L’Europe : bonnet d’âne de la régulation financière

par Laurent Herblay
samedi 29 mars 2014

La dureté de la crise et la concentration du secteur dans des parasites fiscaux devraient pousser nos dirigeants à des réformes radicales. Las, ils se mettent d’accord sur une union banciare chétive et hors sujet et croient bon de relancer la titrisation qui a mené au désastre des subprimes.

Créer une nouvelle bulle de crédit
 
Michel Barnier, dont l’image avait grandi suite à sa passe d’armes avec Christian Noyer, de la Banque de France, au sujet de la réglementation financière, vient de faire une déclaration hallucinante. En effet, la croissance de la zone euro est encalminée par la diminution du volume de crédits au secteur privé (en baisse de 2,2% sur un an selon la BCE à fin février) quand Londres retrouve des couleurs avec l’envolée du crédit bancaire. Même si nos dirigeants devraient prendre en compte le caractère parfois artificiel et dangereux des bulles de crédit, le commissaire européen a fait son choix.
 
Il a déclaré que la titrisation « a le potentiel de débloquer des sources de financements supplémentaires pour l’économie réelle », notant que « beaucoup d’actions ont été menées par les autorités pour mieux standardiser et rendre plus transparentes les transactions titrisées  ». Si la première partie est juste (en vendant la créance qu’elle a accordé, une banque gagne une nouvelle capacité à prêter), en revanche, la seconde est plus douteuse sachant que nos hiérarques européens osent affirmer que l’union bancaire nous protège d’une nouvelle crise financière alors même qu’il n’y aura création que d’un fonds de 55 milliards d’euros en 2025, somme largement inférieure au coût de la crise.
 
Un criant manque de régulation

Nos dirigeants ne comprennent pas le vice fondamental de la titrisation. En vendant une créance qu’elle vient d’accorder, une banque n’a plus intérêt à s’assurer que le créancier pourra la rembourser à moyen terme. C’est exactement ce qui a déclenché la crise des subprimes aux Etats-Unis, où les banques prêtaient à tort ou à travers, s’abritant illusoirement derrière la vente des prêts ou d’illusoires assurances, comme si elles pouvaient totalement échapper aux conséquences de ces prêts délirants. Mais la commission voit ici sans doute le seul moyen de relancer l’économie à court terme. Il n’y a sans doute pas grand chose à attendre d’un aéropage venant en partie de parasites fiscaux…

En outre, elle peut d’abriter derrière le projet d’union bancaire, finalisée la semaine dernière. Mais après des ajustements dérisoires, il faut surtout voir le fait que créer un fonds de 55 milliards en 2025 est ridicule. Cette somme ne correspond même pas au plan portugais ou au premier plan grec. Et escompter l’absence de crise financière dans les 11 prochaines années est un pari audacieux. Bref, il est totalement effarant de constater à quel point les rares réponses à la crise financière en Europe sont hors sujet. On peut voir dans les réactions du président de la Banque de France et de Pierre Moscovici aux très timides propositions de la Commission la conclusion qu’il n’y a strictement rien à espérer…
 
Bref, non seulement les pays européens n’ont rien fait pour réguler la finance. Mais en plus, pour essayer de redresser la croissance du continent, ils sont prêts à utiliser les bâtons d’explosif de la titrisation. Conclusion, il faudra vraiment envoyer balayer ces incompétents pour s’en sortir.

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