Un projet pour sauver la Mer Morte

par Henry Moreigne
mercredi 27 décembre 2006

La Mer Morte se meurt. Si rien n’est fait d’ici 2050, c’est-à-dire demain, faute d’approvisionnement suffisant en eau, elle se transformera inéluctablement en une mer de sel. Ce scénario catastrophe priverait alors la région d’un haut lieu touristique, et la planète d’un bijou environnemental. Seule solution, créer un apport en eau depuis la Mer Rouge pour approvisionner cette mer miniature qui s’assèche, mais aussi pour irriguer le désert et faire tourner une centrale électrique. Un projet aussi ambitieux que coûteux.

On parle de Mer Morte, avec ses 1050 km², l’expression lac salé conviendrait mieux. Les 275 grammes de sel présents par litre d’eau, soit quatre fois plus que dans l’eau de mer habituelle, empêchent le développement de toute forme de vie. Cette salinité exceptionnelle ravit les touristes par la portance inhabituelle qu’elle procure, même si elle ne permet pas d’y nager. Autre particularité, à 417 mètres sous le niveau de la mer, c’est le point le plus bas du globe.

Malheureusement, à l’image de la Mer d’Aral et du lac Tchad, la Mer Morte a perdu, au cours des cinquante dernières années, le tiers de sa superficie. Son niveau baisse d’un mètre tous les ans. L’évaporation n’est plus compensée par sa seule source d’eau douce, le fleuve Jourdain, dont le débit est plus qu’amoindri (5% du volume d’autrefois) par le développement de l’irrigation des cultures. Le fonctionnement de l’unique usine de production de sel, fortement consommatrice en eau, contribue également au déséquilibre.

Le 10 décembre dernier, à Amman, la France, les Pays-Bas, le Japon et les États-Unis sont convenus de débloquer 15 millions de dollars pour financer une étude sur la faisabilité du projet “Red Dead” (pour Red Sea-Dead Sea) susceptible de sauver cette mer biblique. Si les conclusions de l’étude menée par la Banque mondiale sont favorables, un énorme chantier à l’échelle d’Israël et de la Jordanie, verrait le jour. Son principe est simple : pomper l’eau de la Mer Rouge depuis Eilat (la ville la plus au Sud d’Israël) et l’acheminer par un système de pipes-lines et de tunnels sur une longueur totale de 180 kilomètres.

Les trois parties qui s’en partagent les bords, Jordanie, Cisjordanie et Israël, seraient mises à contribution. Après avoir été dessalée, l’eau passerait par une centrale hydroélectrique puis réalimenterait la Mer Morte après qu’une partie aura été utilisée pour de l’irrigation.

L’étude de faisabilité devrait durer deux ans et appréhender les effets du déversement d’eau dans la Mer Morte, susceptible de bouleverser le fragile écosystème. Le moindre doute sur des retombées écologiques pourrait entraîner l’annulation de tout le projet.

Le coût total de celui-ci est évalué à 3 ou 4 milliards de dollars. Mais seules les phases de creusement du canal (un milliard) et la construction de la centrale et l’usine de dessalement (2,5 milliards de dollars) ont été chiffrées. Viendront s’ajouter les infrastructures permettant de convoyer l’eau vers la Jordanie, Israël et les territoires palestiniens.

L’autre grand intérêt de cette réalisation pharaonique, c’est d’être commune aux trois nations riveraines et de les réunir dans un projet pacifique, dont les retombées économiques et écologiques devraient bénéficier à tous.


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