L’Europe pourrait mourir, l’Allemagne l’aurait tuée

par Tzecoatl
jeudi 24 mai 2012

Il n'y a plus vraiment de lutte des classes en économie, mais deux calculs de la part des agents économiques : celui qui considère ses intérêts directs et celui qui considère ses intérêts indirects, c'est à dire également les intérêts de ses partenaires.

Prenons le cas de l'Allemagne. C'est la seule grande gagnante de la mondialisation parmi les pays occidentaux. Ayant l'excellence de la production de machines-outils, peu lui importait que celles-ci soient achetées par des manufactures en Italie ou en Chine. L'ultra-libéralisme, à savoir le libre-échange de tout les dumpings, lui était favorable, car les économies émergentes constituaient de nouveaux marchés. Elle a par ailleurs choisi la modération salariale et sociale afin de préserver son industrie sur son sol, pendant que d'autres pays (la France) ont espéré récolter les fruits de l'enrichissement des pays émergents (va pour le tourisme et le luxe).

Mais voilà, les pays il n'y a pas si longtemps ateliers de l'Europe sont maintenant exsangues, le consommateur européen qui raffolait des produits du tiers-monde a mangé son pain blanc, et le social-clientélisme qui permettait de cacher la misère se voit chahuté par les marchés financiers sur la dette publique.

L'Allemagne a gagné, et à écouter les ténors de la CDU, elle a choisi de rompre le rang de l'harmonie européenne (vis-à-vis même des Barroso, Juncker, etc) afin de préserver ses intérêts directs, et bien évidemment mortifères pour le reste de l'Europe. 

Car qu'aurait l'Allemagne à gagner, des eurobonds, d'un pacte de croissance, voire oh sainte hérésie germanique, de modification du rôle de la banque centrale de Francfort ? Rien, économiquement elle aurait tout à perdre, mais politiquement tout à gagner, à savoir sauver l'UE, rien que cela.

Mais autant les pays euro-mediterranéens n'ont rien à espérer d'avoir ouvert leurs marchés à tout vent, à cause des délocalisations, des dumpings sociaux, environnementaux, fiscaux, autant l'Allemagne n'a rien à gagner économiquement d'aider le consommateur final, celui-ci étant désormais dans les marchés émergents. Les intérêts indirects, contrairement à Ford où bien payer ses salariés permettait d'écouler la production, se sont perdus hors d'Europe, noyés dans la mondialisation, et plus aucune prise en compte des intérêts du partenaire économique ne se justifie. Seul l'intérêt direct prime, expliquant la posture conservatrice de Merkel et des décideurs allemands.

L'Europe néo-libérale, en crise, entre le marteau des marchés financiers et l'enclume de la mondialisation ultra-libérale, n'est victime que de sa propre idéologie, montage intellectuel non pérenne, proné trop longtemps par ses élites.

Mais, quand bien même les différentes sensibilités politiques des grands pays de l'Europe ne semblent pas à même de profiter de la crise pour construire une Europe plus solidaire, le marché des devises ne se laisse pas compter, en affaiblissant l'euro (n'en déplaise à Berlin) et, par voie de conséquence, le poids des dettes publiques des états européens.


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