L’austérité, sans espoir de jours meilleurs, n’est pas viable pour les peuples

par Martin BERNARD
vendredi 16 novembre 2012

Un très bel article du journaliste Michael Marder, daté du 15 novembre, publié sur le site du journal Suisse Le Temps et intitulé « La troïka impose des sacrifices sans offrir d’espoir [1] », lance l’idée que les peuples ne consentent à se soumettre au sacrifice que lorsqu’il y a l’espoir que ce sacrifice puisse déboucher sur une amélioration de leur état et de celui de la société en général.

L’auteur invoque notamment l’importance du passé religieux du continent européen pour expliquer la faculté qu’ont ses citoyens à se serrer la ceinture en vue de jours meilleurs. Dans la notion du « contrat social » énoncée par Rousseau, les citoyens acceptent en effet de perdre une partie de leurs libertés au profit de la collectivité et de se sacrifier pour le bonheur commun. Mais en aucun cas ils n’acceptent de restrictions si les perspectives futures ne leur sont un tant soit peu favorables. Pour l’instant, ce n’est pas le cas, leur seul horizon étant les restrictions budgétaires et les plans d’austérités mis en place par la troïka (FMI, Commission Européenne, Banque Centrale Européenne).

Ainsi, le pessimisme régnant dans les pays du sud (Grèce, Italie, Espagne, Portugal) est causé en grande partie par le fait qu’aucune lueur ne semble poindre au bout du tunnel, la fin de crise étant sans cesse repoussée et les plans d’austérité ne semblant pas faire d’effets sur la situation socio-économique des pays. De leur côté, les élites intellectuelles et politiques ne font rien pour faire naître l’espoir dans le cœur des populations. Jacques Attali n’hésitait en effet pas, fin novembre 2011 dans le quotidien 20 minutes, à annoncer la probable destruction de l’euro. Il répète depuis à l’envie sur les différents plateaux de télévision sur lesquelles il est convié que le pire est encore à venir. Dans la même veine, le financier et philanthrope George Soros déclarait en Juin dernier que « si l’Union européenne ne trouve pas rapidement une solution, elle explosera d’ici à trois mois. » ses prévisions ne semblent pas s’être réalisées. Il reste que ces discours pessimistes n’encouragent guère les gens à se réjouir pour le futur.

S’ajoute à cela un profond sentiment d’injustice causé par l’impression de devoir compenser par leurs souffrance ce qui fut causé par certains pontes de la finances ; et de devoir réparer les pots cassés pendant que ces même responsables s’en mettent plein les poches, n’hésitant pas à licencier en masse pour couper dans les dépenses. En somme, l’effort collectif demandé aux peuples ne semble pas devoir concerner les principaux acteurs de l’économie mondiale. Car, comme le dit Michael Marder :

« Tandis que les citoyens européens sont appelés à faire des sacrifices quant à leur niveau de vie – voire à leurs moyens de subsistance – pour le bien de l’économie "nationales", les multinationales sont en plein essor. »

Jusqu’à quel point les peuples sont ils capables de subir ces mesures d’austérités sans recevoir de réelles contreparties en échange ? Jusqu’ou les restrictions peuvent-elles aller avant que la population ne se mettent sérieusement à s’agiter et à se rebeller ? Dans sa récente conférence de presse, François Hollande évoqua ces questions peut souvent discutées, en se demandant si il y avait des limites à ce que les gens étaient capables d’endurer. Certains, dans la mouvance de gauche, évoquent même la perspective d’une grève générale au niveau européen, qui serait organisée par la Confédération européenne des syndicats. On est encore loin de cela, mais qui c’est…

Face à ce constat, Marder conclut son article en précisant qu’ « il est crucial que les dirigeants européens nourrissent leurs citoyens d’une espérance renouvelée. Il en va de la légitimité d’une Europe "post-nationale", reposant sur une obligation de la part de l’UE, inscrite dans le traité de Lisbonne, de promouvoir le bien-être de sa population. »


[1] http://www.letemps.ch/Page/Uuid/037a8832-2f32-11e2-b918-0a045b530a33|0#.UKUnfGctMVo (15.11.2012)


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