En terre bruxelloise, le mystère se terre
par Pierre-Franck Herbinet à votre SERVICE
mardi 4 janvier 2011
« Dans les couloirs » ..., les lobbyistes s’activent. Devons-nous envisager les questions de l’environnement et de l’énergie comme un projet politique européen ? Devons-nous avoir recours légitimement à la subtile expertise bruxelloise pour réconcilier « environnementalisme » et « civilisation technicienne » ? Comment influer sur les affaires publiques sans abus préjudiciable pour la démocratie ? Qu’il s’agisse de réformes concernant la prescription civile ou portuaire, qu’il s’agisse de questions afférentes à la responsabilité environnementale dans le droit communautaire ou au sujet de la modernisation de nos institutions, les relations, soient-elles presses, publiques ou institutionnelles, « factorisent » l’influence des lobbyistes au sein du processus décisionnel public.
A l'abri des lumières médiatiques, le microcosme bruxellois est "aux affaires", puisque la capitale belge concentre les pouvoirs communautaires et les entités satellitaires. Dans une atmosphère emplie de messages -en théorie- neutres, les lobbies, groupe de pression, conseillent le décideur public dans l'optique d'impacter la législation, soit en infléchissant la norme, soit en créant de nouvelles normes. Plongés au cœur du triangle institutionnel, les lobbyistes exercent ce métier dans les règles de l'art. Sans travail, le lobbyiste perd en crédibilité ; sans écoute, sans modestie, sans souplesse, la négociation aboutie logiquement sur un échec ; l'honnêteté financière proscrit les dessous de table tandis que l'honnêteté intellectuelle exige la vérification d'une information avant d'en effectuer le transfert. Incluant un vaste champ de connaissances dans les sphères économiques, juridiques et institutionnelles, le lobbyiste, par des argumentations éclairées, influence le processus décisionnel public.
En faveur de la construction européenne, le Mouvement Européen intervient, par l'entremise de ses commissions, sur les questions environnementales et énergétiques à forts enjeux. Provoqué par « l'effet de serre », augmenté par la combustion des fossiles carbonés, le réchauffement climatique demeure une préoccupation majeure aux yeux du Mouvement Européen. Fruit de maintes concertations qu' autant de débats contradictoires entre les décideurs publics et privés, la décision finale est exclusivement du ressort du responsable politique, en sa qualité de dépositaire de l'intérêt général. Sur la question énergétique européenne, qui peut contester son impact géostratégique quant à la sécurité mondiale ? Eu égard les fortes contraintes sécuritaires, il apparaît stratégique de coordonner les objectifs de la libéralisation du marché, de la qualité environnementale et de la sécurité générale.
Au-delà d'une opinion publique baignant dans l'euroscepticisme ambiant, la probabilité de la ratification d'un nouveau traité semble nulle. Autres lamentations, autres dires, autres réserves : selon certaines analyses, l'idée de cohésion européenne s'effriterait à cause de l' « opt in » permettant à des États de rejoindre progressivement les autres membres. Force est de constater que l'Union Européenne mène une politique de l'énergie européenne sous le signe de l'exemplarité. Insistant sur la nécessaire « intégration renforcée » de la politique européenne de l'énergie, militant pour la création de la « communauté européenne de l'énergie », à la demande des institutions européennes, les agents d'influence explicitent dans les coulisses des appareils politiques les tenants et les aboutissants. Combinant intelligence économique et communication efficace, les agents d'influence assurent la défense des intérêts privés pour lesquels ils sont en responsabilité. Ne rentrant jamais en conflit avec les détenteurs du pouvoir politique, ils servent de réseau d'expertise relayant les revendications.
Caractérisées par l'opacité informative citoyenne, attaquées pour déni de démocratie, décriées pour négation de l'intérêt général, ces pratiques controversées sont rejetées violemment par les syndicats comme par les lanceurs d'alerte. Sans la protection d'un contre-pouvoir lors du processus décisionnel, les lanceurs d'alerte perdent la garantie de leur indépendance d'expertise. Contestant l'action produite par la consultation des pouvoirs publics, les lanceurs d'alerte dénoncent haut et fort les arbitrages faussés par la défense d'intérêts privés. Représentées, les entreprises publiques européennes sont défendues grâce à l'institution CEEP, tandis que les syndicats sont protégés par une organisation nommée ETUC/CES.
La symphonie bruxelloise est un opus de passions, de pouvoirs et de fureurs face à des intérêts nationaux contradictoires. Nonobstant les incessantes luttes de pouvoir, de complexes médiations débouchent tout de même sur des compromis. Jamais percé, le mystère bruxellois émet une étincelante tonalité humaine, dont le voile est loin d'être levé.