Europe de l’Est : une nouvelle opportunité historique

par Laurent Herblay
mercredi 11 mars 2009

D’un côté des pays occidentaux qui se lamentent des usines parties à l’Est du continent, où les salaires sont parfois 10 fois plus bas que chez nous. De l’autre, des pays orientaux frappés durement par la crise et qui demandent de l’aide. N’y aurait-il pas moyen de repartir sur de nouvelles et meilleures bases en Europe ?

 L’opportunité perdue de la chute du mur de Berlin

Et il faut dire que la relation entre les pays de l’ancienne Europe de l’Ouest et ceux de l’ancienne Europe de l’Est en a bien besoin. Si l’Allemagne de l’Ouest a su tendre la main à sa partie orientale, si les Etats-Unis ont eu l’intelligence d’aider l’Europe à se reconstruire au sortir de la seconde guerre mondiale, l’Union Européenne a beaucoup trop tardé pour accompagner les anciens pays communistes dans leur transition vers l’économie de marché, attendant 15 ans pour les accepter dans le Club…

A la chute du mur de Berlin, ce qui n’était encore que la CEE aurait du suivre l’exemple Américain et proposer un véritable plan Marshall pour faciliter la transition économique de nos frères de l’Est. Cette remise à niveau des infrastructures des pays de l’Europe orientale les aurait solidement ancrés à notre continent, créant une solidarité entre les deux parties de l’Europe qui aurait alors pu rapidement ne faire qu’une. L’Europe de l’Est n’aurait pas ressenti le besoin de regarder autant outre-Atlantique….

Au lieu de cela, nous avons souscrit à une thérapie de choc inhumaine, qui a provoqué, en Russie comme en Ukraine, un ajustement économique encore plus brutal que la Grande Dépression des années 30 avec une division par deux du PIB et une baisse de l’espérance de vie… Nous avons appris à l’Europe de l’Est à ne compter que sur elle-même. Il ne faut donc pas s’étonner que ces pays pratiquent le dumping fiscal, social et salarial pour attirer les entreprises. C’est la seule voie que nous leur avons laissée.

La nouvelle opportunité qui se présente

Mais cette voie est dramatiquement dangereuse. Depuis 4 ans par exemple, alors que la production automobile de nos constructeurs automobiles en France a baissé de plus d’un million d’unités, la production hors de France (notamment en Europe orientale) a progressé de près d’un million... Avec des salaires minimums qui peuvent atteindre à peine 10% du SMIC en Roumanie et une forte proximité géographique, ces pays représentent un danger réel pour les économies de l’Europe occidentale.

Mais si l’Europe de l’Est et le libre-échange sont un facteur de chômage et de déflation salariale pour la partie occidentale de l’Europe, la situation n’est guère plus riante à l’Est. Ce modèle de développement est extrêmement instable dans la mesure où les usines pourront partir demain dans les pays moins-disants d’un point de vue fiscal, salarial ou social. Et la crise actuelle est extrêmement douloureuse, sachant que le FMI y impose des coupes budgétaires sombres pour rétablir les équilibres financiers.

Nous avons donc une opportunité historique pour tendre la main l’un vers l’autre. D’une part, nous pouvons aider financièrement nos frères de l’Est pour les sortir d’une crise économique qui est très violente dans certains pays. Et cette aide servira de contrepartie pour vendre la mise en place d’écluses commerciales, qui, si elles freineront les délocalisations de l’Ouest vers l’Est, pourraient aussi freiner les délocalisations de l’Est vers l’Asie et permettront une hausse du pouvoir d’achat dans toute l’Europe.

Nous avons raté l’occasion historique d’ancrer l’est du continent dans un projet européen solidaire à la chute du mur de Berlin. La crise actuelle nous offre une autre opportunité historique d’organiser le continent sur des principes de solidarité et non simplement de concurrence sauvage. Saurons-nous la saisir ?


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