Bien sûr, l’Union Européenne n’explique pas tout. L’identité catalane existe depuis des siècles et la volonté d’indépendance de l’Espagne n’est pas nouvelle. Mais, quand on prend un peu de recul, difficile de ne pas voir le rôle considérable joué par l’UE dans la promotion de cette idée d’indépendance, comme le montrent les sondages sur la volonté d’indépendance de la communauté.
Etat-nation amoindri et crise économique
Mais pour qui n’a pas la mémoire courte, il faut rappeler que la bulle immobilière espagnole est le produit direct de l’UE,
comme le soutenait le « prix Nobel d’économie » Paul Krugman dans son livre de 2012. La monnaie unique a fait converger les conditions de crédit dans la zone euro, et a produit un effondrement des taux d’intérêts et du coût de la construction en Espagne. La liberté de circulation des capitaux a permis un afflux massif et déraisonné d’argent, nourrissant une bulle immobilière extravagante, qu’il était impossible de restreindre dans un tel contexte, alors que
si l’Espagne avait gardé la peseta, non seulement, les taux auraient moins baissé, mais en plus, elle aurait pu les monter.
Dans la monnaie unique, c’est une politique monétaire taille unique qui s’impose à des pays très différents : même taux de change, même taux d’intérêt, même politique de monétisation, alors que les besoins sont très différents. Au début des années 2000, l’Espagne avait besoin d’une hausse des taux pour dégonfler la bulle immobilière,
mais comme l’Allemagne, lessivée par ses réformes économiques, était alors le pays malade de l’Europe, la BCE optait pour un compromis bancal : un taux trop élevé pour Berlin et trop faible pour Madrid.
Avec la peseta, et un contrôle des mouvements de capitaux, la bulle immobilière espagnole aurait pu être contenue et son explosion destructrice évitée…
Bien sûr, il ne faut pas nier l’importance de l’identité catalane, mais il ne faut pas non plus sous-estimer la force des liens presque millénaires du peuple espagnol. Et comment ne pas être attristé et interpellé par cet éloignement aussi rapide des catalans de l’Espagne, une évolution qui en dit long sur cette époque où les liens collectifs qui structuraient notre vie passent trop souvent au second plan ?