Italie, Allemagne : les braises de la crise de la zone euro se rallument

par Laurent Herblay
mardi 29 mai 2018

Déjà, la crise de la Grèce avait menacé la zone euro d’explosionEn l’absence de dirigeants prêts à franchir le Rubicon, des mesures exceptionnelles et une conjoncture plus arrangeante avaient permis de faire baisser la pression. Mais là, ce sont deux pays fondateurs où les braises se rallument, entre le nouveau gouvernement Italien et la réaction allemande aux propositions de Macron.

 

Ce château de cartes qui finira par s’effondrer
 
Bien sûr, la première faille est la nouvelle équipe au pouvoir à Rome. Encore une fois, un peuple européen a sanctionné les euro-oligo-libéraux qui étaient au pouvoir.Matteo Renzi, le Macron Italien, a été laminé, et une coalition a priori improbable entre les équivalents du FN et de la France Insoumise s’est constituée. Le programme est totalement en contradictions avec les traités européens, avec un plan de relance important, une politique migratoire très ferme et la demande faite à la BCE qu’elle efface 250 milliards de dettes du pays. Bien sûr, les journaux comme le Monde sont horrifiés par ce programme, qui est pourtant très proche du programme mis en place au Japon par Shinzo Abe.
 
Aussi contradictoire soit-il avec les traités européens, ce programme a démontré sa pertinence au Japon, qui se désendette à marche forcée avec l’appui de sa banque centrale, et a relancé son économie en sortant de la déflation. Et surtout, le cas Italien montre à nouveau que le corset des traités européens n’a pour autre objectif que mettre sous camisole les démocraties membres et empêcher les peuples et ceux qui les gouvernent de mener les politiques qu’ils souhaitent. Si l’Italie veut aller dans ce sens, rien ne devrait l’en empêcher. Après, toute la question sera de savoir si le M5S et la Lega seront les Tsipras de l’Italie ou s’ils oseront se saisir à nouveau du pouvoir que l’UE leur refuse.
 
Le cas Italien est plus complexe que le cas Grec car les sommes en jeu ne sont pas les mêmes. La dette publique italienne est la première en valeur de la zone euro et tout mouvement des marchés pourrait précipiter une crise qui imposera un choix, dans un sens ou dans l’autre. Jacques Sapir montre dans un papier passionnant que la situation en Italie est propice à un renversement de l’UE, avec les économistes anti-euro entrés au Sénat et la matrice très souverainiste de la majorité qui se dessine. La remontée des taux Italiens ne prête pas à conséquence pour le moment, mais le programme du gouvernement est une véritable bombe à retardement pour l’Union Européenne.
 
Qui plus est, les Allemands ne sont pas vraiment dans un mode compréhensif. Le discours extravagant de Macron à Aix-La-Chapelle n’a pas seulement fait un flop, mais il a provoqué un vif rejet, trop souvent ignoré par nos média. Car après Angela Merkel, 154 économistes Allemands ont pris la peine de signer une tribune dans la FAZ (le Monde local) pour dénoncer les idées du président Français. L’Allemagne refuse tout partage de responsabilité, qu’elle prend, à raison, pour le risque de devoir payer pour Rome, Madrid, voir Paris demainrefusant de « récompenser la mauvaise conduite (ou) la mutualisation des dettes  », et préconisant une sortie de l’euro pour les mauvais élèves.
 
 
Bref, dans cette deuxième quinzaine de mai 2018, les prémices d’une possible crise finale de la zone euro se sont mises en place. Car Berlin refusera de payer plus pour sauver une monnaie unique qu’elle n’aime pas (une partie des 154 étaient contre sa mise en place). Pendant ce temps, la France de Macron continue à se bercer d’illusions. Normal quand on est totalement coupé de la réalité…

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