L’inquiétante dépendance énergétique européenne

par Henry Moreigne
mercredi 10 janvier 2007

La Commission européenne a rendu public le 10 janvier une série de propositions visant à améliorer le fonctionnement du secteur de l’énergie. Au moment où le Kremlin n’arrête pas de se rappeler au bon souvenir des Européens en n’hésitant pas à fermer ses pipes-lines, les eurocrates ont choisi de donner la priorité à la libéralisation du secteur énergétique, loin devant la sécurisation des approvisionnements.

C’est à croire que la Commission a été frappée par le syndrome byzantin. Alors que l’on assiste depuis un an à un bras de fer entre Moscou et ses anciens satellites dans lesquels transitent oléoducs et gazoducs, les Européens pourtant situés “tout au bout du tuyau” préfèrent s’inquiéter de la libéralisation d’un secteur qui a, jusqu’à présent, fait la preuve de son efficacité.

Le contexte est pourtant inquiétant. L’Union européenne apparaît comme un colosse aux pieds d’argile face au géant russe premier producteur mondial de gaz et deuxième producteur de pétrole. Cette faiblesse est renforcée par une absence de stratégie énergétique commune, chaque Etat membre privilégiant des sources différentes (gaz, pétrole, charbon ou nucléaire), et il est peu vraisemblable que la libéralisation concourre à clarifier la situation.

Quatre Etats membres de l’Union (Allemagne, Pologne, Hongrie et Slovaquie) ont déjà concrètement subi, avec des baisses d’approvisionnement, les conséquences des divergences entre la Russie et ses voisins sur le contrôle de l’acheminement des hydrocarbures. Que se passerait-il demain en cas de situation nettement plus tendue et que vaudraient alors les accords commerciaux passés avec la Russie ? Personne n’ose l’imaginer. Les schémas permettant de diminuer la dépendance aux hydrocarbures russes ne sont pas légion. Selon Angela Merkel, la chancelière allemande, il conviendrait “d’économiser l’énergie, de se tourner vers les énergies renouvelables, et naturellement aussi de réfléchir aux conséquences de la sortie du nucléaire”. Intéressant, mais insuffisant. Une solution plus concrète a été envisagée. Son nom : Nabucco. Un pipeline de 3400 kilomètres, destiné à acheminer le gaz dans un premier temps, d’Asie centrale et plus tard, d’Iran, jusqu’en Autriche. Le projet est concurrent de celui mené par le gazier russe Gazprom (le Nord Stream), qui doit passer sous la Baltique pour livrer le gaz de Sibérie à l’Europe en évitant la Biélorussie, les Pays baltes et la Pologne, mais aussi au Sud avec un tracé très proche de celui de Nabucco. Pas sûr, pourtant, que Nabucco voie le jour. Avec un coût de réalisation de 4,6 milliards d’euros, les investisseurs attendent des garanties sur le niveau des réserves de la région de la Caspienne et sur le raccordement futur de l’Iran.

Autre piste : la perspective de signature d’un nouvel accord de coopération entre l’Union européenne et la Russie, dans lequel l’énergie tiendrait une place centrale. Un pari sur le niveau de crédit que l’on peut accorder à la signature russe, question essentielle quand elle concerne un producteur qui contribue actuellement au quart des approvisionnements en gaz de l’Union.


Lire l'article complet, et les commentaires