Grèce : 3ème plan, toujours la même impasse

par Laurent Herblay
mercredi 12 août 2015

Hier, la Grèce et ses créanciers sont parvenus à un accord pour un troisième mémorandum, portant sur le prêt de 85 milliards d’euros supplémentaires à Athènes. Mais pourquoi ce plan, qui ressemble beaucoup à ses prédécesseurs, pourrait réussir là où les précédents ont échoué ?

 
Schéma de Ponzi austéritaire
 
Quand on prend un peu de recul, comment de ne pas être choqué par ce nouveau plan ? La Grèce ne parvient pas à rembourser 320 milliards de dettes : pas de problème, ses créanciers européens décident de lui en prêter 85 milliards de plus, sans la moindre restructuration. Mais ainsi, Athènes et ses créanciers se sont mis d’accord pour alourdir de plus de 25% une dette déjà trop lourde ! Comment croire que la Grèce pourra rembourser ? Déjà, en 2010, comme en 2012, comme de nombreux autres commentateurs, j’avais écrit qu’Athènes ne pourrait pas rembourser sa dette, que les hypothèses des plans étaient irréalistes et que nous aboutirions soit à un nouveau plan, soit à un défaut.
 
Nous restons exactement dans la même logique. On empile toujours plus de dettes sur le dos des Grecs alors que les montants actuels sont déjà trop lourds pour eux. Pire, la logique austéritaire subsiste puisque le solde budgétaire primaire doit passer de -0,25% du PIB cette année, avec la prise en compte d’un recul du PIB supérieur à 2%, à 3,5% en 2018 ! En trois ans, la Grèce, qui a déjà réalisé l’ajustement budgétaire le plus important de l’UE avec le Portugal, doit encore faire des efforts de près de 4 points du PIB, ce qui, selon le FMI, devrait provoquer un recul du PIB compris entre 4 et 6 points. Et pour un pays dont la dette pèsera 200% du PIB, cela représente un alourdissement de 10 points !
 
Sauvetage des créanciers et pas d’Athènes
 
Romaric Godin, le meilleur journaliste pour la couverture des évènements Grecs, se demande s’il ne s’agit pas d’un retour à la réalité des créanciers. Il souligne que les objectifs de soldes budgétaires pour 2015 et 2016 ont été revus à la baisse : -0,25% en 2015 contre 1% et 0,5% en 2016 contre 2%. Mais il note que les objectifs pour 2017 et 2018 restent élevés : 1,75% et 3,5% (contre 3 et 4%). Cependant, il conclut qu’ils « ressemblent davantage à une opération de communication permettant aux créanciers de ne pas perdre la face. Leur perspective est encore lointaine et, en fonction et, en fonction de l’évolution de la croissance, il sera toujours temps de les réviser à des niveaux appropriés  ».
 
Il note également que « la liste des 35 mesures prioritaires réclamées par les institutions, pose, elle, un vrai problème. L’essentiel de ces mesures est contraire au programme du gouvernement  ». Ce faisant, je suis un peu plus sévère que lui car il me semble que la logique austéritaire est à peine adoucie, elle n’est qu’ajustée à la réalité récente, sans la moindre prise en compte des résultats désastreux et inhumaines des plans des années passées. Et ce faisant, ce mémorandum est surtout le moyen pour les créanciers de passer les prochaines échéances électorales sans nouvelle crise Grecque (si la situation tient), ne faisant que repousser pour plus tard une échéance funeste, qui viendra tôt ou tard.
 
Ce 3ème plan de 85 milliards d’euros est bien un nouvel exemple effarant de la folie de cette union monétaire qui pousse des dirigeants à persister à ce point dans l’erreur, au prix de souffrances monstrueuses en Grèce. Il est malheureux que les Grecs persistent eux aussi dans l’erreur.

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