Europe : alerte à la déflation !

par Laurent Herblay
jeudi 12 mars 2015

Même si la BCE vient de publier les prévisions de croissance les plus optimistes depuis des années, un motif d’inquiétude persiste au sujet de l’économie européenne : la déflation. Les prix ne cessent de baisser depuis trois ans et sont passés en territoire négatif, comme le note The Economist.

 

Causes reconnues et causes ignorées…
 
Bien sûr, l’accélération de la dynamique déflationniste depuis quelques mois doit quelque chose à la baisse des prix des matières premières en général, et du pétrole en particulier. Cependant, comme le montrent bien les graphiques de The Economist, s’arrêter à cette explication serait une erreur. D’abord, l’inflation baisse depuis trois ans, bien avant que les prix du pétrole ne fassent de même. Et il faut noter que le prix des biens est lui aussi passé en territoire négatif en janvier. La dynamique déflationniste semble assez marquée. Bien évidemment, elle est la conséquence de la crise économique dont nous ne sommes pas tout à fait sortie depuis 2008, d’autant plus que l’austérité l’a aggravée.
 
En effet, la contraction de la demande provoquée par les politiques austéritaires introduit une pression à la baisse sur les prix, qui n’est pas sans rappeler les phénomènes des années 1930. En outre, il faudrait bien reconnaître que la monnaie unique aggrave le phénomène dans la zone euro. Avant, les pays en difficulté s’en sortaient par une dévaluation pour relancer leurs économies. Privés de ce moyen, aujourd’hui, ils ont recourt à une dévaluation interne, comme en Grèce et en Espagne, avec une baisse des salaires, et donc in fine des prix, pour être plus compétitif et ainsi de la croissance en améliorant leur balance commerciale par rapport à leurs voisins. Généralisé, cela entretient la déflation.
 
Quelle issue pour la zone euro ?
 
La baisse du prix des matières premières est venue amplifiée, depuis quelques mois, les mouvements déflationnistes des économies européennes. Mais d’abord, si les prix se stabilisent (ou même remontent), alors cet effet ne sera que temporaire. En outre, il devrait apporter un peu de croissance en libérant du pouvoir d’achat et en apportant une petite bouffée d’oxygène aux entreprises. En outre, les annonces de la BCE ont amplifié la baisse de l’euro qui a le double bénéfice de contribuer à soutenir la croissance tout en ayant un léger effet inflationniste qui pourrait légèrement contenir les tendances déflationnistes. En outre, le niveau très faible des taux apporte aussi sa pierre à l’édifice.
 
Néanmoins, comme le note aussi The Economist, la baisse des taux est aussi en partie compensée par la baisse des prix. Emprunter à 2,5% quand les prix baissent de 0,5% revient plus cher qu’emprunter à 4% avec 2% d’inflation… Néanmoins, on a vu dans le passé que la baisse de la monnaie unique, d’autant plus qu’elle est assez généralisée par rapport aux autres monnaies, peut être un fort facteur de croissance pour les économies européennes, surtout celles dépendantes du tourisme international. Elles deviennent encore plus attractive à l’exportation mais aussi les touristes. Après tout, Lionel Jospin avait bénéficié d’un euro qui était tombé sous le dollar, seuil qui se rapproche aujourd’hui.
 
Beaucoup de mécanismes poussent à la déflation aujourd’hui, notamment l’ouverture des frontières à des pays où les salaires sont beaucoup plus bas que chez nous, créant une course suicidaire à la compétitivité. Sera-t-il possible d’en sortir pour des pays comme ceux de la zone euro ?

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