En route vers l’Europe
par Henry Moreigne
mardi 5 février 2008
Mais où sont passés les nonistes, tous ces élus nationaux et locaux qui, dans un grand mouvement de défiance, souvent démagogique et opportuniste, à l’égard du chiraquisme et des élites européennes avait donné un grand coup de pied dans la fourmilière ? Etrangement, ils ont fait pssichtt en laissant deux victimes sur le carreau. L’Europe bien sûr, mais aussi le sentiment démocratique.
“Du débat jaillit la lumière”. La campagne référendaire fut un grand moment de l’exercice démocratique. Pour la première fois depuis les débuts de l’aventure européenne, le peuple avait saisi avec enthousiasme un sujet trop longtemps confisqué par une poignée d’individus. Le Non de 2005 n’était pas un Non à l’Europe, mais à une certaine forme de celle-ci.
Cette position contrairement à celle d’un repli frileux sur les frontières hexagonales était recevable. Las, une foi l’affaire faite, les hérauts du Non ont abandonné ceux qui les avaient suivis en étant incapable d’offrir une alternative au texte qu’ils venaient de faire rejeter. Cette alternative aurait pu être de changer les dimensions du cadre, de remplacer le référendum français par un référendum européen se déroulant simultanément sur l’ensemble du territoire de l’Union.
L’attitude est typique de cette gauche révolutionnaire enfermée dans une critique stérile, se refusant toujours à mettre les mains dans le cambouis et à assumer des responsabilités. Depuis 2005 donc rien. Aucun chantier d’ouvert, juste un immobilisme qui ne sert au final que les situations injustes et fait le jeu de tous les conservatismes.
Dans ce contexte, on comprend les aboiements timides du camp du Non face à l’adoption du Traité de Lisbonne. Pour sa part le président de la République a pris toutes ses responsabilités. Il tient son engagement de relancer l’Europe. La méthode est désagréable, mais en l’absence de toute alternative, du fameux plan B, elle apparaît comme inéluctable.
C’est finalement l’histoire un peu triste d’un rendez-vous manqué. La France de 2008 n’attend pas contrairement à la politique de civilisation de Nicolas Sarkozy d’être la fille aînée de l’Eglise, mais d’être une fille aimante, responsable et constructive de l’Europe. Dans ce cadre, l’adoption du Traité de Lisbonne n’est pas qu’un hold-up démocratique, c’est avant tout un hold-up de l’Europe par la classe politique française.