Face à SpaceX+Boeing, la double riposte européenne l’emporte !

par Laurent Simon
mercredi 20 août 2014

Space-X et Boeing avaient gagné la première manche, en signant deux contrats de lancement de satellites électriques construits par Boeing.

La riposte franco-européenne a été rapide et efficace. Et elle vient de déboucher sur un deuxième succès Airbus Defence and Space en matière de satellite électrique, mais cette fois en valorisant le développement (en cours) d'une nouvelle coiffe pour Ariane 5 !

L'irruption de Space-X sur le marché international...

La start-up américaine Space-X devient vraiment dangereuse pour le lanceur européen Ariane, qui détient depuis des décennies environ 50% du marché mondial des satellites commerciaux.

Le concurrent principal actuel d'Ariane 5 était jusqu'à présent le lanceur Proton. qui peut mettre un satellite de 6t en orbite de transfert (GTO), pour une orbite géostationnaire à 36 000 km. De son côté, Ariane 5 peut satelliser une masse d'environ 9,6 t, la plupart du temps lors d'un lancement double, par exemple d'un gros satellite de 6t et d'un petit d'environ 3t.

Car les sociétés états-uniennes Boeing et Lockheed se sont retirées de la compétition internationale, leurs lanceurs Delta II, Delta IV et Atlas V étant trop chers. Elles ont créé la co-entreprise United Launch Alliance, pour pour lancer seulement les satellites institutionnels des Etats Unis, militaires en particulier.

Après ses premiers échecs, inévitables, les succès des lancements de Space-X créent une nouvelle concurrence, pour le moment surtout pour les petits satellites (moins de 3,4 tonnes), et même assez petits (1.8 t) dans des lancements doubles. Car les compagnies opérateurs de satellites ne sont pas nombreuses à risquer de perdre un gros satellite, dont il faudrait beaucoup de temps pour construire un deuxième exemplaire.

... les premiers succès de Space-X, et de Boeing sur les satellites électriques...

Mais la société SES a fait confiance à Space-X, qui a mis sur orbite de transfert (GTO) son 1er satellite commercial le 3 décembre 2013 : le satellite SES 8 fait 3,170 tonne, et a une puissance de 5 kW. Le prix de lancement facturé par Space-X a été très inférieur à 60 millions de dollars [1]. C'était le deuxième lancement de la version Falcon 9 v1.1 .

SES a du coup averti Arianespace que désormais elle comptait faire appel à Arianespace et Space X en en deuxième, alors que jusqu'à présent SES s'appuyait sur Ariane 5 et Proton.

Il faut dire que Proton est en perte de vitesse, avec 6 échecs sur 6 ans, ce qui contraste bien sûr avec les 11 ans ininterrompus de succès pour Arianespace (y compris pour Soyouz et Vega), et près de 60 tirs réussis d'affillée pour Ariane 5.

Dans "Satellites électriques : la France et l’Europe qui gagnent  !", nous avons vu que non seulement Space-X casse les prix du lancement, au moins temporairement pour obtenir ses premiers contrats, mais aussi que Boeing s'est associée à elle dès 2012 pour faire une offre conjointe fabrication + lancement de (petits) satellites électriques.

Et cette offre Boeing+Space-X a donc débouché sur deux succès commerciaux, avec deux lancements doubles, de 2 x 1.8 t, pour les opérateurs Satmex et ABS (ABS 3A et Satmex 7, puis ABS 2A et Satmex 9).

... la riposte franco européenne en 2 temps, 3 mouvements...

Les acteurs français et européenns du spatial ne pouvaient rester sans répondre, et la riposte franco-européenne s'est faite en deux temps :

1. rendre possible une offre fabrication - lancement de satellites électriques, par des actions franco-européennes dès la fin 2012 :

2. rendre en 2014 cette offre attractive, au niveau des prix de lancement : l'offre conjointe Ariane 5 + Airbus Defence and Space pour Eutelsat172B aurait finalement été moins chère que l'offre faite autour de Space X, dont les prix de lancement sont pourtant très bas.

... couronnée par un premier succès avec le satellite Eutelsat 172 B !

Cette démarche conjointe Arianespace - Airbus Defence and Space l'a donc emporté, le 31 juillet 2014, auprès d'un opérateur majeur de télécommunications, Eutelsat.

« Nous avons acheté un package auprès d’Airbus et d’Arianespace qui nous ont fait une offre extrêmement compétitive et optimisée en terme de rapport qualité-prix », souligne le PDG de Eutelsat. . [3]

Mais ce n'est pas tout, «  Airbus nous a garanti que le satellite mettrait 4 mois pour réaliser son transfert à poste, ce qui est rapide pour la propulsion électrique », précise Michel de Rosen. Car les satellites tout électriques mettent beaucoup plus de temps pour atteindre leur orbite finale géostationnaire, que les satellites conventionnels (environ 10 jours).

Bref, Airbus Space Systems et Arianespace ont démontré qu’ils savaient réagir et gagner face aux satellites de électriques de Boeing optimisés pour voler à bord du Falcon 9.

Notons d'ailleurs que via l'opérateur mexicain Satmex, Eutelsat a en outre deux autres satellites tout électrique en cours de construction chez Boeing. Ils seront lancés par SpaceX et son Falcon 9. Et mettront huit mois pour arriver à poste. [4]


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