entreprises concernés.

Le signal prix sera explicite pour les acteurs économiques concernés. Ce système les met devant leurs responsabilités : soit continuer à polluer et y mettre le prix, soit investir pour en sortir et être aidé pour cela.

Comment fonctionne la méthode des contributions incitatives ?

La contribution est prélevée sur une activité polluante précise. Elle est très faible mais augmente progressivement et inexorablement (la loi fixe son évolution sur une décennie). Le signal prix est donc clair : chacun peut savoir combien va lui coûter le maintien de son comportement polluant.

Une contribution incitative est étroitement spécialisée : les pêcheurs, les automobilistes, les entreprises, les propriétaires de logements, ... Ils forment une communauté d'intérêts. L'ensemble de la population contributrice, et elle seule, doit profiter de l'argent récolté.

Les recettes d'une contribution sont utilisées intégralement pour investir et subventionner des actions environnementales dans le secteur où la contribution a été prélevé. Ces investissements doivent permettre de réduire significativement la pollution concernée. 

Les subventions allouées aux contributeurs vont être proportionnelles à leurs revenus. L'argent récolté l'année N est redistribué l'année N+1 grâce à des mécanismes de régulation qui vont éviter de creuser les déficits publics.

 

Un exemple précis, la contribution incitative sur l'essence : 

Adossée à la TICPE (ex-TIPP), elle sera la première année de 2 centimes d'euro par litres. Elle va permettre de récolter 1 milliard. Le législateur aura prévu son augmentation de 2 centimes d'euros par an pendant 10 ans. Elle atteindra alors 20 centimes et 10 milliards (2).

Cet argent va être intégralement utilisé pour sortir de l'utilisation massive et généralisée de voitures individuelles à essence. Imaginons qu'il soit décidé de développer les systèmes d'utilisation de voitures en libre-accès et en partage. Les contributions incitatives vont permettre, par exemple, de financer les stations libre-service (l'usager payant les voitures). A raison de 50000 euros par station (coût des stations auto'lib à Paris), la première année permet d'en installer des milliers, sur l'ensemble du territoire métropolitain. La puissance d'investissement permet de proposer en quelques années une couverture du territoire qui va progressivement, mais rapidement, grignoter la suprématie de la voiture individuelle.

Les usagers seront d'autant plus motivés à basculer vers des modes de déplacements partagés ou collectifs que la progression de la taxation essence sera connue et que la possibilité d'accéder à des modes "doux" de transport sera rendue économiquement intéressant par le mécanisme de subvention.

 

(1) Les crédits d'impôts ont démontré leurs effets pervers. L'échec de la contribution climat-énergie s'explique par son impopularité qui fit reculer le président Sarkozy. Les projets de fiscalité "verte" au profit d'une baisse des charges du travail sont peu crédibles : la complexité de cette démarche, le mélange entre fiscalité et contrat social les rendent techniquement et déontologiquement irréalistes. Seul, le bonus-malus a été une mesure légère et efficace dont les mécanismes méritent d'être évalués et améliorés. 

(2) A condition que la consommation reste constante : on peut espérer que cette politique fiscale entraîne une baisse de la consommation et donc des recettes. Il s'agit d'une proposition. Le choix de la progression sera important à la fois pour le signal prix de long terme et pour les capacités d'investissement qu'elle va permettre. Tout est possible de la progression arithmétique présentée à une progression géométrique de facteur 2 qui, en dix ans, amène à une taxation au litre de ... 10,28 euros !

 

Pour en savoir plus : les articles du site fiscalité environnementale

  

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