Le Brexit, 21 mois après, partie 1

par Laurent Herblay
mercredi 4 avril 2018

Voilà un an que Theresa May a lancé la procédure de l’article 50 pour lancer le Brexit, neuf mois après que les britanniques aient voté pour sortir de l’Union Européenne. Le moment de faire un bilan sur ce qui s’est passé, de mettre chaque camp en face de ses analyses et de prendre du recul sur le chemin qu’il faudrait prendre pour, nous aussi, un jour, quitter le monstre institutionnel européen.

 

Une sortie, au ralenti
 
Autant le vote de juin 2016 avait fait l’effet d’un coup de tonnerre dans des milieux métropolitains si uniformément attachés à leur religion soit-disante européenne, autant les vingt et un mois qui ont suivi ont finalement été assez paisibles, pour qui prend un peu de recul sur le fracas de quelques déclarations exagérées. La croissance de la Grande-Bretagne ne s’est pas effondrée, le pays ayant pu compter sur sa propre monnaie et sa propre banque centrale pour adopter presque immédiatement des mesures de soutien à l’été 2016, qui ont fait baisser la livre. Un bon exemple qui montre l’intérêt d’avoir sa propre monnaie et de ne pas être enfermée dans la monnaie unique qu’est l’euro.
 
Sur la croissance, les débats sont assez agités. Le camp du « Bremain » avait parfois assez imprudemment annoncé un cataclysme, qui n’est pas venu. Depuis, ils s’accrochent aux quelques dizièmes de pourcents de croissance de moins de la Grande-Bretagne par rapport à la moyenne de l’Union Européenne ou la légère remontée de l’inflation consécutive à la baisse de la livre. Mais l’écart reste minime à date et il serait utile de voir l’évolution détaillée par décile. En effet, si le petit écart actuel de croissance vient uniquement du dégonflement de la sphère des très hauts revenus, qui préfère le cadre plus oligarchique de l’UE, alors cet écart n’est en aucun cas un problème pour le Royaume Uni.
 
Malgré tout, à moins que le pays ne mette en place une politique nettement plus progressiste que dans l’UE, ce qui n’est pas à l’ordre du jour, il faut bien reconnaître qu’un très léger décalage de croissance pourrait persister à court terme. En effet, même si la période de transition va durer jusqu’à décembre 2020, les multinationales devraient préférer le cadre européen, qui leur est plus favorable, et laisse moins de latitude d’action aux Etats pour encadrer la quète des intérêts de leurs actionnaires. Par conséquent, il est probable qu’elles préfèrent des implantations continentales. Mais ce faisant, encore une fois, l’UE montre qu’elle est un espace qui sert d’abord les intérêts du monde des affaires.
 
Cependant, le gouvernement actuel britannique n’a pas de projets très différents de ceux de l’UE, à la question migratoire près, ce qui explique sans doute le choix d’une sortie lente et au ralenti. Non seulement Theresa May prévoit d’utiliser pleinement les 2 ans de négociation prévus dans l’article 50, mais elle a déjà accepté une période de transition de 21 mois, où pas grand chose ne changera. Finalement, on peut se demander si l’agenda de Jérémy Corbyn n’aurait pas imposé une sortie plus franche et rapide, tant son programme est davantage en contradiction avec l’agenda euro-oligolibéral, au contraire du programme politique des conservateurs, bien plus proche de celui de l’UE.
 
Dans l’absolu, cette sortie au ralenti, et finalement assez douce, reste inquiétante pour l’UE car elle pourrait dédramatiser l’idée même d’une sortie de l’UE, les risques apparaissant finalement très limités. Mais c’est sans compter sur des média souvent alarmistes et de parti-pris, qui rabâchent leur horreur du Brexit, probablement sans grande influence pour qui n’est pas de leur bord.
 

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