La France peut-elle quitter l’Union Européenne ?

par emile wolf
vendredi 26 novembre 2010

Mécontents de n’avoir pu exprimer leur volonté par la voie du référendum, beaucoup de citoyens aphones souhaitent que la France quitte l’Union Européenne. Certains qui ne craignent aucune torture, ils votèrent Sarkozy et peuvent en supporter plus que d’autres, ont pris connaissance du traité de Lisbonne. Ils assurent, sans trop savoir, qu’il suffit d’appliquer l’article 50 de ce document portugais et l’affaire est dans le sac ! La France est sauvée.
 
Ouf enfin libres ! La France redevient prospère. Les « affaires » ne croisent plus à l’Horizon politique et la justice indépendante dynamite les réseaux de corruption occultes, une maladie, entre furoncles et hémorroïdes, qui parasite sièges parlementaires et portefeuilles ministériels.  
 
Déjà, le pôle emploi se désertifie. Les sans-abri investissent les pullmans à la bonne étoile. Les retraités doublent leur épargne sur le tapis vert des banques agricoles qui financent les patates bios. Nos bidasses, épinglés par les médailles, libèrent les Afghans de leur présence héroïque et l’Otan déplore notre départ. Renault et quelques autres réintègrent le clapier natal. Mon petit Liré, complice, ne parle plus de rien et ma chaumine savoure la douceur angevine revenue des vapeurs bruxelloises de léonard Misonne. Bref la France profonde retrouve l’âme que l’apprenti boucher lui avait confisquée.
 
Alors la fin du cauchemar est proche n’est-ce-pas ? Tac ! D’un coup d’ongle on décolle l’article 50 "post it" et le place sur le formulaire de sortie où il adhère à l’endroit adéquat. On le valide d’un coup de tampon administratif tricolore et la France dégage un budget de plus de 19 milliards pour faire brouter les vaches, multiplier les alevins de l’aquaculture et essaimer l’huitre japonaise au large d’Oléron. Le bonheur ! Le Bordeaux coule à flots au ministère de la Défense, les barriques de sang de retour de Kaboul classées secret défense rejoignent le recyclage.
 
Imaginez nos frontières qui réinstallent leurs barrières, nos douaniers qui retrouvent fouilles et déclarations, nos contrebandiers qui ne sont plus contraints de trafiquer du narcotique et du sans papiers pour faire plaisir aux Calabrais de Silvio. La république retrouve ses valeurs sans les Villepin, Chirac, Jospin, DSK, Aubry, Dupont Aignan, Cohn Bendit, j’en oublie… les meilleurs sans doute.
 
Nous voici, entre nous, avec nos idoles préférées, Olivier Cabanel, Papybom, Imhotep, Le Chat, Christian, nos lettrés de prédilection, Ariane Walter, Paul Villach, Amaury Wautremez, nos politiciens chéris, Boutin, Lepage, Asselinneau, Dume, notre sage bien elevé, Fergus. Enfin notre univers Agoravox aux senteurs de terroir d’Allain Jules préservé des ingérences et des diffamations comme si la liberté d’expression souveraine était revenue vierge de pollution.
 
Mais voilà ! A interroger les augures, les choses ne sont peut-être pas aussi simples . Voyons du côté du contrat estremadurien... L’article 50 que dit-il ?
 
« 1. Tout État membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles, de se retirer de l’Union.
 
2. L’État membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen. À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec cet État un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à l’article 218, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen.
 
3. Les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai.
 
4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen et du Conseil représentant l’État membre qui se retire ne participe ni aux délibérations ni aux décisions du Conseil européen et du Conseil qui le concernent… »
 
Le Conseil européen, qui rassemble les chefs d’état et de Gouvernement, ne se réunit pas tous les quinze jours. Il est prévu deux réunions par semestre à l’initiative du président (Van Rompuy). Toutefois ce dernier peut convoquer une réunion extraordinaire si nécessaire.
 
Les alinéas 2 et 3 limitent la liberté de mise en application de la décision de l’état sortant, ouvrant la porte à tous les accords possibles pour autant qu’en vertu de l’alinéa 3 de l’article 218 : « La Commission, ou le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité lorsque l’accord envisagé porte exclusivement ou principalement sur la politique étrangère et de sécurité commune, présente des recommandations au Conseil, qui adopte une décision autorisant l’ouverture des négociations et désignant, en fonction de la matière de l’accord envisagé, le négociateur ou le chef de l’équipe de négociation de l’Union. »
 
C’est en effet dans le cadre du Conseil (des ministres) et non du Conseil européen (chefs d’état et de gouvernement) que sera entériné l’accord et les conditions de retrait négocié. Toutefois l’état sortant ne participe ni aux débats ni aux décisions au sujet de l’accord de retrait.
 
Ceci présente l’avantage de disqualifier les députés européens de l’état sortant dont on peut craindre l’opposition unanime à tout accord négocié de retrait puisque leur carrière européenne est définitivement compromise si l’accord est adopté.
 
Un tel accord, en vertu des dispositions de l’alinéa 3 de l’article 218, est l’objet d’une négociation avec la Commission de l’Union Européenne ou le haut représentant de celle-ci, si l’accord envisagé porte principalement sur la sécurité commune. Toutes les formules de coopération sont envisageables. Il est donc bien délicat sans connaître les vœux du peuple de l’état sortant de supputer s’il faut, par exemple, tenter de conserver l’Euro, comme le Vatican et Monaco, ou réintroduire le franc pour devise, accepter la libre circulation des populations comme la Suisse, les accords concernant la Sécurité Sociale et la retraite, la coopération judiciaire, etc.
 
Un retrait total et immédiat de l’Union n’est donc pas envisageable, c’est un processus qui, fonction de l’accord final négocié, nécessite au bas mot un an voire beaucoup plus comme l’envisage l’alinéa 3 de l’article 50 du traité portugais.
 
Cette situation de «  régularisation  » intermédiaire, ne soustrait nullement l’état sortant à ses obligations financières et légales vis-à-vis de l’Union. Il continue à participer aux institutions et décisions de l’U.E. à l’exception des séances concernant l’accord de retrait. Il peut alors tomber sous le coup de toutes les sanctions en vigueur en cas de non respect de lois règlements et directives de l’Union (pacte de stabilité, application des actes législatifs, valeurs de l’Union, etc…). Sur ce point particulier il y a gros à parier qu’un état sortant ne remplissant pas les obligations du pacte de stabilité (déficit annuel maximum de 3% du PIB et dette globale maximum de 60% du même PIB) n’aurait guère de possibilité d’obtenir la clémence ou des délais pour parvenir à corriger le tir avant l’amende salée. D’autant que la France, n’a pas à attendre de compassion des autres états membres.
 
Notre Président bien aimé et son bluff maladif ont soutenu la politique de sévérité prônée par l’Allemagne pour faire croire à notre bonne gestion en truquant d’une manière ou d’une autre le bilan de l’état établi selon les normes U.E. Ne l’a-t-il pas fait, notamment, avec le « Grand Emprunt » de 35 milliards en 2010 prévu pour la recherche bouchant ainsi pour près de 2% de PIB de trou, tandis que notre dette globale (norme UE) dépasse déjà 60% du PIB ?
 
Le retrait risque donc du fait de notre lamentable situation économique de coûter beaucoup d’argent. A moins qu’il n’achève l’état en le mettant en faillite du fait de la perte de confiance des marchés financiers. Souvenons-nous qu’aujourd’hui plus de 70 % des Obligations assimilables (OAT) et de Bons du Trésor (BTAN et BTF) sont détenus par des non-résidents. Si ceux-ci voient leur placement en danger, ils en exigeront le rachat. Vous prévoyez la conséquence d’une telle décision. je ne m’y étends pas.
 
Voilà, succinctement, pour le volet européen du retrait, mais avant même de considérer celui-ci, il est un autre volet qui doit être réglé : la mise à jour de la Constitution, dont le titre 15 consacré à l’U.E doit être abrogé pour faire acte de retrait.
Ceci nécessite une révision constitutionnelle autant dire un référendum ou un Congrès pour décider de l’opportunité de sortir ou non de l’Union européenne. Sans cette modification constitutionnelle aucune notification d’intention ne saurait être légitime et prise en considération par l’Union Européenne.
 
En supplément, si un miracle se produit et que la France parvient, très rapidement, à retrouver sa souveraineté pleine et entière : il restera à modifier certains codes parmi lesquels ceux de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’électoral, celui de procédure pénale, du travail et de la Sécurité Sociale. Ces modifications peuvent faire l’objet d’une seule et même grande loi en fonction des accords avec l’Union Européenne. Il suffira d’appliquer les différents articles au code respectif auquel ils se rapportent.
 
Vous le comprenez ceux qui prônent aujourd’hui, à corps et à cris la sortie de l’Union européenne, voire de la monnaie européenne tel Monsieur Dupont Aignan, habitué de ce forum, choisissent très mal leur moment. Dans la conjoncture une telle décision précipiterait la catastrophe qui nous pend au nez du fait de la politique suicidaire et dispendieuse de M Sarkozy. 
 
Si le peuple souhaite franchir ce pas pour retrouver sa souveraineté, il lui faut attendre un moment plus propice et dans l’intervalle mieux choisir ses élus. Je ne pense pas ici, uniquement, à l’élection présidentielle, où le peuple doit élir un homme digne de confiance et indépendant des partis, sa mission n’étant pas de conduire la politique ou de réformer l’état. Non ! Je songe aux députés dont l’immense majorité issue des prétendus grands partis rassemble des personnes corrompues par le pouvoir qui ne remplissent pas leur mission et vivent aux crochets de la nation en profitant et magouillant tous azimuts. Le peuple doit choisir des représentants dignes et intègres quelle que soit leur activité professionnelle.
 
Afin de corriger les erreurs électorales, il semble nécessaire de réduire à 3 ans la durée de la législature. Il paraît aussi capital de déterminer, par le suffrage universel, les justes rémunérations et frais d’une telle mission législative. Il est aberrant que les Parlementaires et le Gouvernement décident eux-mêmes de leurs gages. Celui qui entre en fonction dans une entreprise définit son salaire en accord avec son patron, de la même manière le mandataire s’accorde sur ses émoluments avec son mandant, il n’en décide pas seul. Pourquoi en serait-il différemment des représentants du peuple ? 
 
Quant au traité de Lisbonne il suffirait peut-être de le renégocier pour faire de cette Union celle des peuples et non des chefs et des banques. Après tout n’est-ce pas parce que les banques francaises représentaient le plus gros créancier de la Grèce que dame Lagarde des finances à tout soudain fait découvrir la solidarité européenne à Sarlkozy ! 
 

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