Cinquante ans d’Europe, et demain ?

par Neos
mercredi 21 mars 2007

Il y a cinquante ans, le 25 mars 1957, six Etats membres signaient les traités de Rome : un traité pour établir une Communauté économique européenne (CEE) et un autre pour instituer une Communauté européenne de l’énergie atomique (EURATOM). Ces traités entraient en vigueur le 1er janvier 1958.

Dix années plus tard, le 1er juillet 1968, les droits de douane industriels étaient totalement éliminés, un marché commun voyait le jour et facilitait le transit des biens et des services entre les Etats signataires. Au cours de la décennie qui suivra, les politiques communes, principalement la politique agricole et la politique commerciale, seront mises en place.

Cinquante ans déjà que ces règles s’appliquent dans les communautés européennes, devenues "l’Union européenne" depuis le 1er novembre 1993 et l’entrée en vigueur du Traité de Maastricht.

Cinquante ans que ces règles régissent et organisent les relations entre les Etats membres, cinquante ans que ces règles entrent discrètement dans la vie quotidienne des Européens. A ce titre, le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, soulignait les vertus d’un "succès tel qu’il passe inaperçu puisqu’il a intégré le mode de vie de chacun d’entre nous (1)."

L’Union européenne est omniprésente dans la vie des Européens. Souvent à leur insu. Trop, peut-être. Pourtant, le président de la Commission européenne, J.-M. Barroso, en est convaincu : "Tout comme la menace soviétique a contribué à la démarche des six pays fondateurs, la mondialisation pousse à plus d’intégration européenne. La dimension européenne est de plus en plus nécessaire pour faire face à des défis globaux, comme le réchauffement climatique, la sécurité énergétique, le terrorisme, les pandémies ou la compétitivité des entreprises (2)."

Aujourd’hui, l’Union européenne n’est plus seulement un projet de paix. Elle dépasse cette ambition, va au-delà. Le projet de société européen s’inscrit dans une volonté de bâtir une cohésion entre les peuples afin de leur permettre de s’adapter ensemble et durablement aux défis extérieurs imposés par la mondialisation. Il vise également à garantir aux Européens un haut niveau de vie et de solidarité au sein de l’Union au cours du XXIe siècle.

Projet de conciliation entre les Etats et les peuples, l’Union européenne n’a pas vocation à devenir un Etat fédéral. J.-M. Barroso l’a souligné avec justesse cette semaine : "Il faut oublier le projet d’un super-Etat fédéral qui supprimerait les identités nationales. Je pense qu’il n’est même pas souhaitable. Et, de toute façon, ce n’est pas réaliste (2)." Mêlant un partage sans équivalent au monde des compétences entre les Etats membres et l’Union européenne, favorisant la recherche du compromis permanent au sein de ses institutions, elle est une organisation originale et moderne, un outil mis à la disposition des peuples et des Etats d’Europe pour bâtir ce projet de société en commun.

Projet de conciliation et de solidarité entre les peuples, l’Union européenne ne privilégie pas une vision de l’avenir européen plus qu’une autre. En aucun cas, elle n’est la vision d’un Etat ou d’un homme sur les autres. Observateur avisé de la campagne électorale en France, Jean-Claude Juncker n’hésite pas à préciser : "Je ne vois pas comment un pays isolé, soit-il une grande nation comme la France, pourrait réaliser [les aspirations européennes] en se soustrayant à la solidarité avec ses partenaires européens (1)."

Plus qu’un espace économique, l’Union européenne d’aujourd’hui aspire à la solidarité et à la cohésion. Le jeu des grandes nations est révolu. La stratégie collective est requise pour accomplir les pas qui séparent l’édifice d’un degré d’accomplissement satisfaisant pour l’ensemble de ses membres, à savoir la cohabitation entre les peuples. Ce fut et reste toujours le grand objectif de l’unification européenne (3)."

Angela Merkel profitera probablement du 25 mars 2007 pour faire le point sur l’état d’avancement des consultations allemandes avec les chancelleries des autres Etats membres sur la relance du processus de réforme institutionnelle de l’Union. A cette occasion, la présidence allemande devrait retenir le principe du lancement d’une nouvelle conférence intergouvernementale, en juin 2007, chargée d’élaborer un nouveau texte de traité. Ce traité serait signé par les chefs d’Etat et de gouvernement au cours du Conseil européen de décembre 2007 et devrait prévoir une période de 12 à 14 mois pour sa ratification. Selon les processus de ratification adoptés par les Etats membres, et particulièrement le consentement des peuples souverains (pour les pays qui le soumettront à référendum), ce traité pourrait entrer en vigueur avant les prochaines élections européennes prévues en juin 2009.

Malgré les souverainistes, les altermondialistes, les utopistes et autres détracteurs, l’Union européenne traverse l’histoire de notre continent et survit aux crises, fussent-elles profondes et identitaires.

La Chancelière fédérale allemande ne s’est pas trompée en balisant la voie qui mènera à la solidarité et à la cohésion en Europe. Le répétant à plusieurs reprises dans son discours devant le Parlement européen, elle invite les peuples et citoyens européens à apprendre enfin à mieux se connaître : "un chemin très simple mène à l’âme de l’Europe, à la tolérance. On doit aussi voir avec les yeux de l’autre. Essayez. C’est une aventure stimulante de découvrir avec les yeux des nombreux peuples d’Europe la diversité de notre continent, en somme notre richesse (3)."

Piliers de l’Union européenne de demain, la solidarité et la tolérance sont les attributs qui permettront aux Etats et aux peuples de surmonter leurs divergences, de vivre leur avenir la main dans la main. Et à ce projet de société de marquer de son empreinte les cinquante prochaines années sur notre continent européen.

(1) Jean-Claude Juncker, "La construction européenne, un projet de paix ", Le Figaro, 19.03.2007
http://www.lefigaro.fr/forum-figaro-2007/20070319.FIG000000147_la_france_a_t_elle_besoin_de_l_europe.html

(2) José Manuel Barroso, "Je suis contre la « crisophilie » ambiante", Les Echos, 19.03.2007
http://www.lesechos.fr/info/inter/4552435.htm

(3) Angela Merkel, "Discours devant le Parlement européen, Strasbourg, mercredi 17.01.2007"
http://www.eu2007.de/fr/News/Speeches_Interviews/January/Rede_Bundeskanzlerin2.html


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