Refondation : bien-être sans écologie, est-ce possible ?

par Roland Gérard
mercredi 10 octobre 2012

Hier en Sorbonne le Président de la République à prononcé un discours sur l'école...si "épanouissement", "plaisir" et "bien-être" y était, en revanche écologie n'y était pas !

Nous étions 400 invités m’a-t-on dit, en tout cas toute la partie basse du grand amphi de la Sorbonne était remplie. En face de moi, les statues de Pascal, Lavoisier… autour de moi des dorures, du bois patiné par les années, du velours, des peintures évoquant la Grèce (d’avant l’euro), à droite de l’estrade « Liberté, Égalité, Fraternité » en lettre d’or, à gauche la même chose. Des drapeaux. Mais aussi des ami(e)s, SGEN, ICEM, AGEEM, Francas, CEMEA, Cahiers Pédagogiques…

Pléthore de ministres. 

Nous faisions un bon brouhaha quand, je ne sais à quel signe, le silence s’est progressivement installé, puis tout le monde s’est levé. Mon voisin m’a glissé dans l’oreille : « la République manque de simplicité », j’ai acquiescé. C’est le recteur de la Sorbonne, j’imagine, personne ne l’a présenté, qui a démarré. « Soyez les bienvenus en Sorbonne », « l’école est la grande œuvre de la République », nous avons été « 800 participants pour refonder l’école de la République ». Tous les ministres présents ont été nommés, Peillon, Pau-Langevin, Duflot, Batho, Sapin… pour les premiers, il y en a d’autres, nous verrons aussi arriver Vals, Taubira… il y a pléthore de ministres. 

« Épanouissement », « bienveillance », « plaisir », « bien-être »

Il y a eu une première salve avec les quatre du comité de pilotage et les quatre présidents de groupe en tribune avec une journaliste. Les premiers mots qui ont éveillé mon attention sont : « bien-être », « plaisir », « il n’y a pas de plaisir à faire mal son métier » rapportera Marie Colombani du comité de pilotage, c’est un prof qui lui a dit. Christian Forestier du CNAM dira : « de 15 à 20 % d’une génération est en échec lourd » et ça a duré des minutes longues, toutes les plaies de l’école exposées en pleine lumière, sous nos yeux. Puis la journaliste a dit qu’elle avait trouvé des mots pas habituels dans le rapport, des mots qu’on ne trouve pas habituellement dans les rapports : « épanouissement », « bienveillance », « plaisir », « bien-être »… c’est souvent à l’occasion de la concertation, ce que demandent les parents pour leurs enfants. Humains les parents en fait ! Le stress de la compétition est dénoncé.

Son épée au côté

Je me dis qu’au cœur du problème se trouve l’inaptitude au lâcher-prise, la confiance en l’enfant c’est la confiance en le sauvage. L’école vous prend en main sous prétexte de vous émanciper, c’est dur à avaler. Les mots « environnement », « nature », « écologie », « développement durable » ne sont pas venus. De la journée ils ne viendront pas. En revanche la santé à trouvé une bonne avocate en la personne d’Agnès Buzyn présidente du groupe 2 : « l’école ne doit pas penser que c’est une mission secondaire ». Puis le Président est arrivé, avant lui le premier ministre est rentré par la porte de droite. Nous, nous nous étions tous encore levés et nous avons du attendre plusieurs minutes avant de voir la porte gauche s’ouvrir poussée par l’huissier avec son grand collier et son épée au coté. Mon voisin me parlera de « monarchie » et « d’archevêque » cette fois. C’est vrai que ça fait penser à la messe.

La concertation n’est pas terminée 

Nathalie Mons membre du comité de pilotage proposera deux idées fortes au Président : « créer une école de la justice sociale pour la réussite de tous les élèves » et « une école du bien-être (encore lui) et de la confiance ». Puis ça a été le discours du président : « l’essentiel, c’est l’avenir », « un projet éducatif c’est par définition un projet de société », « le savoir exige pour être transmis des savoirs faire », « autonomie des équipes pédagogiques », « des lieux qui assurent de bonnes conditions de vie », « Les collectivités locales seront donc associées dans le cadre des projets éducatifs territoriaux », « une loi sera proposée en conseil des ministres en fin d’année », « la concertation n’est pas terminée »… Pour conclure, il parlera de « ce bien inestimable qu’est notre éducation nationale… », « Les Français sont donc inquiets, le chômage est en hausse constante depuis 16 mois, la croissance est au ralenti, l'endettement public atteint un niveau record » dans la liste des plans galère, pas de référence à la crise environnementale ! Il parlera de dette financière et de dette éducative, mais pas de dette écologique, elle est pourtant celle la et sera beaucoup plus salée. Le discours du Président est terminé et comme le veut la tradition après lui plus aucun mot ne sera prononcé.

Quel bien être sans écologie ?

Quoi dire ? J’attendais des mots que je n’ai pas entendus, mais j’en ai entendu d’autres. Plaisir, bien-être, bienveillance… l’école veut s’humaniser. Elle se veut plus joyeuse et plus douce. Moins sanctionnante. Nous ne pouvons que nous en réjouir et en plus les collectivités vont maintenant venir apporter leur grain de sel supplémentaire, aucun doute elles interviendront davantage sur les contenus. Et puis s’ils ne sont pas là les mots attendus, c’est aussi le bilan de la décennie et pas le nôtre. Au seuil de la neuvième année de la décennie de l’éducation au développement durable des Nations Unies orchestrée par l’UNESCO on peut constater que la classe politique française en sort pratiquement indemne et l’Éducation nationale tout à fait. Il va falloir encore communiquer, encore expliquer, mobiliser*. L’école irait mieux avec plus de grand air, plus d’humus, plus d’eau qui coule dans les ruisseaux, plus d’oiseaux et de roseaux. Tous nous irions mieux les humains, nous aurions plus de bien-être.

À suivre

RG

* http://www.cfeedd.org/petition/


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