Relance du nucléaire sous contraintes lourdes

par Laurence Bonzani, Serge Guérin, Safia Lebdi et Jean-Marc Pasquet
jeudi 25 septembre 2008

Parmi les pistes de diminution des gaz à effet de serre (GES), le nucléaire semble vivre son nouvel âge d’or : 439 réacteurs nucléaires sont en activité dans le monde et, désormais, l’essentiel du développement est porté par des pays « émergents » (Chine, Inde, Russie). Les nouvelles capacités à mettre en œuvre d’ici 2020 pourraient atteindre 130 GW, soit une centaine de réacteurs supplémentaires.

D’ici 2030, le rythme de construction serait selon l’IFRI d’une dizaine de réacteurs par an. La compétitivité vis-à-vis du gaz et davantage encore du charbon est sujette à caution : les prévisions des coûts de production de l’électricité (OCDE/AIE-AEN) sont très différentes selon les hypothèses retenues de démantèlement en fin de vie et le stockage des déchets. Le bilan global du nucléaire en CO2 serait sensiblement proche du gaz selon les calculs de l’Ademe : le parc nucléaire français est ainsi inadapté aux contraintes de la demande résidentielle ce qui suppose le support de centrales thermiques classiques. Malgré ces constats, de nombreux Etats et investisseurs parient sur un mouvement de relance. Sans même entrer dans le débat « pour ou contre le nucléaire », quelles contraintes s’opposent à ce mouvement ?

Contraintes de rareté et de prix de la ressource de base
Si la productivité des réacteurs continue de s’améliorer, la rareté relative de l’uranium ne laisse à ce jour entrevoir de perspectives d’exploitation au-delà de quelques décennies. Les capacités d’extraction et de recyclage sont limitées de sorte que l’offre est aujourd’hui très inférieure à la demande. Le prix spot de l’uranium a d’ores et déjà été multiplié par dix en trois ans.



Contraintes d’offre
Les capacités de production (métallurgiques) ont été amputées cette dernière décennie : trois entreprises disposent des capacités pour construire les cuves en France, Japon et Russie. Le capital humain a lui aussi été obéré par la « pause » des années 90.

Contraintes de financement
Les pays de l’OCDE qui développent des contrats long terme ou les pays de monopoles (Inde, Russie) disposent davantage de leviers pour le développement nucléaire que les pays émergents où l’Etat manque de moyens ou ceux dont l’atomicité des acteurs est le résultat de marchés concurrentiels (Etats-Unis, GB).

Contraintes d’exploitation
Elles sont principalement liées à la question ô combien épineuse de la gestion des déchets. Si des solutions de confinement existent, mais reste en suspens la durée. En outre, le stockage géologique soulève le problème de la réversibilité à horizon de plusieurs milliers d’années dans un temps où la recherche sur la transformation des déchets sur des durées courtes n’a pas abouti.

Contraintes géopolitiques, enfin !

Le régime de non-prolifération installé dans les années 60 a vécu. Viennent en témoignage de cette nouvelle donne l’essai nucléaire de la Corée du Nord en octobre 2006 et la quête de l’Iran d’enrichissement de l’uranium malgré les réprimandes du Conseil de sécurité des Nations unies. La résolution 1 540 adoptée le 28 avril 2004 prévoit des dispositifs de contrôle, d’assistance énergétique et de sanctions. Elle est confrontée au bon vouloir de dirigeants peu ouverts au droit international et décidés à changer les équilibres de puissance régionale.


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