L’instauration du SMIC inquiète les Allemands

par Juliette
mercredi 11 décembre 2013

L’annonce effectuée par la Chancelière le 21 novembre dernier sur l’instauration du SMIC en Allemagne suscite de vifs débats.

Une des principales conditions du SPD

A l’encontre de la plupart des pays membres de l’Union européenne, l’Allemagne ne dispose pas encore d’un texte de Loi précis sur le SMIC. Pour se mettre au diapason des autres nations et faciliter les négociations avec le SPD (Parti social-démocrate), Angela Merkel s'est résolue à instaurer un salaire minimum légal. Il s’agit d’une décision incontournable pour la Chancelière si elle veut mener à terme les pourparlers avec les sociaux-démocrates pour former un gouvernement de coalition.

L’instauration d’un SMIC de 8,50 euros/heure représente une des principales conditions du SPD. Afin que les discussions aboutissent, la Chancelière a fait une concession sur ce volet. En contrepartie, le SPD devrait renoncer à son projet d’augmenter les impôts pour les grosses fortunes. Ni la date de mise en œuvre effective du SMIC, ni les détails y afférents n’ont été communiqués. Le montant de ce salaire minimum ne sera pas fixé par une Loi. Le CDU privilégie la piste des négociations entre les partenaires sociaux de chaque segment de l’économie. Une commission composée de syndicats et d’employeurs sera mise en place pour trancher sur le sujet.

Inquiétude des institutions économiques et du patronat

Les analystes s’inquiètent des impacts de cette instauration d’un SMIC sur l’économie du pays. En effet, 6 millions de travailleurs gagnent moins de 8,50 euros/heure dont 2 millions touchent un salaire inférieur à 5 euros/heure. Certaines institutions économiques et l’ensemble du patronat allemand estiment que cette mesure pourrait nuire à l’économie. Un million de postes pourraient être supprimés.

Selon le DIW, une institution spécialisée dans la recherche économique, la mise en place de ce SMIC engendrerait une augmentation de 35% du coût du travail pour cette marge des salariés composés en majorité de femmes et d'employés non qualifiés. La disposition affecterait surtout les travailleurs indépendants qui opèrent dans le secteur des services, comme les restaurants et les hôtels, les coiffeurs, les services d’aide à domicile et de nettoyage et les chauffeurs de taxi. Les petites entreprises ne seraient pas elles non plus épargnées. Le contexte favoriserait le travail au noir.

Inquiétude des syndicats

L’instauration d’un SMIC inquiète également les syndicats. Selon certains économistes qui évoluent dans les milieux proches des fédérations de travailleurs, l’impact de la mesure serait insignifiant sur la rémunération nette des salariés concernés. Leurs revenus n’augmenteront que de 900 euros par an compte tenu de la hausse de l’impôt sur le revenu et des cotisations sociales.

De leur côté, les prestations sociales dont bénéficient les bas salaires seront revues à la baisse, leur calcul étant basé sur le nombre d’individus composant le foyer. L’introduction du SMIC ne profiterait ainsi au final qu’aux couples sans enfants et aux célibataires vivant avec rémunération très modeste, soit environ 100.000 employés. La situation pourrait même se dégrader pour les autres travailleurs, car les entreprises pourraient leur proposer des heures supplémentaires non payées, mais présentées sous une forme déguisée.

Les syndicats appréhendent aussi une perte d’influence. Ils craignent qu’à l’avenir leurs actions ne devront se focaliser que sur la hausse du SMIC, alors que leur vocation consiste à négocier les accroissements de salaire avec le patronat. Toute revendication relative à une augmentation de 4 ou 6% de la rémunération des travailleurs pourrait ainsi paraître indécente, or c’était tout à fait normal auparavant.


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