Plus vivant tu meurs

par PROVOLA
samedi 26 janvier 2013

L'Europe des investisseurs redresse la tête, les taux d'intérêts baissent, l'inflation est contenue, les cours de bourse vont monter de 15% cette année, la crise est derrière nous, c'est le Boss qui le certifie, l'ennemi de la finance, achetez maintenant, avant que cela ne vous coute plus cher demain. Dormez tranquilles, les USA et le Japon vont racheter des actifs à risques sans compter, de manière illimitée, comme si les arbres montaient au ciel, la croissance va revenir de ce coté-là, et de la Chine, et des pays émergents, grâce aux gaz de schistes, aux terres et aux métaux rares, grâce au charbon, grâce à la dégradation de l'environnement, qui est une croissance de plus. Hisseo, Santiano, tiens bon la barre et tiens bon le vent, l'économie est une croyance, crois en ton destin, aie confiance, la confiance d'aujourd'hui est la croissance de demain. 

Les banquiers retrouvent le sourire et des dividendes, Goldman Sachs engrange des bénéfices records, les ventes autos explosent en Chine, en Inde, au Brésil, en Russie, surtout les véhicules de luxe.

Et L'Allemagne tient les rênes du continent, la BCE qui est à son service soutient le taux de change de l'euro. Car les produits teutons contineront de se vendre même avec un euro fort. 

Le sud de l'Europe est en flammes, mais qu'importe, tant que les deutsche produktes se vendent comme des petits pains.

Et la doxa journalistique, enflée comme un ballon de baudruche, de tenter de nous persuader que le monde est beau, que les sports d'hiver se portent comme un charme, que la croissance sera au rendez-vous de l'été.

Alors de qui se moque-t-on ? Des Espagnols d'abord.

Le marché du travail en Espagne est sinistré. Le pays s'apprête à dépasser le seuil fatidique des 6 millions de chômeurs. A la fin de l'année 2012, le pays comptait en effet 5.965.400 de personnes sans emploi, a annoncé jeudi l'Institut national de la statistique.

Le taux de chômage a ainsi bondi d'un point au cours du dernier trimestre 2012, à 26,04% . Les prévisions du gouvernement, qui n'envisageait qu'un taux de 24,6% pour la fin 2012, sont largement dépassées. Or pour Soledad Pellon, analyste de la maison de courtage IG Markets, ce n'est pas terminé. "Nous nous attendons maintenant à ce que ce chiffre augmente durant 2013". Alors que le gouvernement mise sur un taux de 24,3% à la fin 2013, cette analyste estime "très probable" un taux de 26,8% ou 26,9% cette année. Et elle n'attend aucune création d'emploi avant 2014

Dans ce contexte, toutes les organisations humanitaires s'alarment d'une pauvreté galopante : près de 12,7 millions de personnes, dans ce pays de 47 millions d'habitants, étaient en 2011 en danger de pauvreté ou d'exclusion, selon une étude européenne. "La pauvreté augmente, la faim augmente déjà. Les soupes populaires débordent de monde, tout empire.

Alors de qui se moque-t-ton ? Des Italiens, qui avec la cure Monti ont avalé une soupe salée et la cueillère avec, qui est restée en travers de la gorge. Les taux ont baissé explique-t-on, en ajoutant que la dette a augmenté de 7% et qu'il faut s'attendre à une nouvelle salve de coups de fouet. Ce qui va inévitablement plomber l'activité, ce qui va réduire les rentrées fiscales, ce qui conduira à un nouveau tour de vis.

Alors de qui se moque-t-on ? Des Grecs ensuite, déjà plongés dans un bain d'eau de javel, essorés, repassés, pliés, cimentés, baionnés, statufiés, coulés. Des Grecs vendus aux intérêts chinois, perfusés, piqués, saignés. 

Alors de qui se moque-ton ? Des Portugais, qui ont refait leur valise en carton, les ont remplies de Fado et sont repartis comme dans les années soixante aux quatre coins du monde, en Angola, au Brésil, au Luxembourg, en France, en Belgique, en Allemagne, en Suisse, au Canada.

Alors de qui se moque-t-on ? Des Français, à qui l'on va apprendre la flexibilité, la compétitivité, les bas salaires, la précarité, la pauvreté, la soupe populaire, ces privilégiés si attachés à leurs avantages sociaux comme à un poteau de torture. Comme pour mieux faire passer la pilule, c'est la gauche, ou ce qu'on s'acharne à appeler la gauche, qui va tout détruire, de ce qui s'est construit en un siècle de luttes sociales. Ces foutus Gaulois vont apprendre le chômage de masse, la concurrence, les rendements, le low cost, les rythmes chinois, l'évasion fiscale de leurs élites, la peur du lendemain. Et malgré ce cocktail explosif, le Président droit dans ses bottes continuera de nier l'évidence d'une déliquescence du lien social.

Alors de qui se moque-t-on ? Des Allemands qui vont bientôt apprendre à leurs dépends les règles de la chaîne alimentaire, qui recevront en pleine poire ce boumerang lancé en l'air par la Bundesbank déguisée en BCE, un soir de crise mondiale. Car vendant 60% de ses produits high tech à une Europe en panne, la belle mécanique exportatrice, tel un Titanic privé d'océan va vite se retrouver en cale sèche. 

Alors de qui se moque-t-on ? Du bon sens et de la logique. De nous. Nous, naufragés de la mondialisation, qui seront bientôt sauvés, morts, mais sauvés. Par la faute de ces infirmiers du libéralisme, ces professeurs d'économie, ces apprentis sorciers du bonheur qui pensent nous soigner en nous apprenant à courir vers l'illusoire fuite en avant consumériste, qui pour tenir en haleine les courbes et les indices, nous veulent morts de faim, transis de peur, locataires d'une Terre à bout de souffle.


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