L’Europe en route pour un cinquième élargissement

par Henry Moreigne
mardi 3 octobre 2006

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a annoncé mardi 26 septembre à Strasbourg que la Bulgarie et de la Roumanie sont en mesure d’entrer dans l’Union européenne au 1er janvier 2007. Un cinquième élargissement qui ne ferme pas, officiellement, la porte à des suivants. L’Union, faute de frontières naturelles, peine à trouver ses limites, alors que dans le même temps, la radicalisation de la vie politique dans les nouveaux Etats membres d’Europe centrale (Hongrie, Pologne et Slovaquie) inquiète le reste de l’Union.

Pour la première fois, ces inquiétudes semblent partagées par le président de la Commission européenne." Il n’y aura pas de nouvel élargissement sans réforme préalable des institutions", a-t-il affirmé, précisant "qu’un aménagement institutionnel doit précéder tout élargissement futur. C’est le moyen d’assurer que l’Union élargie fonctionnera d’une manière efficace et harmonieuse. " M. Barroso s’est toutefois défendu de préconiser une " pause " dans le processus d’élargissement.

Déclaration paravent, ou volonté réelle ? Daniel Cohn-Bendit, lui, a choisi. Les propos de M. Barroso ont suscité la colère du député européen, opposant à l’adhésion immédiate de la Bulgarie et de la Roumanie, qui n’a pas hésité à dénoncer la langue de bois du président de la Commission : " M. Barroso vient de nous faire une déclaration extraordinaire : pour la prochaine fois, il faudra une réforme institutionnelle. Nous avons dit cela quand on était dix [...], nous disons cela à vingt-cinq, et je vous promets qu’on dira cela à trente, trente-cinq, quarante, quarante-cinq. Il y en a assez de nous mentir comme cela. "

On peut en effet légitimement considérer que " trop d’Europe tue l’Europe" et que la dilution des valeurs et du socle commun a des limites. Rappelons qu’en 2004, l’Union a connu un élargissement sans précédent, avec l’arrivée de dix nouveaux Etats membres.
Depuis 2005, des négociations d’adhésion sont en cours avec la Croatie et la Turquie, alors qu’un processus de préadhésion a été engagé avec quatre autres pays des Balkans.

Face aux débordements politiques des nouveaux membres, les institutions européennes semblent désarmées, avec un parlement pléthorique, ingouvernable, et une absence d’exécutif démocratiquement désigné. Certes, le président de la Commission se présente en gardien du temple, chargé de rappeler aux gouvernements concernés (mais avec quels moyens coercitifs ?) les lignes rouges à ne pas dépasser, comme la remise en question de la peine de mort, ou les alliances de gouvernement avec l’extrême droite.

En dépit de taux de croissance enviables et d’une transition réussie vers l’économie de marché, les nouveaux adhérents d’Europe centrale laissent apparaître leur immaturité politique, héritée des années de communisme. Tout l’enjeu consistera à accompagner ces pays dans leur transition, sans tomber ou se faire accuser d’interventionnisme. Un suivi rendu d’autant plus nécessaire que l’adhésion à l’euro demandera de nouveaux efforts.


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