Trois symboles à renverser ? Le bouton, l’écran et la tour

par imago
jeudi 5 mars 2009

 Le salon de Genève bat son plein ; de belles (?) jeunes femmes vantent leurs carrosseries, et les bouches en cœur font fleurir les nouveaux modèles comme des plantes vertes. L’auto électrique une véritable vraie solution ? « L’énergie c’est vous » était le titre d’un ouvrage paru au moment du premier choc pétrolier (auteur Roger Bernard, universitaire enseignant à Lyon I). Alors, la pile à lithium ou le vélo ? La Bolivie (premier gisement de ce minerai) risque d’être « mise à contribution  » (pour son bien, évidemment, grâce au libre marché.

Il nous semble que face à la crise gigantesque qui s’annonce, cette situation reflète une « fausse bonne solution » typique, qui risque de reporter d’un cran les véritables questions. Parmi tous ces enjeux, trois nous semblent de véritables symboles à abattre si l’on veut amortir le choc.

 

Le drame de l’électricité, c’est le bouton, avait dit un jour Alfred Sauvy qui expliquait - d’une façon très imagée - les multiples ressorts d’un taux de croissance de 7% par an de la consommation électrique dans les années 60-70, soit un doublement tous les 10 ans. . A cette époque d’ailleurs EDF proclamait haut et fort qu’il s’agissait là d’une énergie « noble », et donc susceptible de toutes les convoitises. Evidemment, rien à voir avec le charbon ; quel concentré d’intelligence ! Reconnaissons que cette forme secondaire d’énergie est la seule à permettre des applications spécifiques fondamentales (électronique…), que, grâce à elle on peut « sauver des vies humaines » (etc…) et donc qu’elle est irremplaçable. Dont acte. Par contre il existe deux autres formes d’utilisation de l’électricité (donc de recours au fameux « bouton »…) qui sont moins justifiables : la force motrice d’une part (on pourrait monter les 3 premiers étages à pied, ou / et construire des immeubles moins hauts…), et le chauffage d’autre part, ce qui est très polluant (faire chauffer de l’eau dans la centrale pour actionner la turbine puis transporter le « courant » (avec des pertes et une immense toile d’araignée) pour enfin déclencher des convecteurs…Le rendement n’est pas fameux. Ces radiateurs n’étant pas très chers à l’investissement, nombre de propriétaires et de groupes immobiliers poussent tout simplement leurs locataires à appuyer sur le bouton. Et puis « regardez comme c’est propre et sûr ! » Ah, l’argument de la sécurité…
Donc, premier point, se méfier des boutons ! Courage !
 
Crampes musculaires, douleurs dorsales les troubles musculo-squeletiques (TMS) font des ravages. L’auto n’est pas la seule en cause ; notre cher écran d’ordinateur et sa souris sont l’image frappante d’un syndrome de l’écran dans notre société. Expliquons. De 15 pouces ou « géant » la première fonction d’un écran est de délimiter, au sens technique et psychologique. « Regardez là », et pas ailleurs. Donc le tentatives de contestation sont peu à peu limitées. Ensuite l’écran sert à projeter (ah les frères Lumière !), des âneries ou des merveilles ; donc il faut retrousser les manches pour ne pas être que consommateurs. Enfin l’écran cache ce qui est « derrière » ; l’expression « rideau de fumée » est assez belle…

Platon a merveilleusement démontré tout cela dans le Mythe de la caverne. Or la crise actuelle impose d’abord la franchise, sinon l’honnêteté. Essayons peu à peu de faire disparaître les « années fric », de bannir les paradis fiscaux etc… Certains vont trouver cela très naïf ; mais avec l’effet Obama…Et puis on n’a plus le choix. Donc tolérer des pubs comme « souscrivez au compte machin, 4 % nets d’impôts », ou encore « grattez en ligne, vous avez gagné des millions », tolérer ces andouilleries est une injure à la face de l’humanité.

On objectera que les populations vieillissantes des pays ex-développés ne peuvent pas faire toutes du vélo et devront être soignées ; mais qu’on les laisse de temps en temps marcher un peu et qu’on ne les force pas à louer mensuellement et individuellement l’électrique chère ( !) à Mr Bolloré (330 €).
 
Le mythe de Babel ne s’est jamais effondré. Et c’est un des plus vivaces de l’histoire humaine, car il n’a pas qu’une dimension verticale. Nombre d’élus de grandes métropoles n’ont de cesse de laisser leur empreinte par des tours, plus orgueilleuses les unes que les autres. On objectera que les prélats rivalisaient autrefois à coup de flèches de cathédrales. Oui ; mais une fois construites – pour des raisons fort culturelles et / ou contestables – celles-ci se passaient relativement d’entretien.
 
repère ou cible ?
Gouffres énergétiques, repères truffés de « cadres dynamiques » et d’ordinateurs (cf le bouton et l’écran) nos tours sont le plus souvent la quintessence des innovations technologiques les plus asservissantes pour la nature humaine. Pas étonnant qu’elles soient la cible d’attentats. Mais, du coup, on renforce les procédures de sécurité ! Peu de temps avant le chantier de la tour (qu’est ce que 30 ans … ?) s’élevaient à cet emplacement de modestes constructions, issues le plus souvent de matériaux traditionnels comme le pisé (terre glaise compactée). Interrogés, des organismes protecteurs de ces formes d’habitat (CRATERRE par exemple) répondent qu’ils ont tiré un trait sur la défense de ces matériaux en Europe, et préfèrent sauver les meubles en Afrique notamment. Par ailleurs le mythe de Babel se retrouve – horizontalement - dans certains projets pharaoniques d’aéroports de province et dans des hopitaux gigantesques vendus à des pays africains ; on les appelle d’ailleurs « les éléphants blanc ».
 
Pourquoi faire simple, quand on peut faire compliqué. Essayons de retrouver l’homme comme mesure de toute chose. Démocratie et développement durable peuvent et doivent coexister. Il faut se battre, pas faire semblant en installant des chanteurs ou des « sportifs » au gouvernement.
Et, face à la crise, le développement durable n’est ni une fuite, ni mythe, mais une nécessité.
 

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