Pour sauver l’économie, la BCE doit encore baisser son taux !

par Aimé FAY
mardi 14 octobre 2008

Les bourses remontent. Le G15 aurait-il visé juste en garantissant les crédits interbancaires tel que l’avait proposé le travailliste Gordon Brown ? Si c’est le mal dont souffraient les marchés boursiers, il a bien visé. Bravo à la France d’avoir organisé cette rencontre et de ne pas avoir chipoté sur l’origine des idées ! La confiance des investisseurs va repartir, les cours vont remonter et l’économie reprendre sa croissance. Est-ce aussi sûr que cela ? La crise, celle lancinante d’une économie à bout de souffle, a-t-elle disparu par enchantement  ?

Non, sûrement pas, car, avant la crise, notre pays souffrait d’une récession rampante, d’un manque d’investissement, d’un manque d’exportations, d’un manque de consommation, d’un manque général de pouvoir d’achat chez l’ensemble des agents économiques et d’un manque de confiance dans l’avenir. Ces maux, toujours présents, ont rendu les ménages et les entreprises fragiles et accessibles au moindre défaut de paiement pour certains, au dépôt de bilan pour d’autres, donc à l’insolvabilité tant redoutée par le système bancaire. Les banques n’aiment pas porter de tels risques, d’autant que la crise dans l’économie réelle est très profonde.
 
Bien que le métier des banques soit, notamment, de recevoir des dépôts et de faire du crédit, elles ne peuvent en aucun cas le faire n’importe comment. 
 
Quand la banque prête, elle prête une partie importante de l’argent que ses clients déposants lui ont confié. Charge à la banque de le leur restituer quand ils le désirent, lors d’un retrait au guichet ou lors de l’utilisation d’un moyen de paiement comme le chéquier ou la carte bancaire, par exemple. Les déposants des banques n’attendent donc pas d’elles, qu’elles prennent des risques démesurés à prêter "leur argent" à des emprunteurs sur lesquels pèse un risque important de déconfiture. Même si ce risque est dû à la conjoncture nationale, internationale ou à tout autre problème indépendant de leur volonté.
 
Si l’emprunteur ne rembourse pas, c’est la banque qui en fait les frais. Et, si plusieurs personnes, par centaines, voire par milliers, ne remboursent pas la banque, elle fait faillite et ses déposants ne retrouveront pas leur argent. Quoique l’Etat est promis (cf. l’article L. 613-1 du Code monétaire et financier). Soyons en sûrs ! Un Etat en faillite, comme une entreprise en déconfiture, ne peuvent pas donner des fonds qu’ils n’ont plus.
 
Alors, garantir les banques entre elles, c’est bien. Mais, garantir le crédit l’économie, c’est indispensable, voire vital pour une économie encore sous la menace du credit-crunch.

Ainsi, au-delà des plans que le G15 a déclenchés dans beaucoup de pays de l’Euroland, il va falloir que les Etats remettent très rapidement de l’huile dans le rouage du crédit à l’économie. Sinon, ce lundi 13 octobre 2008 aura été un coup d’épée dans l’eau.
 
Chaque Etat doit battre le fer pendant qu’il est chaud et profiter, dans les jours prochains, de la fenêtre de confiance qu’il vient de s’offrir en mettant sur le tapis commun près de 1 500 milliards d’euros.
 
Pour cela, chaque Etat a plusieurs solutions à sa disposition :
 
1° garantir les banques contre le risque de crédit – aux ménages et aux entreprises – pour une période et une enveloppe limitées, qu’elles supporteront lors de l’octroi de nouveaux prêts à l’économie. Cela, à partir du lundi 20 octobre 2008. Par ailleurs, afin de ne pas financer tout et n’importe quoi, les structures ad hoc que les gouvernements vont créer, auront en charge les modalités d’application de ce type de garantie ;
 
2° tout nouveau crédit accordé à l’économie et, répondant aux règles fixées par l’Etat, créera pour la banque concernée un droit de tirage – type DTS du FMI – lui donnant accès à un refinancement à un taux largement bonifié, pour un montant représentant 70 % du montant du prêt consenti ;
 
3° enfin, si nous voulons que les mesures adoptées par l’Europe des quinze, boostent aussi l’économie réelle de tous ses pays, il faut irriguer toute notre économie d’un euro dopé à l’EPO. Cet EPO s’obtient, en matière monétaire, par la baisse significative du taux d’intervention de la banque centrale. Deux points par exemple !
 
 Ainsi, il paraît maintenant indispensable pour la BCE d’accompagner concrètement les décisions du G15.
 
 Ne rien faire, ce serait comme si l’on coupait la transfusion sanguine au milieu d’une magnifique greffe cœur-poumons. Le patient n’y survirait pas malgré la compétence et la clairvoyance des chirurgiens… du G15. Notre économie est actuellement sur la table d’opération. Elle doit être sauvée.
 
A ceux qui sauteront, tels des cabris sur leur chaise, en criant "inflation, inflation, inflation !", nous répondrons qu’il vaut mieux vivre avec une l’inflation sous contrôle, que de vivre sous les ponts… débarrasser de toute inflation.
 
L’épreuve que traverse l’Union européenne est une formidable opportunité pour nos dirigeants de remettre les choses à plat. Le changement des statuts de la BCE, notamment son article 105, est sûrement un point à mettre à l’agenda de la prochaine réunion de l’Eurogroupe.

Courage, le verre est à moitié plein ! Il faut aller jusqu’au bout. La présidence française doit se terminer par un sauvetage complet.
 
 

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