Ce que dit le soutien de Cohn-Bendit à Tsipras

par Laurent Herblay
mardi 25 août 2015

Avant les vacances, pour Daniel Cohn-Bendit, Alexis Tsipras était un croisement entre le diable et un clown. Surprise, pour sa chronique de rentrée, il le consacre tout simplement « homme de l’été ». Un changement d’opinion qui en dit long sur l’un, comme sur l’autre.
 
 
Une forme de totalitarisme souriant ?
 
Le discours de Daniel Cohn-Bendit n’est pas vraiment surprenant. Pour quelqu’un qui critique VGE de dire qu’il aurait voté Cameron, parce que ce dernier a promis un référendum sur la sortie de l’UE, soutenant qu’il aurait du voter à gauche pour éviter de donner le choix aux citoyens, le 180° d’Alexis Tsipras comble son discours de dénonciation d’un peuple qui voudrait rêver. Pour lui, parce qu’il voulait sortir de l’austérité et qu’il y a renoncé pour rester dans l’Europe et dans l’euro, il a montré un « génie politique  ». Il serait même « le seul pour changer son pays  » et il voterait pour lui s’il était Grec. Cohn-Bendit vote donc pour celui qui trahit ses engagements sur l’autel de ce dieu européen qu’il adore, et qui rend fou, au point de remettre en question les principes mêmes d’une démocratie qu’il n’aime pas.
 
Le chroniqueur d’Europe 1 pensait que Tsipras était un idéologique. Il s’est révélé être un « vrai politique qui peut changer son pays  ». Quelle ironie qu’il dénonce l’idéologie, lui qui est sans doute un des idéologues les plus bornés, avec son adoration du dieu Europe ! Il est effarant qu’il dise que Tsipras va changer son pays alors que le Premier ministre Grec suit les pas de ses prédécesseurs. Le 13 juillet, il a choisi la continuité et non le changement. Et il est effarant qu’il dise qu’il « va pouvoir sortir de l’austérité  », alors qu’il a accepté un nouvel ajustement budgétaire de 3,75% du PIB en 3 ans. Il n’est pas inintéressant de constater à quel point une partie de l’élite s’éloigne de plus en plus des principes démocratiques et refuse le principe même d’une alternance, jugeant qu’il n’y a que sa politique qui est possible.
 
Les interrogations de la gauche radicale
 
Parallèlement, l’excursion de Yanis Varoufakis en France, sur France 2 samedi, puis lors de la fête d’Arnaud Montebourg dimanche, l’a fait apparaître comme une alternative à son ancien comparse. Pourtant, à moins d’un mois du prochain vote, il n’a toujours pas pris une position claire, ne suivant pas encore les rebelles de Syriza alors que la temps de la campagne est tellement court. Pourtant, il avait constitué un véritable plan B qui semblait être une véritable alternative pour sortir enfin la Grèce de l’austérité. Plus gênant, le discours de l’ancien ministre Grec, comme celui de l’ancien ministre Français, dit essentiellement vouloir construire une autre Europe, sans prendre si clairement position pour la rupture s’il n’arrivait pas à la construire. Ce faisant, ils semblent tenir un discours bien proche de celui de Tsipras.

Pourtant, la question du plan B est devenue, depuis cet été, la question clé qu’il faut poser. Il faut noter que Jean-Luc Mélenchon a clarifié son discours, comme l’a rapporté Laurent de Boissieu sur son blog en notant que cela se trouvait déjà dans des documents de son parti de 2011. L’ancien candidat à la présidentielle a affirmé au JDD dimanche « s’il faut choisir entre l’euro et la souveraineté nationale, je choisis la souveraineté nationale ». Reste à savoir s’il persistera dans cette direction dans les prochains mois et s’il sera prêt à tenir un discours d’une absolue clarté. N’y-a-t-il pas quelque chose de gênant à cette réticence qu’ont certains à évoquer la souveraineté nationale, qui semble pour eux forcément un pis-aller par rapport au rêve européen, aussi monstrueux soit-il devenu depuis quelques années ?

 
La séquence Grecque a néanmoins un grand mérite : celui de poser fortement la question du discours qu’il faut tenir sur le projet européen actuel. L’idée de changer cette Europe apparaît totalement illusoire à date. Et même si j’ai toujours dit que je préfère la rupture à un changement qui n’en serait pas un, je finis par me demander s’il ne faut pas faire de la sortie de l’UE un but en soi.

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