Européennes 2019 (5) : les six surprises françaises du scrutin du 26 mai 2019

par Sylvain Rakotoarison
lundi 27 mai 2019

« Le vainqueur, c’est celui qui peut, un quart d’heure de plus que l’adversaire, croire qu’il n’est pas vaincu. Voilà ma maxime de gouvernement. » (Georges Clemenceau, discours du 8 mars 1918 devant l’hémicycle).



Les élections européennes du 26 mai 2019 ont été particulières pour de nombreuses raisons en France : une campagne très courte (deux semaines) avec des interférences nombreuses (gilets jaunes, grand débat, incendie de Notre-Dame-de-Paris, situation dramatique de Vincent Lambert, etc.). À cela s’ajoute un très grand nombre de listes, trente-quatre, un record en France, mais en Allemagne, il y en a eu quarante et une.

Comme dans la plupart des scrutins européens, il y a eu des surprises ce dimanche 26 mai 2019 (les résultats complets ici). Quand on parle de surprises, c’est à comprendre par rapport aux sondages qui ont été publiés dans les derniers jours. Les différences ne proviennent d’ailleurs pas forcément d’une mauvaise analyse des instituts de sondage (qui, tous, donnent des tendances similaires), mais plutôt de la grande indécision d’un grand nombre d’électeurs qui, au tout dernier moment, choisissent. Plus d’un électeur sur dix se disait d’ailleurs indécis dans les derniers sondages. J’ai tenu un bureau de vote dimanche et j’ai vu des électeurs regarder, pensifs sinon sidérés, longtemps, les différentes listes sur les tables, revenir à l’une puis à l’autre, etc. Pour ceux-là, le choix n’avait apparemment pas été fait avant de franchir le seuil du bureau de vote.


Première surprise : le regain de participation

La première surprise qui est une excellente surprise : au contraire de toutes les prédictions, au contraire des raisons qui auraient pu expliquer une forte abstention, comme la fête des mères (le nombre de procurations ne semblait pas supérieur à la normale, si bien que des familles ont pu quitter leur commune pour aller visiter loin un parent), la participation a été très forte. Je dis "très forte" par rapport à un scrutin européen, car elle reste encore faible dans l’absolu : 50,12% des inscrits. Cela fait près de 8 points de plus qu’aux précédentes élections européennes du 25 mai 2014. Il faut remonter aux élections européennes du 12 juin 1994 pour retrouver une meilleure participation (52,76%).

C’est une bonne nouvelle pour la démocratie et pour l’Europe. L’Europe mobilise ! Les trente-quatre listes pouvaient paradoxalement rebuter mais cette offre électorale très diversifiée pouvait aussi élargir le champ du possible chez les électeurs indécis.

Autre élément intéressant à observer, il n’y a eu que 2,32% de votes blancs, ce qui est très faible. Cela confirme que la grande diversité de l’offre électorale était reconnue et que le principe même de la règle du jeu, doter de députés une institution européenne était majoritairement admis. Les Français, en ce sens, ont toujours été attachés à leur appartenance à l’Union Européenne, malgré toutes les propagandes voulant faire croire le contraire.


Deuxième surprise : le faible écart entre la liste RN et la liste Renaissance

Depuis quinze jours, les sondages donnaient la liste du RN largement gagnante par rapport à la liste Renaissance de Nathalie Loiseau. Le resserrement très fort constaté entre des deux listes montre qu’entre les deux, il n’y a pas vraiment de gagnant et plutôt que des perdants.

La liste RN a réussi à arriver en première position avec 23,31% des suffrages exprimés, et en ce sens, c’est une victoire symbolique sur le Président Emmanuel Macron que nul ne peut contester puisque les deux avaient placé ce critère comme gage de réussite ou de défaite. Cependant, il faut vraiment relativiser cette "victoire" dans l’élection reine (puisqu’à la proportionnelle) du FN/RN, car ce score est relativement faible. Comme en 2014, les sondages ont surestimé l’audience réelle du RN.

En effet, le RN a perdu presque deux points par rapport au précédent scrutin. Ce n’est donc pas pour lui un résultat satisfaisant. Pire, il a même perdu deux sièges par rapport à 2014.

Je précise, pour bien expliquer, que lorsque j’évoque le nombre de sièges, je le ferai de deux manières différentes : quand je fais des comparaisons avec le scrutin de 2014, je les fais en prenant comme base le nombre total de sièges attribués à la France de 74 (ce qui était le cas en 2014, et ce qui est le cas en 2019 jusqu’à l’application concrète du Brexit). C’est la seule possibilité pour comparer des choses comparables. En revanche, considérant que la situation du maintien du Royaume-Uni dans l’Union Européenne est provisoire, j’évoquerai le nombre de sièges dans l’absolu en considérant le total à 79, c’est-à-dire quand le Brexit aura eu lieu. Ce choix est également pertinent, puisque ces 79 députés européens auront été effectivement élus le 26 mai 2019.

La liste Renaissance est arrivée en deuxième position avec 22,41% des voix, ce qui est une défaite symbolique pour Emmanuel Macron, Édouard Philippe et plus généralement toute la majorité. Cependant, il faut là aussi relativiser. Il n’y a eu que 200 000 voix de différence avec la liste RN, ce qui est très faible à l’échelle nationale (moins d’un point d’écart). Non seulement l’écart en voix est faible, mais l’écart en nombre sièges est nul : chaque liste a obtenu 23 sièges pour l’après-Brexit. C’est donc d’un ex-aequo qu’il s’agit plutôt que d’une victoire et d’une défaite, ou alors, comme je l’ai indiqué plus haut, d’une double défaite, du RN car faible audience (relativement à l’attente en 2019, relativement au scrutin de 2014) et de LREM car arrivé en deuxième position.

C’est pour cette raison qu’il n’y aurait pas à prévoir un changement de gouvernement, malgré les sueurs froides de 18 heures quand les premières estimations donnaient un rapport 24% pour RN et 19% pour Renaissance (auquel cas, cela aurait été un effondrement du parti présidentiel).

Par ailleurs, au même titre qu’il y a toujours eu des surprises aux élections européennes, ces surprises n’ont jamais eu de conséquences sur la vie politique nationale future et sur les élections nationales ultérieures. Ni Bernard Tapie (1994), ni Philippe de Villiers (1994), ni Charles Pasqua (1999), ni Daniel Cohn-Bendit (2009), ni même Marine Le Pen (2014) n’ont obtenu, dans une élection présidentielle qui a suivi, un score équivalent à leurs belles performances aux élections européennes, certains n’ayant d’ailleurs même pas réussi à se présenter à l’élection présidentielle en question.

Cela reste que le résultat de la liste Renaissance n’est pas brillant et que cela impose à Emmanuel Macron de faire preuve d’une réelle "humilité" (le mot a été lâché par Édouard Philippe pendant la soirée électorale). On ne cherche pas à provoquer impunément le peuple. Il faut au contraire le ménager, agir en fédérateur et pas en polariseur. Ce que n’avait pas compris non plus Nicolas Sarkozy.

Un duel entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen ne peut pas résumer à lui seul la vie politique actuelle dans la mesure où aucun des deux ne représente même un quart de l’électorat et les deux ne représentent pas même la moitié des suffrages exprimés. Pour pouvoir être majoritaires dans un second tour d’élections nationales, (présidentielle, législatives), les deux devront donc avoir une alliance avec d’autres partis pour établir une majorité. C’est l’avantage actuel de la position centrale d’Emmanuel Macron plus susceptible d’avoir des réserves de voix que Marine Le Pen, mais l’avantage est ténu, tant l’idée qu’un jour Marine Le Pen puisse être majoritaire fait son chemin. C’est ce jeu dangereux qu’Emmanuel Macron doit stopper.

C’est ainsi que peut s’analyser l’arrogance d’Emmanuel Macron : se croire autosuffisant dans sa majorité. Or, le seul nom d’Emmanuel Macron n’est plus suffisant pour rassembler les Français. C’est la grande différence avec le printemps 2017 : maintenant, Emmanuel Macron est au pouvoir et depuis une vingtaine d’années, c’est un handicap électoral plus qu’un avantage. Un gouvernant sortant se retrouve toujours en confrontation avec les mécontents de toutes sortes.

En quoi l’autosuffisance d’Emmanuel Macron est-elle finie ? D’une part, il semble assez évident que le choix de la tête de liste Renaissance a été une erreur grave de casting. Emmanuel Macron pensait sans doute que cela n’avait pas d’importance, c’est une erreur : une campagne électorale sert à cela, et la tête de liste est importante. De plus, Emmanuel Macron ne pouvait pas accompagner Nathalie Loiseau dans les meetings électoraux au contraire de Marine Le Pen dans les meetings de Jordan Bardella.

D’autre part, la stratégie électorale n’a pas été correctement établie. La liste Renaissance, si elle a pu rassembler des formations centristes (le MoDem, le Mouvement radical, et Agir), elle n’a pas su rassembler également l’UDI dont la position européenne était très proche de celle de LREM (et les élus UDI auraient adhéré au même groupe au Parlement Européen). Or, l’absence de l’UDI au sein de la liste Renaissance a coûté probablement sa victoire symbolique face à la liste RN : en effet, en additionnant la liste Renaissance et la liste UDI de Jean-Christophe Lagarde, on obtient 24,91%, ce qui aurait dépassé la liste RN.

Certes, on pourrait aussi rapprocher les voix de Jordan Bardella, de celles de Nicolas Dupont-Aignan, Florian Philippot et François Asselineau, ce qui, ici, ferait plus que Renaissane+UDI, à savoir 28,64%, mais à la différence de LREM-UDI, ces quatre partis ne seront probablement jamais unis lors d’une élection présidentielle, précisément pour des problèmes d’ego (chacun des petits candidats de l’ultradroite voulant gérer sa propre petite boutique électorale). Ce qui n’est pas le cas de l’UDI (j’y reviens plus loin).

Ce qui n’est en revanche pas une surprise mais une confirmation, c’est que le paysage politique est désormais durablement recomposé autour de deux grands pôles, le RN et LREM même s’ils ne sont pas autosuffisants à eux seuls. En ce sens, aucune majorité capable d’avoir les moyens électoraux de gouverner ne pourrait se passer de l’un de ces deux pôles. Cela signifie aussi que la capacité du RN à arriver au pouvoir est loin d’être nulle. Au-delà des deux défaites de court terme de ces deux listes, c’est une double victoire de long terme tant pour Emmanuel Macron que pour Marine Le Pen : le monde politique ne pourra tourner qu’autour d’eux.


Troisième surprise : l’envolée électorale de Europe Écologie

C’est la véritable surprise du chef : personne n’avait imaginé que la liste écologiste menée par Yannick Jadot arriverait à la troisième position, aidée par le vent européen favorable, remportant 13 sièges, et cela malgré la figure peu charismatique de la tête de liste. Il est vrai que 13,47% n’est pas non plus une consécration pour les écologistes, on peut même imaginer que la liste EELV aurait obtenu plus de voix encore avec un leader plus attractif, comme Daniel Cohn-Bendit qui avait rassemblé 20,86% des électeurs le 7 juin 2009 en Île-de-France (les listes EELV avaient obtenu 16,28% à l’échelle nationale), certes avec le taux d’abstention record pour ces élections.


Dans tous les cas, c’est une surprise inespérée pour les écologistes français profondément divisés dans de nombreux partis, entre doctrinaires quasi-totalitaires et opportunistes franchement arrivistes. Cela signifie que le "label" EELV fonctionne encore bien, au même titre que les marques Le Pen ou Macron. Il signifie quelque chose, et sans doute que les électeurs qui ont voulu d’abord exprimé leur attention voire leur inquiétude pour l’écologie se sont dit que le meilleur moyen de l’exprimer, c’était de choisir pour "la" liste écologiste. Du reste, la liste Urgence écologie menée par Dominique Bourg et mise en place par Delphine Batho et Antoine Waechter, malgré sa très faible publicité, a quand même recueilli 1,82%, ce qui, parmi les très petites listes, n’est pas négligeable (elle a empêché la liste EELV d’atteindre 15%).

Certains ont analysé cette bonne performance par l’apport d’électeurs de LREM qui ont voulu montrer leurs préoccupations écologiques. Je pense qu’on peut trouver aussi un surcroît d’électeurs écologistes parmi les électeurs potentiels de Jean-Luc Mélenchon. Car à force de vouloir mettre le thème de l’écologie comme thème de campagne, la logique veut que cela favorise le parti écologiste par excellence, au même titre que le fait de mettre la lutte contre l’immigration comme thème de campagne entraîne un avantage considérable pour le parti anti-immigrationniste par excellence, à savoir le RN.

Là aussi, la stratégie d’Emmanuel Macron de placer en numéro deux de la liste Renaissance l’ancien ministre écologiste Pascal Canfin et de réunir son premier Conseil de défense écologique trois jours avant le scrutin, s’est retournée contre lui.


Quatrième surprise : l’effondrement de la liste Les Républicains

En ne rassemblant que 8,48% des voix, la liste LR menée par François-Xavier Bellamy s’est effondrée. Pourtant, la campagne dynamique et très personnelle et courtoise de la tête de liste (qui, à mon sens, garde cependant un grand avenir personnel dans le jeu politique national) avait fait grimper sa liste dans les sondages jusque vers 13-15% en avril 2019.

C’est la première fois que l’existence même de LR dans le paysage politique est mise en cause, une question que se pose notamment l’ancien ministre Éric Woerth ce lundi 27 mai 2019. Cet effondrement peut avoir des causes extérieures à la propre campagne de LR à ces élections, en particulier dans l’hystérisation du débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen qui a particulièrement touché les électeurs LR sommés de choisir entre l’un ou l’autre dans une optique (stupide ici car c’est un scrutin à un tour) de "vote utile".

Dès 2012, j’ai imaginé ce risque que courait l’UMP/LR de se retrouver en position d’un parti centriste entre un FN/RN imposant et (à l’époque, je n’avais pas imaginé la survenue de LREM) un pôle de centre gauche européen de type Matteo Renzi. Cette position centriste (et pas centrale), fort inconfortable, paradoxalement, semble destinée à un arroseur arrosé (l’UMP avait souvent été portée à la condescendance pour les partis centristes, UDF, MoDem, UDI, etc.). Voilà donc ce parti pris dans le piège tendu par le RN et LREM.


C’est une grosse surprise car la question était de savoir si LR pouvait atteindre 15% ou pas, or, il est bien en deçà de 10%, ce qui est un désastre électoral majeur pour LR. Et cet effondrement a des raisons d’être durable : l’absence de leaders encore en capacité d’avenir dans ce parti est fatale. Le leadership de Laurent Wauquiez va être contesté mais en l’absence de leader de rechange (du reste, comme en décembre 2017), cette contestation sera probablement molle et sans conséquence.

On voit quand même poindre un nouveau leader. Sur BFM-TV dès le 26 mai 2019, le nouveau député européen (élu de justesse, 7e sur 8 élus) Geoffroy Didier a déjà lancé un appel pour sortir LR d’une position conservatrice qui lui serait fatale dans les prochaines années, en proposant une plus grande ouverture sociétale.


Cinquième surprise : l’effondrement de la liste France insoumise

On pensait que la liste menée par Manon Aubry (qui n’a pas démérité auprès des militants de l’ultragauche) était en compétition avec la liste écologiste et finalement, elle se retrouve au même niveau que la liste socialiste de Raphaël Glucksmann. La liste FI n’a en effet obtenu que 6,31% des voix et seulement 6 sièges.

C’est une sévère défaite pour Jean-Luc Mélenchon qu’on ne peut expliquer que par le contresens total qu’il a fait dans son analyse sur la crise des gilets jaunes alors que ce mouvement serait plus proche du poujadisme que du grand soir. Passer de 19% à 6% en deux ans, c’est montrer aussi une incapacité à tenir durablement un mouvement. C’est, selon moi, une excellente chose que l’hypothèque Mélenchon soit ainsi levée : l’imposture a été comprise par les électeurs. On ne peut pas faire campagne contre le système et avoir été soi-même pendant quarante ans l’un des représentants les plus profiteurs de ce système.


Sixième surprise : la résistance de la liste socialiste

Atteignant à peu près le même niveau que la liste FI, la liste PS menée par Raphaël Glucksmann a, lui, permis un petit répit avant la mort définitive du Parti socialiste, avec 6,19% des voix et 6 sièges. Les sondages avaient placé cette liste dans les dernières semaines en dessous du seuil de 5% permettant d’avoir des élus. Ses électeurs fidèles ont voulu faire de l’acharnement thérapeutique sur le PS en lui conservant le score de l’élection présidentielle, de quoi réjouir les éléphants du PS qui ont fait le forcing tardivement pour sauver ce parti en déliquescence (Martine Aubry, François Hollande, Lionel Jospin, etc.).

Cela ne signifie cependant pas un avenir rose pour le parti de la rose. La concurrence avec LREM et FI reste forte et la boutique électorale de Benoît Hamon n’est pas négligeable, avec 3,27% des voix. Au même titre que le RN a obtenu une victoire symbolique en se plaçant en première place, le PS a sauvé l’honneur en dépassant le seuil de 5% et en obtenant des élus.

On peut cependant être assuré qu’avec l’effondrement de LR et la confirmation de l’effondrement du PS engagé dès 2017, le paysage politique ne se clivera plus entre LR et PS dans un avenir proche et aussi probablement lointain.




La liste UDI menée par Jean-Christophe Lagarde

En recueillant 2,50% (plus que le PCF !), la liste UDI a obtenu un résultat honorable même si elle n’a pas franchi le seuil pour obtenir des sièges. Sa campagne fut dynamique et surtout, ses propositions européennes originales et créatives. C’est ce qu’a exprimé dès le 26 mai 2019 son directeur de campagne, le sénateur Olivier Henno : « Ce soir, nous sommes partagés entre le sentiment de déception et celui de fierté. (…) Les graines que nous avons collectivement plantées inaugurent des récoltes fécondes aux municipales en 2020, aux départementales en 2021 et aux présidentielle et législatives de 2022. ».

Toutefois, je reste persuadé que la stratégie isolationniste de l’UDI est suicidaire dans le contexte politique actuel : l’alliance avec LREM paraît d’autant plus évidente et sage que leurs préoccupations européennes sont communes.


La gauche orpheline

Le total gauche de ce scrutin reste très faible : 19,04% ! 32,51% si l’on prend en compte la liste EELV, ce qui reste toujours très faible. Incontestablement, le corps électoral a déplacé l’échiquier politique vers la droite.

Du reste, d’autres listes d’ultragauche sont aussi des espèces en voie de disparition : la liste PCF menée par Ian Brossat n’a obtenu que 2,49%, ce qui prouve que même dans un scrutin proportionnel, les communistes ne peuvent plus avoir de sièges sans alliance avec d’autres partis, et la liste LO menée par Nathalie Arthaud a obtenu le très faible score de 0,78%.

Comme l’avait imaginé François Bayrou dès 1995, lorsqu’il avait renommé le CDS en "Force démocrate" puis en 2007 MoDem ("Mouvement démocrate") pour faire "Parti démocrate" au sens américain du terme, face à des "républicains" qu’était l’UMP (devenue ensuite, justement, "Les Républicains"), c’est bien un parti centriste (LREM) qui se retrouve en position de gauche (progressiste) face à un parti de droite, en fait, d’ultradroite, le RN (François Bayrou n’avait alors pas imaginé la disparition de l’UMP).

Il sera très difficile aux deux anciens partis gouvernementaux, LR et le PS, de rompre ce nouveau clivage. Seuls, les écologistes pourraient le faire en proposant une autre alternative (pro- ou anti-lutte contre le changement climatique).


Les autres petites listes

Les "petites listes", odieusement appelées ainsi parce qu’elles compteraient pour du beurre (ce qui est le cas dans la répartition des sièges à pourvoir), ont cependant fait globalement un peu moins de 20% des suffrages exprimés, ce qui n’est pas négligeable et explique en partie les faibles scores réalisés par les "grandes listes", tous partis confondus.

Cela reste du domaine anecdotique, mais il est intéressant de fouiner quelques données à ce sujet. Par exemple, sans doute resteront-il présents dans le débat public parce qu’il ont besoin de vivre de leur écho médiatique, mais politiquement, du moins, électoralement, on peut affirmer sans l’ombre d’un doute que Nicolas Dupont-Aignan (avec 3,51% au lieu des 8% annoncés dans certains sondages de novembre 2018) et Florian Philippot (un misérable 0,65% !) ne compteront plus dans le paysage politique si jamais ils ont compté un jour.

Quant à elle, la force politique de François Asselineau est en plein essor : sa liste est parvenue à franchir le seuil des 1%, avec 1,17% ! C’est deux fois moins que le Parti animaliste (2,17%) mais c’est mieux qu’à la présidentielle de 2017. Encore un effort et la France entière votera pour cet énarque et ancien collaborateur de Charles Pasqua.

D’ailleurs, à ce propos, il est rassurant de remarquer que les partisans de la sortie de la France de l’Union Européenne ne représentent que 1,82% des suffrages exprimés (liste Philippot et liste Asselineai). Cela montre au moins la grande lucidité des électeurs français.

Parmi les autres microlistes, citons deux listes de gilets jaunes qui ont confirmé leur inexistence politique : la liste Alliance jaune menée par Francis Lalanne, déjà habitué aux gifles électorales, n’a obtenu que 0,54% et celle de Christophe Chalençon est placée en avant-avant-dernière position avec 0,0094% ! J’ai dû prendre les troisième et quatrième décimales pour la comparer à l’avant-dernière liste, celle de la Ligne claire, menée par Renaud Camus, qui a obtenu encore moins, seulement 0,0083%. Enfin, la liste royaliste (Alliance royale) a obtenu 0,0150% des voix, celle du Parti pirate 0,14% (dix fois plus) et celle de l’Union des démocrates musulmans français 0,13%.

J’évoquerai dans un autre article les résultats de ces élections européennes à l’échelle européenne et leurs conséquences sur le fonctionnement du Parlement Européen.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (27 mai 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Européennes 2019 (5) : les six surprises françaises du scrutin du 26 mai 2019.
Les résultats officiels des élections européennes du 26 mai 2019 en France (Ministère de l'Intérieur).
Ce que propose l’UDI pour les élections européennes de 2019.
François-Xavier Bellamy.
Nathalie Loiseau.
Marine Le Pen.
Européennes 2019 (4) : les enjeux du scrutin du 26 mai 2019.
Européennes 2019 (3) : l’Union Européenne est-elle démocratique ?
À quoi pense Nathalie Loiseau ?
La Vaine Le Pen.
Européennes 2019 (2) : enfin, la campagne commence !
Programme de la liste Renaissance (LREM) pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste Les Républicains pour les élections européennes de 2019 (à télécharger).
Programme de la liste UDI pour les élections européennes de 2019.
Michel Barnier, pas très loin de la Présidence de la Commission Européenne.
Le testament européen de Jean-Claude Juncker.
Européennes 2019 (1) : la France des Douze ?
Le retour aux listes nationales aux élections européennes (2 décembre 2017).
Jean Monnet.
Emmanuel Macron à la conquête des peuples européens.
Le programme du CNR.
Discours de Robert Schuman le 9 mai 1950 au Salon de l’Horloge à Paris (texte intégral).


 


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