Nicolas Sarkozy justifie sa politique devant le Parlement européen

par EurActiv.fr
vendredi 16 novembre 2007

Invité à s’exprimer devant le Parlement européen à Strasbourg, le président français n’aura surpris personne. Sur tous les sujets, y compris ceux qui fâchent, les positions de Nicolas Sarkozy n’ont pas varié, notamment sur l’adhésion de la Turquie à l’UE, à laquelle il s’est une nouvelle fois opposé.

Contexte :

Le président du Parlement européen, Hans-Gert Pöttering, avait été le premier invité étranger de Nicolas Sarkozy à l’Elysée après l’élection présidentielle.

Une situation qui justifie peut-être l’invitation exceptionnelle de Nicolas Sarkozy à s’exprimer devant le Parlement européen. En dehors des présidences de l’UE, les discours de chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres devant le Parlement y sont effectivement rares. Or, avant la présidence française de l’UE qui aura lieu au deuxième semestre 2008, c’est à la Slovénie de prendre les rênes du Conseil de l’Union.

Enjeux :

Rien de nouveau sous le soleil. Sur la ratification du traité, la politique monétaire, l’Europe protection ou encore la Turquie, les propos tenus, mardi 13 novembre à Strasbourg par le président français, n’étonneront personne.

Le mini traité et après ?

Nicolas Sarkozy est tout d’abord revenu sur le traité modificatif sur lesquels les Etats membres sont parvenus à un accord. En ce qui concerne la France, la ratification parlementaire annoncée a été confirmée. « Si l’Europe est démocratique au Parlement européen, la France est démocratique au Parlement français », a lancé le président français aux députés, allusion aux critiques de ses détracteurs qui, à l’image du Parti socialiste français, l’accusent de ne pas jouer le jeu de la démocratie en choisissant la voie parlementaire.

Tout en soulignant l’importance du traité pour débloquer l’Europe, le président français a néanmoins indiqué que si celui-ci ne permettrait pas à l’Europe de décider et d’agir, car le texte « ne dit pas dans quel but et avec quelle finalité ». Le traité de Lisbonne « ne donne pas de raison à ceux qui avaient décidé de croire en l’Europe de reprendre confiance en elle », a-t-il ajouté, en précisant qu’il était temps de passer à l’action politique.

La BCE doit être contrôlée

Filant la métaphore de l’Europe démocratique, le chef de l’Etat français a indiqué que l’UE devait pouvoir « débattre de tout », et notamment de la politique monétaire de l’Union. Comme à son habitude, Nicolas Sarkozy a critiqué, en l’occurrence de manière voilée, l’absence de contrôle par les Etats membres de la Banque centrale européenne (BCE). « L’Europe a choisi la démocratie, et dans une démocratie nulle indépendance ne peut se confondre avec une irresponsabilité totale. Nul ne peut se prévaloir de l’indépendance de son statut pour se dispenser d’avoir à rendre des comptes, à s’expliquer, à être contrôlé », a-t-il déclaré.

Selon le chef de l’Etat, l’absence de diminution de ses taux d’intérêt par la BCE constitue notamment un frein à la croissance des pays européens.

L’Europe protection n’est pas un gros mot

La nécessité pour l’UE de protéger ses citoyens est revenue dans le discours du président français. Le gouvernement a d’ailleurs déjà indiqué que la présidence française de l’UE en 2008 serait placée sous le signe de l’Europe protection.

« Si nous ne voulons pas qu’un jour les peuples exaspérés d’être victimes de la concurrence déloyale et des dumpings réclament de nouveau le protectionnisme et la fermeture nous devons avoir le courage de débattre de ce que doit être une véritable préférence communautaire  », a martelé une nouvelle fois le président français, selon lequel les négociations commerciales, notamment à l’OMC, doivent se faire en vertu du principe de réciprocité.

Un principe récusé par bon nombre de ses partenaires européens, notamment les Britanniques et la Commission européenne. Selon cette dernière, l’ouverture des frontières et une concurrence accrue profitent au consommateur.

La politique économique française est justifiée

Dans ses prévisions de croissance présentées la semaine dernière, la Commission a mis en garde la France contre le creusement de ses déficits et ses mauvaises perspectives de croissance.

Après être revenu sur les priorités de la présidence française, dont la liste n’a pas diminué depuis son premier discours devant les ambassadeurs français à la fin du mois d’août, le président français a répondu aux critiques sur sa politique économique, en indiquant qu’elle était un préalable nécessaire au respect des critères du pacte de stabilité. « J’ai engagé une politique de réforme. Ce n’est pas dans l’intérêt de l’Europe qu’elle échoue. C’est grâce à ces réformes (...) que la France assainira ses finances publiques, qu’elle respectera ses engagements ».

La Turquie n’adhérera pas à l’UE

Si les propos tenus à Strasbourg par Nicolas Sarkozy sont en droite ligne avec son discours habituel sur l’Europe, ses déclarations sur la Turquie lors de la Conférence des présidents de groupe, qui s’est tenu peu de temps avant, ne l’ont pas été moins. D’aucuns auraient pu penser que le président français avait assoupli son discours sur l’adhésion d’Ankara, pas le moins du monde. Selon un communiqué de presse du Parti socialiste européen, « le président français a indiqué aux chefs de file des groupes politiques au Parlement européen qu’il s’opposerait à une adhésion pleine et entière de la Turquie à l’UE  ».

Positions :

Si le président du Parlement européen, le député allemand Hans Gert-Pöttering (PPE-DE) a salué le discours « sincère » et « profondément européen » du président français, les Socialistes ont été beaucoup plus critiques.

« Visiblement, nous ne partageons pas les mêmes priorités que M. Sarkozy. Le président français n’a pas employé une seule fois le mot "social" dans son discours », a souligné Hannes Swoboda, vice-président du groupe socialiste au Parlement européen. « Cela nous inquiète beaucoup dans la perspective de la présidence française de l’UE », a-t-il ajouté.

De son côté, le député européen socialiste français, Gille Savary, n’a pas été plus tendre. « On ne peut qu’être déçu de sa confondante imprécision sur les priorités de la présidence française et sur l’absence de toute référence à l’Europe sociale et aux services publics dans les propos du chef de l’Etat  ».


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