L’UE facteur de succès d’Airbus, pas le ’souverainisme’ ! (1)

par Laurent Simon
samedi 18 mai 2019

Airbus s'est imposée grâce à des innovations majeures, et bénéficie de la concurrence, mais aussi du Marché unique (UE). Et quand D. Trump l'attaque, c'est la Commission Européenne qui répond.

Certains partis, eurosceptiques ou europhobes, affirment, par exemple dans cette campagne européenne, que :

Qu'en est-il exactement ? S'il est incontestable :

il est tout aussi clair que Airbus a bénéficié et bénéficie encore beaucoup de l'UE :

 1. Airbus, créé pour atteindre une masse critique, bénéficie aussi grandement du Marché unique

"Le parti de Marine Le Pen met en avant l'exemple d'Airbus. Voilà bien une « coopération librement consentie ». En effet, mais la situation qui a présidé à la constitution d'Airbus était tout autre. Il faut revenir à ce qu'était l'aviation européenne dans les années 1960.
À l'époque, trois constructeurs américains – Douglas, Boeing et Lockheed – dominent. Les Européens sont fragmentés en une quinzaine d'avionneurs de petite taille, incapables de lutter.

Parmi eux, Sud-Aviation, Shorts, Hawker Siddeley, Bölkow… Air France a certes créé la Caravelle à partir de 1955 à 260 exemplaires, mais les Américains de Boeing surpassent tout le monde avec 1 000 exemplaires de leurs 707, 727 et 737, tout comme le DC9 de McDonnell Douglas. La Caravelle n'est pas rentable.

Les Européens créent Airbus pour atteindre la masse critique.


Le marché commun permet ensuite la fluidité de l'assemblage des différentes pièces d'Airbus à travers plusieurs sites européens sans être entravé par les barrières douanières...
Les deux éléments ici se complètent.

C'est ce schéma que la France et l'Allemagne, et avec elles plusieurs pays européens, reprennent aujourd'hui pour créer un « Airbus de la batterie électrique »...
C'est toujours la même idée : créer une entreprise de taille critique, cette fois contre l'industrie asiatique qui pèse 85 % du marché.
Autrement dit, l'Union européenne n'interdit pas la coopération industrielle, ne serait-ce que pour créer les conditions d'une concurrence..."  [3]

D'ailleurs, les avantages du Marché unique ne se limitent pas à la fluidité des échanges de marchandises, mais ils facilitent aussi les services inter pays de l'UE, ainsi que le déplacement des personnels, et des capitaux. 

Les 'souverainistes' n'en parlent pas, mais c'est essentiel aussi, et les peuples ne pourraient pas accepter de revenir en arrière sur de telles avancées, qui changent la vie quotidenne, et la vie des affaires.

2. Si Airbus s'est imposée, c'est grâce à une concurrence féroce transatlantique, et à des innovations majeures

Contrairement à ce que beaucoup pensent, le protectionnisme aurait été un frein majeur au développement d'Airbus !

En effet, si Airbus a pu s'imposer face à Boeing, alors que l'industrie européenne était éclatée, incapable de faire un avion qui se vende à plus de 250 exemplaires (c'était un nain face à 3 géants industriels outre atlantique), c'est grâce à la compétition mondiale, et en proposant des solutions très innovantes, créant des fantastiques économies pour les compagnies aériennes.

Et aussi en s'appuyant fortement sur la diversité européenne, par exemple sur le légendaire esprit d'organisation allemand, pour répartir la conception et la production des pièces entre les sociétés disséminées en plusieurs sites industriels, et pour organiser le transport des tronçons d'avion par avion spécial.

Si l'A320 a obtenu plus de la moitié du marché (et près de 60% récemment avec l'A320 NEO, vs le 737 Max), contre le 737 ultradominant, c'est grâce à des innovations sorties en 1985 que Boeing n'a toujours pas rattrapées, 35 ans après !!!
Ce qui d'ailleurs a contribué aux déboires actuels du 737 Max, qui n'a pas bénéficié pleinement des bonnes solutions du Boeing 777, pourtant sorti en 1995.
Bref, ce n'est pas en fermant les frontières, en se repliant, en allant vers du protectionnisme, que les pays européens pourront se développer au mieux, bien au contraire.

3. Quand D. Trump attaque Airbus, c'est l'UE qui répond, avec des mesures intégrant différents secteurs industriels

Le président américain Donald Trump avait récemment déclaré que Washington allait imposer des droits de douane sur 11 milliards de dollars (9,8 Mds €) de produits européens, au lendemain de la publication par son représentant au Commerce d'une liste de cibles potentielles de représailles américaines contre des aides publiques à Airbus

"La Commission européenne a dressé une liste de produits importés des Etats-Unis, représentant un total de 20 milliards d'euros, qui pourraient être frappés de droits de douanes élevés dans le cadre du conflit transatlantique concernant les subventions aux constructeurs aéronautiques, selon des diplomates européens.
... La Commission européens avait auparavant annoncé avoir commencé à préparer d'éventuelles représailles contre les subventions américaines accordées à Boeing tout en disant rester prête à la discussion.
Ces mesures européennes s'inscriraient dans le cadre de la plainte de l'UE auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant les subventions à Boeing" [4]

Mais le soutien d'une structure appropriée (la Commission Européenne), mutualisant les efforts juridiques des pays de l'Union Européenne, est également très important dans la guerre commerciale Boeing Airbus, déclenchée par Boeing auprès de l'OMC [5]  : là aussi, c'est la Commission Européenne qui soutient et défend formellement Airbus auprès de l'OMC.

La suite de l'article abordera la fusée Ariane, et montrera que l'approche 'souverainiste' avait déjà été tentée... avec 6 échecs sur 6 pour le lanceur Europa et Europa II !


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